Evasion (1)

D’un pas décidé, Aubin traverse le village sans se soucier des nombreuses paires d’yeux qui l’épient à l’abri de rideaux. Il se contente de repérer d’éventuels commerces. Deux km plus loin, il aperçoit un sentier, l’emprunte. Il traverse un bosquet, débouche au bord d’une rivière presque à sec. L’été s’achève dans une continuelle canicule. Cependant, le ciel s’assombrit, des grondements annoncent un orage probable. Le jeune homme pose son barda à terre, boit quelques gorgées d’eau tiède contenue dans sa gourde, s’essuie la bouche d’un revers de main, content de ce geste qu’il qualifie de campagnard. Il observe les alentours, voit un endroit herbu protégé par d’énormes branches de chênes : coin idéal pour planter sa tente. Deux heures plus tard, il procède à quelques ablutions avant de prendre un peu de repos.
Le vent se lève, le ciel noircit de plus en plus. Aubin renonce à son projet de faire un feu pour la préparation de son dîner. Il se contentera de finir le saucisson et le fromage entamé ce midi. Sage décision d’autant que les gouttes commencent à tomber pour devenir rapidement de véritables trombes d’eau. Les éclairs strient l’atmosphère, le tonnerre assourdit l’ambiance. Calfeutré sous son abri de toile, le campeur se félicite : il a bien choisi l’endroit. A aucun moment il ne pense que les arbres peuvent attirer la foudre, comme on le dit. Il a une excuse : c’est la première fois qu’il séjourne à la campagne, qu’il s’adonne au camping.
L’averse diminue, fait place à une pluie fine bien que soutenue. Aubin avale son repas frugal, s’endort, éreinté, les pieds douloureux. Une pensée le chagrine : il n’a pu procéder à sa toilette avant de se coucher.
Le son des gouttes sur la toile réveille le campeur qui éprouve des difficultés à se rendormir. Machinalement, sa main caresse le pénis rapidement au mieux de sa forme. Silencieusement, doucement, les doigts s’activent dans un ballet masturbatoire. Un léger gargouillis sort de la gorge, signalant que l’éjaculation pollue le corps du jeune homme qui s’essuie à l’aide d’un mouchoir en papier.

Le sommeil revient de suite après.

Premier matin, premier réveil champêtres. Poisseux de sueur et de quelques traces de sperme séché, Aubin s’ébroue dans la rivière au niveau un peu plus élevé que la veille. Le soleil tente de pousser les gros nuages persistants, aidé en cela par le vent un soupçon frisquet. La température est devenue supportable. Propre, l’homme prépare son petit déjeuner à l’aide du réchaud. Il inspecte ses réserves alimentaires : une incursion au village s’avère indispensable. Le café avalé, il range ses affaires sous la tente et se prépare à partir profitant de cette météo clémente.
Arrivé au bord de la route, Aubin hésite. Des douleurs aux pieds lui rappellent les trop longues marches des deux derniers jours. Il opte pour une tentative d’auto-stop. Là encore, il s’agit d’une première. Et l’endroit n’est guère passager! Patient, il s’assied sur une borne. Une bonne heure plus tard, un tracteur arrive, tirant une longue charrette de foin. Le conducteur ralenti, s’arrête, fait signe à l’auto-stoppeur, qui obtempère, de grimper sur la marche. L’engin repart. L’homme demande :
<< - Où qu’tu vas comme ça, garçon ?
- Au village faire des courses.
- J’te laisse à l’entrée, moi j’vais à gauche. T’es en vacances ?
- Ouais, pour deux semaines.
- Où qu’tu niches ?
- Au bord de la rivière, sous les chênes.
- On t’a laissé faire ? Ça m’étonne.
- Pourquoi, c’est interdit ?
- Ici, on plaisante pas avec les campeurs sauvages, comme on dit. Faut demander au proprio sinon y va appeler les pandores pour t’déloger, pour sûr.
- Vous croyez ?
- Pour sûr, garçon !
- À qui je dois m’adresser ?
- À mon patron. Tout l’coin lui appartient. Si t’es correct, y’aura pas d’histoire. Bon, je t’emmène comme ça t’y demanderas. >>

Vingt minutes plus tard, Aubin quitte la ferme, une fois l’autorisation obtenue. Un quart d’heure de marche et le voilà dans le village.
Il se dirige vers l’épicerie qui fait presque office de mini superette, sous les regards inquisiteurs des autochtones. Entrée avec un bonjour prononcé à voix haute. En attendant son tour, il établit mentalement une liste de ses achats. Ici, on caquette beaucoup avant de passer commande, pendant qu’on est servi et après avoir réglé. Le nouveau venu prend son mal en patience. Il est aidé en cela par un jeune homme aux formes appétissantes. Le fils de la maison, probablement, qui s’occupe à satisfaire une clientèle d’habituées. Une femme imposante se charge du côté bar-tabac-journaux. Un homme, non moins imposant, chantonne dans l’arrière boutique, qui fabrique le pain, les pâtisseries, quelques plats traiteurs ou sur commande spéciale. Lorsqu’arrive enfin le tour d’Aubin, la boutique n’a pas désemplie. Les clientes déjà servies restent à bavasser dans l’attente de savoir qui est cet énergumène venu de la ville (suppose-t-on). Celui-ci passe sa commande d’une voix ferme, presque froide, soucieux d’éviter toute conversation. Toutefois, il fait montre d’une extrême politesse et salue tout le monde en sortant.

Retour au campement. Le sac est lourd. De nouveau, la chance lui sourit : le même tracteur s’arrête pour le prendre :
<< - Alors, garçon, ça va comme tu veux, par le fait ? L’patron a accepté à c’que j’comprends.
- Oui, pour deux ou trois semaines.
- T’as d’la veine de pouvoir t’payer du congé. Nous, y’a pas, faut s’occuper des bêtes tous les jours que Dieu fait.
- Vous ne prenez jamais de vacances ?
- Si, j’y ai droit, comme tout l’monde. Mais y’a toujours un truc, à peine que j’suis parti quelques jours. Sinon, tu fais quoi ?
- Repos complet pendant un an. Une année sabbatique, en quelque sorte.
- Ah oui ! C’est la mode, ça aussi, l’année sabbatique ! Y’a qu’les gens d’la ville pour faire ce genre de fainéanterie. Excuse mais c’est c’que j’pense, moi. Et où que t’iras dans deux ou trois semaines ?
- Je ne sais pas encore.
Je verrai bien. >>

Le conducteur hausse les épaules comme pour signifier qu’il pose des questions histoire de causer, se désintéressant complètement des réponses.
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Le ciel s’éclaircit promettant une belle fin de journée. Allongée au bord de l’eau, Aubin rêvasse. En fait, il s’ennuie, tout bonnement. En venant ici, il envisageait des promenades, des baignades. L’envie lui a passée. Les longues marches ne sont pas pour lui, ses pieds encore douloureux le lui rappellent. Quant aux baignades, la température de l’eau frise le glacial selon ses critères, pour cause de débit maigrelet et rapide de cette rivière. Des pas attirent son attention. Il se redresse : le fils de l’épicier qui déclare :
<< - S'cusez, M’sieur ! Z’avez oublié quéqu’chose. >>

Le jeune homme montre un paquet de mouchoirs en papier. Aubin constate :
<< - Fallait pas vous déranger pour si peu.
- Ben c’est que j’savais pas si j’vous, r’verrais. Alors j’ai préféré venir. >>

Aubin se lève, rejoint le garçon tout en le remerciant. Il ne le quitte pas du regard, l’observant en détail. Taille moyenne, dans les 1m70 pour 65 kg environ. 18 ou 19 ans, pas plus. Solidement campé sur de magnifiques jambes aux mollets tout en muscle. Visage à l’ovale presque féminin, glabre. Grands yeux sombres surmontés de sourcils indisciplinés et protégés par de longs cils très fournis. Le nez normal, légèrement retroussé. Malgré cette féminité mentionnée, il se dégage une certaine force virile qu’apprécie Aubin ému par la timidité de son visiteur. Ce dernier ne se prive pas d’admirer son client. Un homme (pour lui) dans les 22/23 ans. Grand, peut-être 1m90 pour 80 kg, probablement. Les épaules larges, le torse en "plaques de chocolat". Sûr que ce mec fait du sport mais pas en extérieur, sa peau trop claire le prouve. Les cheveux noirs, bouclés, abondants, longs.
Les yeux pers, tristes tout comme la bouche aux lèvres généreuses mais amères. Un nez un peu fort dénonce une grande sensualité. Il émane de chez cet homme comme une atmosphère mystérieuse, d’irréel.
Aubin rompt le silence :
<< - Maintenant que nous nous sommes bien observés, l’un comme l’autre, passons à nos noms. Moi, c’est Aubin. Et toi ?
- Mikael. Bon ben faut qu’je file ! L’boulot attend pas, mes parents non plus.
- Tu as quel âge, Mikael ?
- 18 ans ½. Allez ! J’y vais. Au r’voir, m’sieur Aubin ! >>

Le garçon détale sous le regard rieur d’un Aubin heureux de cette diversion. Il décide alors de bouger un peu. Une visite sur la berge ne devrait pas trop le fatiguer.
Tout en flânant, Aubin cueille des fleurs. Il se demande bien le pourquoi, lui qui ne s’est jamais intéressé à cela. D’un coup, il regrette cette cueillette : il n’a pas de vase. Naïvement, il dépose les marguerites, coquelicots et bleuets dans l’eau, espérant les sauver d’une fanaison certaine. Il continue sa promenade, se dirige vers un pré au milieu duquel se trouve une petite maison de pierres et de terre au toit en assez bon état. Voilà un endroit où s’abriter en cas d’urgence. Il s’approche. Ses oreilles captent comme de fortes respirations. Certainement un animal quelconque. Prudent, Aubin renonce à entrer, préférant épier par une sorte de minuscule fenêtre sans carreau. Il y a bien de l’animal à l’intérieur. Deux, en vérité, de l’espèce dite supérieure : humaine. Tendrement enlacés, nus, allongés sur une couverture, Mikael subit les assauts du conducteur de tracteur. Ce dernier sodomise son amant, jouant avec dextérité de son long pénis. Le jeune glousse sa joie. D’un coup, les amoureux ne bougent plus, aux aguets. En cherchant une meilleure position, Aubin vient de marcher sur du bois mort. Mikael déclare, inquiet :
<< - Y’a quelqu’un qu’arrive. Faut décamper !
- Mais non, on risque rien ici.
- T’oublies l’Aubin qui traîne dans les parages. Faut aller voir ! Bouge pas, j’y vais. >>

Rapide, Mikael se lève, saute quasiment dans son pantalon, passe sa chemise, laissant pantelant son compagnon à la queue turgescente dans un préservatif. Ce qui donne à Aubin le temps de filer derrière la haie bordant le pré. La cachette s’avère peu sûre. Découvert, l’intrus proteste :
<< - J’ai juste entendu des voix, j’allais partir. Je ne voulais pas vous déranger. Va rejoindre ta belle, elle doit s’impatienter. >>

Mikael, rassuré par ce mensonge, retourne à la maison tandis qu’Aubin regagne son campement la tête pleine des corps entrevus, de la longue queue, format gourdin, pénétrant vivement les entrailles d’un amant frémissant sous les coups. A peine revenu, il s’allonge sur son duvet, baisse son short. Sa bite jaillit, humide, grosse mais courte, lourde. Il s’en empare d’une main tandis que l’autre tâte délicatement les couilles. Dans sa tête, il voit presque les ébats des deux autres. Langoureusement, Mikael se déshabille à nouveau, devant les yeux gourmands de son compagnon au braquemart tendu. Ils reprennent contact par un corps à corps effréné. Très vite, la grosse bite s’immisce dans l’anus qu’elle a précipitamment quitté. Les va-et-vient reprennent, endiablés. Les doigts caressent, griffent. Les bouches embrassent, mordillent. Des gorges émanent plusieurs sons aux intensités différentes. Des pénis s’éjectent d’énormes jets de foutre. C’est le moment que choisit Aubin pour éjaculer abondamment, dans un soupir de grande satisfaction. Il bande toujours, conservant dans sa tête l’image de ces corps en ébullition. Une seconde branlette s’avère indispensable.

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Un bruit de moteur réveille Aubin qui ne veut pas sortir de la tente. Las ! Une voix l’appelle qu’il reconnaît. Elle insiste. Des pas approchent. Excédé, Aubin ouvre juste le minimum pour le passage de sa tête. Planté devant lui, l’ouvrier agricole déclare à brûle-pourpoint :
<< - Allez garçon ! M’la fais pas ! J’sais qu’t’as tout vu. L’Mikael y croit qu’non, mais c’est encore un jeunot. Toi t’as déjà d’la bouteille, ça s’sent ces choses là. Pas mal l’coup d’la fille pour pas l’effrayer. A marché le p’tit, pour sûr.
- Non, je n’ai pas tout vu. Dès que j’ai compris ce qui se passait, j’ai filé. C’est tout.
- Alors pourquoi t’cacher derrière la haie ?
- Simple réflexe.
- Ouais, t’as raison, j’vais t’croire, pour sûr. Ça t’a plu d’nous voir, l’Mikael et moi, en train de s’la donner.
- Je vous dis que je n’ai eu le temps de rien voir.
- Allez, m’la fais pas, garçon ! J’suis un vieux d’la campagne, moi. J’entends tout. T’as r’gardé au moins deux ou trois minutes. Pas vrai ?
- Peut-être, je ne sais pas.
- C’est mieux comme ça. Les menteries ça paie pas. J’suis venu pour t’dire qu’y faut pas emmerder le p’tit avec nos histoires d’cul. Et moi encore moins. R’marque, ici personne te croira si tu vas vomir des trucs sur nous. Mais t’y essayes pas. Voilà, c’est tout c’que j’avais à t’dire. Sinon, on peut rester copains, moi et toi.
- Je n’aime pas parler de la vie privée des autres. Vous n’aviez pas besoin de me menacer. J’ai assez à m’occuper avec mes fesses sans aller m’intéresser à celles des autres. Sauf dans un lit, cela va de soi.
- Alors on s’entendra bien l’temps que tu resteras parmi nous. Tu veux que j’t’emmène au pat’lin ? Si oui, grouille, j’ai pas trop d’temps. Moi j’m’appelle Modeste.
- Merci, Modeste. Mais pour aujourd’hui j’ai ce qu’il me faut. Demain d’accord.
- Pas avant 11h. Ça t’va ?
- Parfait, à demain.
- Fais gaffe ! Reste pas sous les arbres quand l’orage pète. Ça attire la foudre. Et y’en a un qui s’prépare, sûr et certain. >>

Un fois seul, Aubin procède à sa toilette dans la rivière, avale un solide petit déjeuner. Il se sent en grande forme. Hier il ne savait que faire de son temps. Aujourd’hui il a un but : conquérir Mikael ou/et Modeste afin de passer d’agréables heures en leur compagnie, tête-à-tête ou trio, peu importe ! Quelques mouvements de gymnastique, un peu de jogging, rangement sous la tente et autour permettent de passer le reste de la matinée. Déjeuner frugal, lecture sous un chêne. Vers 16h le nouvel orage s’annonce. Aubin décide de gagner la vieille petite maison dans le pré au pas de charge. Cent mètres avant d’atteindre son but, il crie :
<< - Y’a quelqu’un ? Je viens me mettre à l’abri ! >>

Ainsi, aucun risque de surprendre une amourette en plein développement charnel. Il prend son temps pour parcourir les derniers mètres. Personne ! Il le regrette presque. Dehors, les éléments se déchaînent. La pluie pénètre par les ouvertures, emmenée dans les bourrasques de vent. Dans un coin, bien à l’abri de toute salissure, une couverture proprement pliée. Aubin scrute le sol, machinalement, cherchant les traces des débordements entre Mikael et Modeste. Rien, pas même une capote voire un emballage de capote. Ils prennent leurs précautions, les drôles : prudents ils le sont à n’en pas douter. Près de trois quarts d’heure s’écoulent avant que la pluie cesse complètement, que les éclairs se produisent au loin et que les grondements s’estompent. Les rayons de soleil percent les nuages. Un peu transi par la fraîcheur soudaine due à la différence de température, Aubin regagne sa tente à marche e afin de se réchauffer.
Une surprise l’attend : la gendarmerie représentée par deux de ses éléments. Le chef salue courtoisement, demande :
<< - C’est vous qui campez ici ?
- En effet.
- Vous avez l’autorisation ?
- J’ai vu le propriétaire, Mr L… qui m’a permis de m’installer ici durant deux à trois semaines. Par contre je n’ai aucun papier signé par lui.
- Vous avez des papiers d’identité ? >>

Aubin fouille dans son sac, tend sa carte d’identité que l’autre agent prend puis se dirige vers la voiture afin de procéder aux vérifications d’usage. Pendant ce temps, Aubin note la ressemblance entre le gendarme resté auprès de lui et Modeste mais en plus empâté, plus lourd, plus âgé. Le second pandore revient, tend la pièce d’identité à Aubin en disant :
<< - Tout est OK. Vous êtes parfaitement en règle. Bon séjour parmi nous. >>

Ils saluent et s’en vont. Aubin pense immédiatement à une sorte d’avertissement de Modeste : tu te tais et tout va bien, tu parles et tu as la gendarmerie aux fesses. Ce qui ne lui plaît guère.
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Comme promis, Modeste arrive à 11h pétantes. Aubin, vêtu d’un jean, d’un polo, de baskets, d’un blouson léger, grimpe sur le tracteur. Les deux hommes se serrent la main, grands sourires aux lèvres. Le véhicule à peine reparti, Aubin attaque :
<< - Alors comme ça tu envoies ton père le gendarme pour contrôler que je ne suis pas un truand. Cette menace était inutile, tu sais.
- T’es fou ou quoi ! D’abord c’est pas mon père, c’est mon frère aîné, Virgile. Moi j’fricotte pas avec les pandores. On s’parle plus, moi et lui. C’est mon patron qu’a fait ça, à coup sûr. Y tient à s’rassurer sur ceux qu’y reçoit dans sa propriété. Juré, garçon !
- Je te crois. >>

Tout en disant cela, Aubin tapote l’épaule de Modeste qui jette un regard vers lui. Aubin reprend :
<< - Mikael et toi, c’est de l’exclusif ou du sérieux ?
- Ah tu vois qu’tu as tout vu, par le fait ! J’suis chargé d’famille, garçon. L’Mikael c’est mon casse-croûte en extra, si tu vois c’que j’veux dire. Y sait ça. Moi, si un autre casse-croûte s’présente, j’dis pas non. Et l’Mikael y cherche l’grand frisson avec une paire de couilles commac. Voilà, tu sais tout c’qu’y a à savoir.
- Je te conviens comme casse-croûte en extra ?
- Pas d’refus ! J’bourre bien tu sais.
- Dommage ! Toi et moi ça ne marchera pas.
- Pourquoi donc, garçon ?
- Je bourre aussi, voilà pourquoi.
- Oh c’est que ça ! T’inquiète on s’arrange toujours une fois qu’on a la queue en l’air. Bon, c’est pas l’tout mais on arrive. J’pense qu’on va s’revoir, moi et toi. >>

Comme la fois précédente, la clientèle traîne après ses achats. On veut savoir tout de ce jeune homme. Ce, d’autant que les personnes présentes sont toutes du sexe féminin, entre deux âges à savoir 40/60 ans, la plupart célibataires ; les mariées reluquant vers des fruits moins blets que leurs légitimes. On médit à voix basse tout en rêvant à des exploits coquins. Aubin n’a cure de ces bavardages bien trop préoccupé par un Mikael rouge comme un coquelicot lorsque son client s’approche du comptoir. Son visage reprend une couleur à peu près normale en constatant la mine indifférente de l’autre. Rien ne laisse deviner les pensées des deux garçons, pensées donnant dans le nu avec contacts polissons. Aubin règle. Mikael, de nouveau cramoisi, propose :
<< - Je peux livrer, si ça vous arrange. C’est que d’porter tout ce barda, ça vous tue, croyez pas ? C’est pas plus cher mais faudra attendre la fermeture vers 13h. Ça vous va ? >>

Aubin accepte d’un geste du crâne. En quelques dizaines de minutes il vient de capter l’attention de deux mecs totalement différents mais très alléchants. Les jours à venir promettent de joyeuses galipettes. Il s’apprête à rentrer à pied. En sortant du magasin, une femme le bouscule par "inadvertance". Il n’est pas dupe : on cherche par tous moyens à converser avec lui afin de savoir. En toute conscience, il joue le jeu. La bonne dame se confond en excuses, se présente : Mélanie, la bonne du propriétaire des terres occupés par lui. Enchanté, Madame. Non, Mademoiselle. Et la miss d’enchaîner franco :
<< - En vacances dans notre région ?
- En effet.
- Et vous êtes dans quoi comme métier?
- Rien pour l’instant.
- Vous vivez de l’air du temps, alors ?
- En quelque sorte, oui.
- J’ai compris, vous me chambrez. Je suis trop curieuse, hein ? Faut pas m’en vouloir. Vous savez, faut pas croire, ici on aime bien les étrangers. Ça nous change. Toujours voir les mêmes têtes, c’est pas drôle à la longue. Si vous avez envie de causer, hésitez pas. Nous autres on n’est pas bégueules. Pas comme les patronnes qu’en peuvent plus tellement qu’elles pètent plus haut que leur cul, croyez moi.
- Attention, elles pourraient vous entendre.
- Pas de risque, elles se salissent pas à venir ici. Toutes, on est employées de maison. Enfin celles que vous voyez dans la boutique. Les patronnes restent entre-elles. Bon, c’est pas le tout de bavasser mais le sauté de veau faut que ça mijote. Allez, à la revoyure, M’sieur Aubin. >>

Aubin se fend d’un grand sourire, regarde la femme s’éloigner en vélo. Sur le chemin du retour, il cogite : bizarre ce village. En fait, il ne connaît que la rue principale et son unique multi-commerce. Une virée de reconnaissance ne serait pas désagréable. Il projette d’en effec une dès cet après-midi.

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Nu, Aubin se dore au soleil. Sa peau rosit malgré les précautions prises. Il va sous les arbres, étale une serviette de bain, s’allonge en attendant la livraison. Lorsqu’il entend un moteur s’arrêter, il ouvre un œil guettant le moment où Mikael l’apercevra afin de se couvrir pudiquement comme s’il avait été surpris. La feinte se déroule comme prévu, provoquant une nouvelle montée de rouge aux joues du jeune homme qui, une fois à proximité de la tente, déclare, après un salut bredouillé :
<< - Tout y est, vous pouvez vérifier.
- Je te fais confiance, Mikael. Tu as mangé ?
- Oui, un casse-croûte avant d’venir. On a beaucoup d’travail en c’moment.
- Tu as le temps de prendre un café avec moi ?
- Ben… j’sais pas trop….
- Ou alors ce soir, après ton travail.
- Ben… j’sais pas trop…
- Ne sois pas si timide. Modeste ne t’en voudra pas.
- Ah ! Vous savez… y s’est pas trompé, l’Modeste, vous avez tout vu.
- Tu peux me tutoyer, Mikael. Nous sommes du même âge, à quelque chose près.
- Ben… j’sais pas trop… j’vais essayer… Aubin. D’où qu’y vient c’nom ?
- Je n’en sais fichtre rien. Ce que je sais, c’est que je suis né le jour de la saint Aubin, le 1er mars. Je n'ai jamais pensé à demander. Si ça se trouve, on m'a donné ce prénom parce que c'était le saint du jour.
- C’est drôle, moi j’suis né le 29 février. J’prends un an qu’tout les quatre ans !
- Tu en as de la chance. Alors pour ce café ?
- Bon, j’accepte. Mais pas trop longtemps, j’ouvre la boutique à 2 heures. >>

Mikael s’assied sur une grosse pierre, épie Aubin confectionnant un capuccino (soluble). Tous deux se taisent. L’invité ne cesse de déglutir en admirant les pectoraux de l’hôte. Ce dernier savoure déjà sa future victoire, jurant de ne pas blesser ce garçon si naïf. Il lui tend une tasse :
<< - Attention c’est très chaud.
- C’est du capuccino, hein ? J’aime bien.
- Dis-moi, Mikael, Modeste c’est ton petit copain ? Je veux dire ton amoureux ?
- Oh non ! Juste qu’y m’a appris. C’est avec lui, la première fois. Mais on l’fait pas souvent. Y’a sa femme qui l’surveille. Elle croit qu’y la fait cocue avec une autre femme. C’qu’est vrai. Y va aussi avec d’autres femmes. Mais j’m’en fous. On est libres tous deux. Quand même, j’ai pas beaucoup d’occasions de m’distraire, ici.
- Ça te dirait de passer quelques moments ensemble, toi et moi ?
- Ben faut voir…
- Je ne te plais pas ?
- Oh si ! T’es chouette comme gars. Mais j’ai pas l’habitude avec quelqu’un que j’connais pas. Alors tu comprends…
- Bien, alors faisons connaissance d’abord. Ensuite, on verra. >>

Ils dégustent leur capuccino en silence. Sa tasse vidée, Mikael se lève :
<< - Faut que j’me grouille sinon j’vais être en r’tard. J’suis content qu’on soient copains, moi et toi. Ce soir, vers 10 heures, ici. T’es d’accord ?
- D’accord. Moi aussi je suis content que nous soyons copains, toi et moi. >>

Aubin se lève à son tour. Espiègle, Mikael s’approche et dépose sur les lèvres de son nouvel ami un rapide bisou puis rejoint son vélomoteur en courant. Lorsqu’il entend la machine démarrer, Aubin soupire d’aise, main dans son short où regimbe sa grosse queue pleine de désirs.
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La commune est très vaste. Une centaine de villas complètent ce qu’il convient d’appeler la banlieue du bourg. Toutes sont pourvues d’un petit parc, se dressent fièrement, élégantes, sans ostentation. Le promeneur note les voitures haut de gamme dans presque toutes les propriétés. A chaque rencontre, il lance un aimable bonjour rehaussé d’un sourire. On l’observe continuer son chemin, un peu sur le qui-vive. Ici, que du cossu voire du riche. Jeunesse rare, vieillesse foisonnante. Apparemment, on vit entre gens du même monde. Le personnel se rencontre, palabre, échange, au bourg. Les patrons se reçoivent les uns et les autres, à domicile. La vie semble suivre son cours comme une "machine bien huilée". Lui, Aubin, deviendrait le possible grain de sable, susceptible d’enrayer ce parfait mécanisme, que cela n’aurait rien d’étonnant. Il hausse les épaules. Tout ce petit monde emploie pas mal de personnes à en juger par la vastitude des parcs, leur entretien impeccable, tout comme le rutilant des maisons, jusqu’aux garages et remises à outils fraîchement repeintes. Ici, on est soucieux des apparences. Les haies sont taillées, les pelouses tondues régulièrement. Pas un brin d’herbe, pas une branche, ne dépassent. Tout est maîtrisé selon le goût de chacun. C’est beau, certes, mais c’est triste. Rien d’original, rien de féérique. C’est vrai que l’on doit copieusement s’emmerder dans le patelin, se dit Aubin. Mais quand même, ils doivent bien avoir un exutoire, les gens d’ici. Charge à lui de trouver lequel. Il regagne son coin.

Les journées s’écourtent. Les soirées fraîchissent. Cette fois, c’est sûr, l’été s’achève et la canicule avec. Des nuages s’amoncellent à l’horizon ce qui n’enchante guère le vacancier. Ses inquiétudes se volatilisent lorsque la mobylette s’arrête. Mikael pose l’engin contre un arbre. Aubin, couché sous la tente, cherche à deviner les gestes de l’arrivant. Il voit un pan de toile qui se lève, aperçoit le visage rouge, mais souriant. D’une voix douce, rassurante, Aubin l’invite à le rejoindre. Sans hésiter, Mikael s’allonge contre lui, reçoit un premier vrai baiser. Les corps se détendent, se rapprochent. Les bras les enveloppent. Les langues jouent entre elles. Ils reprennent leur respiration. Mikael en profite pour demander :
<< - Promets que tu me f’ra jamais d’mal ! Vas-y promets !
- Pourquoi je te ferais du mal ? Je n’ai aucune raison.
- Promets-le, Aubin ! >>

Le garçon supplie du regard. Aubin cède :
<< - Promis, juré, sur ma propre tête, jamais je ne te ferai de mal, Mikael.
- Alors j’suis tout à toi. Vas-y, dis-moi c’qu’y faut que j’fasse pour qu’tu sois content.
- Laisse-toi aller, détends-toi, c’est tout ce que je désire. >>

Les bouches se retrouvent. Les bassins se rejoignent autorisant les sexes à se deviner, à s’évaluer. Les mains entrent en action. Ballet des doigts agiles qui titillent çà et là. Les braguettes gonflent à l’excès. Leur ouverture provoque une brusque sortie de pénis parfaitement raides, gorgés de sang. Doucement, Aubin déshabille son amant tout en admirant chaque recoin de son corps. Pas mal foutu, le jeunot. Certes il n’est pas très développé musculairement. Qu’importe, il en est encore que plus touchant. Aubin le serre fort entre ses bras, entre ses cuisses, contre son ventre, mettant un peu plus de conviction dans la pelle qu’il lui roule goulument. Il se sépare du corps juvénile, l’instant de se dévêtir. Il voit une tête se pencher sur son bas ventre, sent des lèvres s’approprier son braquemart au diamètre imposant, à la longueur moyenne. La bouche engloutit le bâton de chair qu’elle caresse et taquine avec la langue. Le sucé s’allonge à son tour, se positionnant afin de donner la réplique. Lui aussi engloutit le long vit de son amant qui gémit sous le merveilleux supplice. En rythme, ils s’infligent une fellation des plus délectables. Une grande douceur prime dans l’échange des plaisirs. Aubin éprouve le besoin impérieux de s’offrir. Avec gentillesse, il impose son nouveau jeu en s’asseyant sur le vit roidi, après l’avoir revêtu d’une capote, introduisant la longue tige dans son anus. Mikael, un moment surpris, renâcle un brin : peur de ne pas être à la hauteur pour cette première. L’autre le tranquillise lui promettant que tout se passera bien. La montée de la sève aidant, le jeune enculeur ne bronche plus, trop occupé à faire connaissance avec les sensations nouvelles. Les gémissements s’amplifient pour devenir cris de jouissance alors que certains jets de sperme inondent le préservatif tandis que d’autres maculent les corps. Ebloui par l’événement, Mikael éprouve beaucoup de mal à reprendre la réalité du moment. Il bredouille son émerveillement :
<< - J’sais pas quoi t’dire. J’avais jamais fait ça comme ça, avant. C’est autre chose qu’avec Modeste ! T’es doux, tu t’occupes bien d’moi. J’sais plus c’que j’dis... Vas-y, mets-la moi, c’est à ton tour. J’te l’dois. Mais fais vite, va falloir que j’rentre sinon mes parents vont s’faire un sang d’encre. >>

Aubin accentue son sourire, clos le monologue par une pelle passionnée puis laisse entendre que les ébats en resteront là pour cette nuit :
<< - La prochaine fois, promis. On se fait un gros câlin avant que tu partes, c’est tout. >>

De nouveau, les bites se dressent. Malgré la résolution de remettre à plus tard, le couple se laisse entraîner vers une seconde joute. Heureux de satisfaire son amant, Aubin le pénètre tendrement après l’avoir longuement sucé. Il pistonne de plus en plus vite ce jeune anus généreusement offert. Soucieux d’arriver à la jouissance en même temps que lui, Mikael se masturbe au rythme identique à celui des poussées de reins. Opération réussie. Des cris, des spasmes, signalent l’explosion des sens. Quelques minutes deviennent nécessaires afin de calmer les respirations, d’échanger des caresses, des baisers. Avec douceur, Aubin essuie Mikael tout en lui prodiguant certaines papouilles. Celui-ci se rhabille enfin. Avant de partir, il décrète :
<< - J’regrette pas. J’suis même heureux. Mais j’tiens pas à m’attacher à toi. T’es un dangereux. Ça s’sent ! Tu niques trop bien pour qu’ça soye sincère. Mais j’te livrerai quand même. On s’la donnera plus, c’est tout. >>

Mikael s’en va, sans un au-revoir, sans un bisou, laissant un Aubin pantois.


À suivre …


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