Fait Main 5

Pierre fait un cauchemar dans lequel Aloïs fait croire à Marie que son mari n’est peut-être pas fidèle. Elle veut se venger et Aloïs en profite. Le cauchemar continue.

Et ce sexe épais d’Aloïs s’introduit en elle, force le passage étroit. Le bélier ébranle le portail de l’ultime bastion, élargit ses parois, frotte durement le conduit . Il la malmène à allure folle, passionnée, sans ménagement, sans précaution, la colle violemment à la carrosserie. La matraque la martèle avec une fougue exaspérée par une trop longue attente. Le sexe fou entre et sort, son gland large va et vient dans le clapotis de son vagin humide. Instrument de leur plaisir, le taraud écorche ses chairs, coulisse comme une bielle en course endiablée. Le pieu dur la pistonne, la bite d’amarrage à tête énorme la cloue sur la tôle.

Oui, la queue, le serpent tentateur, oui, le lance-flamme redoutable peut exploser en elle, cracher son feu, la remplir de ses sécrétions abondantes contenues depuis, elle n’en sait rien, elle s’en fout, elle se fait foutre. C’est trop bon. Que ce sexe la laboure encore et encore et l’ensemence, la féconde, l’engrosse: ça apprendra à son mari à l’abandonner, à l’envoyer promener. Elle râle :
- Vas-y, baise-moi. Baise-moi plus fort, fais moi jouir, je veux jouir, plus fort, baise, baise… baise
Elle vient, elle part, elle décolle, elle plane, elle jouit, elle hurle sa jouissance. Il libère les vannes, vide en elle des mois de désirs insatisfaits et recolle ses lèvres à la bouche qu’il faut faire taire pour éviter un attroupement de mâles en folie.

Et moi, le mari spectateur impuissant, paralysé, stupide témoin de ma déchéance, cocu terrassé, j’essaie de crier mais aucun son ne veut sortir de ma gorge: j’assiste à mon cocufiage, je crève sans pouvoir réagir, je me débats, je rue sur place, je vois, j’entends, je crève d’avoir favorisé cette catastrophe, d’avoir sacrifié mon amour à ma vanité, ou d’avoir joué perdant avant le début de la partie.

Marie me secoue, me parle, m’arrache à mon terrible rêve :

- Chéri, tu as fait un mauvais rêve. Réveille-toi, reprends-toi. Mon Dieu tu transpires, tu es trempé de sueur. Calme-toi, ta petite femme est là. Je t’aime. Mais qu’est-ce qui t’arrive, tu ne vas pas faire un malaise maintenant.

J’ai repris mes esprits. Il serait indigne de moi de faire un malaise pour retenir ma femme. Elle veut partir à l’aventure, qu’elle y aille, qu’elle fasse son expérience. Qui sait elle en reviendra peut-être. Meurtrie, baisée a mort, toujours menteuse. Est-ce que j’ai des raisons de souhaiter repartir pour des années de tromperies mesquines, de secrets d’alcôves dissimulés, de rencontres cachées avec un coureur de jupons immature, de verres d’alcool partagés en souvenir de sa première expérience avortée. Je ne veux pas passer ma vie à épier, à pister une infidèle. Suis-je déjà cocu ou le serai-je dimanche et pendant quinze jours et pourquoi pas après? Puisqu’il faut y passer, peu importe le jour, l’heure et la durée.

Mon rêve de mariage heureux à vie a été torpillé, touché-coulé. Je ferme les yeux et aussitôt je vois le visage aimé, adoré, chéri, la source de mes joies et de mon bonheur, ma raison de vivre, le si beau visage de Marie dégoulinant de foutre étranger, aveuglé de coulées laiteuses et gluantes : il y en a partout, il colle dans les cheveux, bouche les oreilles, ferme les paupières, s’étale aux commissures des lèvres, déborde sur le menton, en suspension avec menace de chute sur les seins éclaboussés, fait tas dans les fossettes, obstrue une narine qui fait des bulles. C’est horrible, c’est affreux. La caresse d’une main sur mon front est si douce, si douce, si dou…ce.

Marie a ouvert le volet, le soleil envahit la chambre, le réveil marque dix heures, le samedi s’annonce radieux.
- Pierre, lève-toi, j’ai des courses à faire, tu vas garder Daniel. Debout paresseux. Ça va mieux ? Tu m’as vraiment fait peur cette nuit. Tu vas me mettre en retard.


Il faut qu’elle prépare son départ; elle doit faire sa valise et donc se fournir en ambre solaire et autres accessoires pour que l‘autre la fourbisse, la fasse reluire. Elle est fébrile à l’approche du voyage: l’aventure la galvanise, lui donne des ailes. Elle ne pense plus qu’à son envol, la reine des abeilles va quitter sa ruche avec ce gros bourdon nommé Aloïs collé au train. Ils pourront s’envoyer en l’air enfin.

- N’oublie pas une crème anti-moustiques pour protéger Daniel.

Elle sourit, ne dit mot.

- Mais où sont les sacs poubelles, les roses et tout le fourbi?

- Le camion de ramassage a tout emporté, tôt ce matin.

- Qu’est-ce qui t’a pris? Que va penser ton cher ami Aloïs? Tu n’aurais pas dû, ça va gâcher vos vacances.

- Aloïs? Nos vacances? De quoi parles-tu? Ce matin je suis allée raconter à mon père la vérité sur Aloïs, tout ce que tu aurais pu lui raconter hier soir, que ton amour pour moi t’a empêché de dénoncer. Il a eu du mal à me croire, puisque tu ne t’étais pas plaint. Non seulement tu ne verras plus Aloïs dans cette demeure ou dans notre jardin, mais il lui arriverait malheur s’il risquait le bout de son nez dans les parages.

- Mais pourquoi ?

- Tu es remonté de chez mon, père, tu as bouleversé tous mes plans, voulu m’expédier à l’aventure avec ce névrosé d’Aloïs, me pousser à l’adultère. Pour épargner la chèvre et le chou, j’ai obtenu de mon père une demi mesure parce que je ne voulais payer qu’à moitié prix. J’avais commis une nouvelle bévue. Ma demi vérité signifiait à tes yeux, je l’ai compris, mon désir de conserver secrètement Aloïs. Mon demi mensonge avait complètement anéanti ta confiance en moi déjà déclinante. Affligé, désespéré tu as joué le mari magnanime, l’époux archi cool, l’esprit ouvert, le libéral permissif. Tu as voulu me soumettre à la tentation, nier ton amour trahi. Mais le masque est tombé, ta vraie nature s’est manifestée toute la nuit: tu as geint, bredouillé, tremblé, tu m’as appelée, tu t’es débattu comme un diable dans un bénitier, tu as crié: «  Marie je t’aime.
 »

Tu as fait d’affreux cauchemars. Je crois que je pourrais te les raconter et que j’en rougirais de honte. C’est fini. Moi aussi j’ai fait un mauvais rêve: tu retrouvais cette Lydie Perez, ton premier amour, Elle t’envoûtait, elle se livrait à toi, vous faisiez l’amour comme des bêtes sous mes yeux… Tu m’as épousée, pour ta punition, je m’accroche à toi, parce que je t’aime. Que l’autre aille au diable. Reprends vite des forces, j’ai envie de toi. Ce sera ta pénitence.

- Que tu es belle. Mais tu aurais pu en discuter avec moi. J’ai compris que c’est moi ton amour. Mais as-tu si peu confiance en toi-même pour penser que tu serais en danger d’adultère si tu parcourais cent cinquante kilomètres dans la voiture d’Aloïs et si tu demeurais deux semaines dans le même village que lui. Je suppose que ce n’est pas un garçon violent. Crois-tu qu’il te prendrait de force ?

- Je n’ai jamais craint qu’il me brutalise pour parvenir à ses fins. Il est costaud mais sait se tenir, malgré son penchant pour moi, ou à cause de cette attirance: il ne veut pas gâcher ses chances, le pauvre.

- Tu affirmes par ailleurs que tu n’es pas amoureuse de lui. As-tu peur de toi-même? Crains-tu d’être tentée de te jeter sur lui, parce que tu seras quinze jours sans ton mari ?

- Bien sûr que non. J’aime faire l’amour avec toi. Je ne suis pas nymphomane. Et même si Aloïs avait la fantaisie de se faire pressant, je saurais le remettre en place.

- Tu aurais pu partir demain avec lui. J’étais d’accord. Tu es sure de toi. Où est l’obstacle ?

- Quand j’ai vu dans quel état tu te mettais cette nuit, j’ai eu peur de te rendre malheureux. Je ne veux pas te retrouver à l’asile à mon retour. Donc je reste, nous irons là-bas en août.

- Ma chérie, je voulais te faire une surprise. Tu m’obliges à dévoiler un plan que j’ai bâti depuis le mois de janvier. Tu n’as jamais vu la mer. J’ai donc réservé un appartement en bord de mer en Charente-Maritime, j’ai déjà payé des arrhes et me voilà dans l’embarras.


- Ciel, qui a agi en douce, cette fois, sans me consulter ? Je reconnais que j’aurais apprécié cette surprise. Que faire?

Mon beau-père m’appelle. Je descends, laissant Marie à ses questions.

- Pierre, les éboueurs sont en grève, tu devrais rentrer tes poubelles et tes sacs. Reviens me voir après.

Je mets les sacs à la cave et retourne chez Joe.

- Alors comment ça va? Je vais aller au foyer et avoir une conversation avec mon ex copain. Tu savais?

- Oui, Marie m’avait averti. Mais je ne suis pas certain qu’il faille faire un scandale pour une tentative ratée. Marie a la tête sur les épaules, je lui fais confiance.

Et j’expose mon plan de vacances à mon beau-père. Mon calme le rassure, il finit par m’approuver. L’incident est clos, il n’aura pas de suites. Je peux reprendre ma conversation avec ma douce moitié.

- Que voulait mon père?

- Je l’ai calmé. Il ne s’en prendra pas à son copain pour une vieille histoire sans conséquences. Comme moi, il pense que si tu es sure de tes sentiments, il n’y a rien à craindre d’Aloïs. Il a commis une erreur de jeunesse; il faut savoir pardonner. Quant à ses dérapages récents, nous partageons l’avis qu’il suffira d’une mise au point entre toi et lui, dimanche, pour savoir si tu peux l’accompagner ou non. Qu’en dis-tu?


- Tu ne me reprocheras pas de t’abandonner aussi longtemps? Tu me jures que tu ne te tourmenteras pas? J’ai tellement envie de voir la mer. Merci mon amour de me faire confiance; tu es un mari sensationnel.

Cette nuit fut merveilleuse

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