Confidences 1 - Vestiaires 2/3

Confidences – Misa / 10-2012
2/3 - Deuxième soir

— Salut ! Vous allez bien ? Vous m’attendiez ? Pour la suite ? C’est tout ? Pas pour le plaisir de me voir ? Ben tant pis … j’espérais que ma présence suffirait … Mais vous êtes plus nombreux, non ?
— …
— La suite ? Eh, je vais pas tout reprendre du début, on en finirait jamais !
— …
— Vous avez tout mis par écrit ? Ben … qu’ils lisent , alors ! Vous avez appelé ça comment ? « Confidences, premier soir » ? Je vais me chercher un verre, en attendant !

— Ça y est ? Je peux y aller ? J’en étais où ? Ah oui ! la salle de sport …Eh! je suppose que tu vas appeler ça « Deuxième soir » ? Ouais ? T’as raison, pas la peine de se casser la tête …

« La salle de sport, j’y reviendrai plus tard, pleins de choses à vous dire là-dessus. D’abord, faut que je vous dise que depuis la dernière fois, j’ai retrouvé d’anciennes connaissances.
Un soir, il y a quelques jours, en rentrant du boulot, j’ai croisé Hervé et Sandra. Ils étaient souvent invités à la maison au début où j’avais emménagé avec Frédéric.
On a pris un verre. Ils n’ont pas été très surpris d’apprendre que Fred et moi n’étions plus ensemble.

On s’était perdus de vue à cause d’une histoire bête.
A l’époque, je connaissais bien Sandra. Pas son mec. J’étais d’ailleurs surprise de la voir avec un garçon. Bon, tout le monde change. On s’était retrouvées au club de tennis, à Vincennes, pas loin de l’hippodrome, où on jouait Frédéric et moi. Sandra, c’est une ex d’Eva, du temps où on était étudiantes. Je vous en toucherai deux mots plus tard.
Donc à l’époque, invitations, soirées, parties de tennis en double. Un soir, chez eux, une soirée bien arrosée, on avait joué au poker. Poker « entre adultes consentants ». Jeu de cons. Fallait vraiment que je sois barrée pour jouer à ça ! Je m’étais assez vite retrouvée en petite tenue à devoir embrasser l’un ou l’autre, et embrasser, j’aime pas trop.


C’était pas trop mon truc, mais je vous ai dit, j’avais un peu bu.
A propos, un conseil ! N’essayez pas de me saouler ! Au début je suis amoureuse, après je pleure. Je sais, c’est chiant !
Les garçons avaient trouvé très amusant que Sandra me tripote quand elle aussi avait tout perdu. Je sais plus si elle avait fait exprès ou pas. Elle est capable. C’était pas vraiment une première, nous deux.
A la fac, Nancy, Marie-Lise, Sandrine, Eva et moi, on a fait quelques conneries. Je vous ai déjà parlé d’elles, non ?
Bon … Frédéric n’avait pas du tout aimé qu’on y prenne autant de plaisir toutes les deux. Jaloux, le monsieur ! Moi, j’avoue que je me souviens plus bien.
Les invitations s’étaient espacées, puis s’étaient arrêtées. Ses copains à lui jouaient au bridge, pas au poker, moins drôle. Lui, il trouvait ça mieux.

Bref , ça faisait un bail qu’on s’était pas vus ! On a pris un verre et ils m’ont invitée à dîner chez eux un samedi soir. En me quittant à la sortie du café, en me faisant la bise, Sandra m’a demandé si j’avais fait des progrès au poker ! Elle riait. Et sa main serrait ma taille de petites pressions des doigts.
Du coup, je savais plus trop si je devais y aller ou pas. J’avais trois jours pour y penser.

Faut que je vous parle un peu de ces copines …
Sandra, à la fac, ne faisait pas vraiment partie de notre groupe. Les deux dernières années, on avait pris un appart en coloc. Cinq nanas et trois chambres. On se débrouillait quand une de nous ramenait quelqu’un, mais on limitait les intrusions. Sauf Eva. Elle, elle ne se gênait pas pour ramener ses conquêtes et squatter la chambre seule. C’est comme ça que Sandra a passé un trimestre chez nous. Eva ne sortait qu’avec des nanas, Sandrine Nancy et moi avec des mecs, qu’on évitait le plus souvent de ramener à l’appart. Marie-Lise sortait jamais avec personne.
Ceux qui sont venus pour une nuit ou deux ne tenaient pas vraiment à rester ou à revenir.
Se faire chambrer par cinq filles qui se promènent en petite tenue toute la soirée et le matin, ça leur plaisait bien au début, et puis ça finissait par les mettre mal à l’aise, ça les décourageaient de s’incruster! Faut dire qu’on n’était pas tendres ! Surtout Eva. Et en plus, elle, c’est carrément à poil qu’elle se baladait.
Elle a dû changer, comme nous toutes, mais c’était un sacré canon, à l’époque !
C’était pas seulement quand on recevait le copain de l’une ou l’autre, c’était tout le temps, été comme hiver, à peine arrivée à l’appart, elle se déshabillait. Et quand elle ramenait une copine, elle se gênait pas pour la peloter devant nous. Certaines se sauvaient très vite, Sandra, elle, est restée. Pas dérangée pour deux sous qu’Eva la tripote devant nous. Nous, on faisait plus attention.
Difficile de se fâcher avec Eva, on lui pardonnait tout. Elle nous attirait toutes dans son lit de temps en temps. On s’est même retrouvées parfois à plusieurs en même temps dans le même lit. Par jeu.
Ça vous choque ? Parce que je dis que c’était un jeu ? Non ? Ah, ça va alors ! Sinon avec tout ce que je vous ai déjà raconté et la suite, vous avez pas fini !
Tenez, Marie-Lise par exemple, elle, de tout le temps qu’on a passé ensemble, elle n’est jamais sortie avec un garçon. On l’aurait su. Quand on faisait nos soirées filles, elle était là, bien sûr, et certains soirs elle appréciait qu’on l’embrasse et ne repoussait pas toujours les mains d’Eva qui lui caressait les seins.
Mais ça s’arrêtait là. Elle n’acceptait rien d’autres de nous et se tenait à l’écart.
Par contre elle se caressait. Elle s’installait un peu à l’écart, elle rougissait, fermait les yeux, mais elle se caressait devant nous sans pudeur. Fallait pas la toucher, c’est tout. Bizarre, non ? Tant qu’à prendre son pied, autant que ça vienne de quelqu’un d’autre, vous croyez pas ?
Attention, je vous dis pas que la masturbation c’est nul ! J’aime bien moi aussi.
Mais si il y a quelqu’un avec moi qui sache me donner du plaisir, j’aime autant. Pas elle. Elle préférait toute seule.
Quand j’ai réussi à la joindre, il y a quelques semaines, elle pouponnait. Elle a donc trouvé quelqu’un qui a su l’apprivoiser. Elle devait se garder intacte pour lui.
Euh, non ! pas intacte ! Le garçon qui lui a fait un gamin était sûrement le premier à la sauter, mais elle s’était explosé l’hymen depuis longtemps ! C’est la première fille, et même la seule à vrai dire, que j’ai vue se rentrer la main entière dans le vagin !

J’en étais où ? Ah oui Sandra … c’est à cause d’elle que j’ai dévié sur mes anciennes copines.
Elle s’était vite habituée à nos habitudes de vie. On l’avait un peu bizutée, comme tous ceux et celles qui envahissaient notre espace, mais elle l’avait bien pris. Je me souviens que très peu de temps après son arrivée, c’est Eva qui lui avait dit « Ici, on partage tout, même nos chattes, alors fait pas ta mijaurée ! ». Drôle de fille Eva. Belle comme un cœur, des manières de camionneur, et un langage de charretier.

Moi aussi ? Je suis grossière, je suis crue ? Les deux ? Je suis comme ça ! Faut vous y faire !

N’allez pas croire que c’était « open bar » tous les jours. Là, je condense. N’oubliez pas, on a passé deux ans en coloc, vacances en prime ! Mais c’est vrai que c’était souvent décontracté et parfois assez chaud. Pourtant on était trois à ne sortir qu’avec des garçons. Mais entre nous, ça dérapait un peu ! Gentiment !
Tout ça pour vous dire que la soirée « poker » qui avait défrisé Frédéric, mon ex, n’était pas une nouveauté pour Sandra et moi.

Mais de là à savoir si j’avais envie d’aller dîner chez eux un soir … je savais pas trop !

C’est le lendemain où je l’ai rencontrée avec son copain que Christelle m’a fait son sketch.
Vous vous souvenez de Christelle ? Mais si ! La fille de la compta de ma boîte qui m’a entraînée à son club de gym ! ça y est ?
Elle a la quarantaine.
Deux gosses. Comptable. Moi je travaille au service contentieux, alors on se croisait. On se voyait souvent, mais sans plus, on discutait pendant les pauses.
On se voit beaucoup plus depuis qu’on va à la gym ensemble. Sympa, bonne vivante, dynamique. Et puis quand t’es quasiment à poil deux fois par semaine à côté de quelqu’un, ça crée des liens ! Par exemple, quand elle me dit qu’elle aimerait bien avoir un cul comme le mien, elle sait de quoi elle parle ! C’est con, mais ça me rassure ! J’ai beau rester en petite culotte dans les vestiaires, mes dentelles cachent pas grand-chose.
Moi son cul, j’en veux pas ! Les grossesses, sans doute ! Elle est mince de torse, avec des seins plutôt petits, un ventre plat, mais les hanches ! Disons … généreuses ! Pour ça que très lâchement, j’étais contente d’avoir un casier à côté du sien la première fois où je suis allée au club.
C’est méchant ? On est toutes pareilles, non ? On préfère paraître à notre avantage ! A côté d’elle, je faisais mince, ça m’arrangeait.
Et donc ce soir-là, après la séance, enveloppées dans nos draps de bains, on attendait qu’une douche se libère. Il y a douze cabines, mais on est une vingtaine de filles à transpirer en musique. Un peu juste. Et franchement, il y en a qui nt à rester des plombes à se laver. En rigolant, Christelle m’a demandé si je voulais prendre ma douche avec Ninon, qui attendait juste devant nous.
J’avais pas beaucoup parlé de ces choses jusque-là avec elle. Et puis bêtement à midi, en déjeunant, je lui avais parlé de Sandra et de la partie de poker.
Ça devait lui trotter dans la tête.
J’avoue que moi aussi. Déjà dans la salle, Ninon était juste devant moi. J’avais eu ses fesses sous le nez pendant une demi-heure et maintenant j’étais derrière elle à attendre mon tour pour la douche, à regarder le petit pli de sa culotte qui lui rentrait entre les fesses. Elle, elle s’était pas enroulée dans sa serviette. Elle était en culotte et seins nus, sa serviette sur l’épaule, son gel douche dans une main et son change dans l’autre.
Jamais de la vie je l’aurais draguée ou quoi que soit. Ça me serait pas venu à l’idée. On avait plaisanté sur un détail étonnant qui réveillait la libido des « musclées », mais sans plus, je vous jure !
Vous voyez plus de quoi je parle ? Mais si, Ninon ! La petite jeune-fille toute mince qui a un clito qui déforme ses culottes ! Oui ? ça y est ?
Christelle, c’est pas une discrète. Elle avait parlé trop fort. Ninon s’est retournée en fronçant les sourcils. J’ai dû rougir. Elle a rougi aussi et s’est détournée avec un petit sourire timide. Moi, j’avais rougi parce que j’étais un peu honteuse du manque de discrétion de Christelle. Et elle ? Pourquoi elle avait rougi et m’avait souri ?
Christelle était hilare. Pas gênée du tout, elle ! Elle a même insisté quand est arrivé le tour de Ninon et qu’une cabine s’est libérée. « T’y vas, ou pas ? ».
Je l’aurais giflée ! Tout ça parce que je lui avais raconté une partie de poker qui avait dérapé !
Et la petite Ninon ! Toute gênée elle aussi, qui m’interrogeait du regard ! Un peu paniquée ! J’ai dit le premier truc qui me passait par la tête, et c’était une connerie ! Je m’en suis aperçue tout de suite, mais trop tard !
« Une autre fois, merci ». Elle a haussé les épaules : « Comme vous voulez ».
ǒaurait pu être narquois, ironique. Elle aurait pu balancer sa réplique comme « Va te faire foutre ». Ben non ! Oh, c’était pas encourageant non plus, ni résigné ou un truc que j’aurais pu prendre pour un « Dommage ». C’était juste … gentil ! Ouais ! Et je vous dis pas la tête de Christelle ! Bouche bée ! Pas longtemps. Quand elle a repris ses esprits, une douche se libérait. Elle m’a poussée dans le dos et m’a suivie dans la cabine de douche. « Tu te rends compte ? Elle aurait accepté ! ».
C’était aussi l’impression que j’avais eue. Mais ce qui m’interrogeait dans l’instant, c’était de savoir ce que Christelle foutait dans ma douche !
Elle s’en est rendue compte aussi et a violemment rougi en me voyant la regarder les poings sur les hanches. « T’as un truc spécial à me montrer, toi aussi ? ». Elle était toute gênée, brusquement. Alors je lui ai tourné le dos pour enlever ma culotte, j’ai accroché ma serviette et appuyé sur le bouton de la douche.
Non, c’est pas ce jour-là qu’elle m’a dit qu’elle aimerait avoir un cul comme le mien! Pourtant, cette fois, plus de dentelle ! Elle l’avait vraiment sous les yeux !
Pendant qu’elle se savonnait, moi aussi je l’ai vue entièrement nue. Plus avec ses culottes de nylon de couleur indéfinissable et ses soutifs moitié vides. Eh ben figurez-vous qu’elle fait partie de ses nanas qui gagnent à être nues. Vous avez jamais vues des filles comme ça à la plage ? Peut-être parce que mal fagotées, ou une forme de corps mal souligné par les fringues, qui semblent toujours mal tomber. Et puis nues, au naturel, tout d’un coup, tout va bien ! Christelle, elle est comme ça !
Non ? Jamais ? Vous faites pas les plages naturistes, peut-être … Je vous assure, vous voyez des fois une chouette nana sur la plage, vraiment bien, et puis vous la croisez le soir en jean’s et ça le fait plus !
Bon, je peux pas non plus conseiller à Christelle de se balader à poil ! Au bureau, c’est pas une bonne idée ! Mais là, sous la douche, je le lui ai dit. « T’es pas mal, finalement ». Je m’essuyais en riant et en la regardant.
Elle, pas de clito impressionnant, mais un joli sexe. Marrant comme un sexe de fille peut être joli ou triste. Le sien est beau, de belles lèvres, joufflues, presque. Vous voyez ce que je veux dire ? Bien dessinées, épaisses. Joufflues, c’est le mot ! Bien découpées. Et bien visibles. « T’as pas fini le boulot ? ». Un triangle de poils très courts. Qu’elle avait dû raser une ou deux semaines avant et puis oublier en l’état.

Vous vous rasez, vous ? Quoi ? C’est indiscret ? Au point où on en est ! Vous pouvez bien me dire !
Non, moi, jamais ! Je coupe un peu, bien sûr, pour faire propre, mais complètement, j’ai jamais fait. Déjà que ça me gratte quand je me fais le maillot, j’imagine même pas ! Et puis moi, quand je me rase sur les côtés j’ai des poils qui repoussent sous la peau et ça fait des boutons rouges. Pas vous ? Ah ! Toi aussi, tu vois !

Christelle était un peu embêtée que je la regarde en détail, les yeux sur son ventre. Elle a attendu de s’être essuyée et d’avoir enfilé les dessous de rechange qu’elle avait amené. « C’est vrai que t’as déjà fait avec une fille ? ». Elle me regardait pas. « C’est bien ? ». J’ai pas répondu sur le coup. Je crois que c’était pas le moment.
Il y a des questions qui prennent un sens différent selon le moment où on les pose. Les mots sont les mêmes, mais la situation change tout. En fait, c’est pas seulement les mots qui comptent. C’est la manière de demander. Le lieu. Le regard, l’expression, le ton de voix. Qui changent pas la question. Pas vraiment. Mais lui donnent du poids. Une autre valeur. Une autre charge.
Alors faut faire gaffe à ce qu’on répond.
Moi j’ai choisi de pas répondre. Peut-être que la réponse était de la prendre dans mes bras, et peut-être pas.
J’ai fini de me sécher les cheveux et on est sorties de la cabine.

Un truc bête. Le lendemain en arrivant au bureau, elle me tournait le dos. J’ai posé mon bras sur ses épaules. Elle s’est retournée et je lui ai fait une bise sur la joue. Eh bien, à ce moment-là, j’ai su que j’avais eu raison de rien dire. Parce qu’on était bien toutes les deux. En phase. En confiance. Amies.
Je sais, et elle sait aussi, que si l’occasion se représente, il y aura peut-être des gestes entre nous, peut-être, que ça sera naturel, et que quoi qu’il se passe, on sera amies encore après.
Ces petits moments-là, c’est vraiment super, non ?
Avec un mec, c’est différent. Difficile d’échapper à la charge érotique.

Et je savais toujours pas si j’irais chez Hervé et Sandra le samedi soir.

Je ne me souviens plus si c’est ce soir-là ou le lendemain que j’ai trouvé un mot de Frédéric glissé entre la porte et le montant de porte, à hauteur de la sonnette. Il avait sans doute griffonné son message appuyé sur la porte. Le stylo marquant le papier sans déposer d’encre sur certaines lettres. D’une écriture nerveuse. Message improvisé. Comme agacé de ne pas me trouver au nid.
Il disait « …serait bien qu’on se vois … je repasserais demain …».
Son truc, c’est les chiffres, pas l’orthographe. Et moi j’ai un petit esprit mesquin. En rentrant, j’ai pris un feutre rouge pour souligner les fautes avant de coincer son billet sur la porte du frigo avec un aimant.
C’est un peu con, je sais, mais je faisais ça les derniers temps. Exprès pour l’emmerder. Efficace. C’est qu’il était fier, le monsieur. La vengeance de la bonniche.
Le voir ? Mais pourquoi ? Il disait pas ce qu’il me voulait. Me voir, c’est vague. J’avais pas trop envie.
J’y pensais en rentrant chez moi le lendemain. Failli l’éviter sciemment en traînant. Failli m’attabler chez le traiteur chinois au lieu de ramener mes petits plats chez moi. Juste failli. Je suis rentrée.
Il m’attendait dans sa voiture, garé devant l’entrée de l’immeuble.

Sa voiture. Qu’est-ce qu’il a pu me gaver avec sa bagnole ! Dès le début, il avait choisi ce qu’il voulait acheter. Mais non ! Il a fait tous les concessionnaires du coin. Il essayait, négociait. Me prenait à témoin. Moi je m’en foutais de sa bagnole ! J’ai pas le permis ! L’ancienne me convenait très bien. Pendant deux mois, c’était son seul sujet de conversation. Il parlait en mots codés ! Kilowatts et mètre-Newton, cent mètres départ arrêté, puissance à bas régime.
Un peu pour me foutre de lui, un peu parce que ça m’intéressait aussi, moi, je voulais savoir si on était bien assis dedans et de quelle couleur elle serait, où on rangeait le jeton pour le caddy.
Eh bien sûr, il avait acheté le coupé Audi noir. Celui qu’il avait choisi dès le début. Tout fier de lui. Même quand il s’est aperçu qu’on pouvait pas mettre nos deux sacs de tennis dans le coffre !

Le tennis, on n’y jouait plus depuis un an. Il s’était fait une mauvaise entorse et on n’avait pas renouvelé notre abonnement. Dommage, j’aimais bien. Encore un truc que j’ai abandonné à cause de lui. Je m’y remettrai un de ces jours. Pourquoi pas avec Sandra d’ailleurs ? Elle était meilleure que moi, elle 15/2 et moi 15/4, mais je l’accrochais bien quand on était en fac. Elle m’a dit quand on s’est vues qu’elle rejouait quelques tournois. Moi, je retrouve la forme avec la gym. Je savais pas encore si j’irais à leur soirée, mais j’avais envie de l’appeler pour jouer au tennis.

Oui ! J’en étais à Fréderic … Je lui ai fait signe de la tête, sans m’approcher et sans l’attendre pour rentrer dans l’immeuble. Pas envie de l’embrasser. Il était derrière moi quand j’ai ouvert la porte de l’appart et m’a suivi dans la cuisine.
YES ! Il a vu son mot raturé de rouge sur le frigo ! Il l’a détaché et l’a mis dans la poubelle avec un air excédé.
Il savait pas trop quoi dire … J’allais bien ? Très bien. Pas de soucis ? Aucun, tout va bien.
Attendez, j’allais pas lui dire que j’avais pleuré pendant deux jours ni que je ne savais pas très bien quoi faire de ma vie ! Oh ! Qu’est-ce qu’il attendait ? J’aurais dû lui dire que je m‘étais fait sauter par le coup du siècle, que je m’éclatais à prendre des douches à poil avec une collègue de bureau, que j’allais peut-être jouer au poker samedi avec Sandra et son copain ?
Il secouait la tête avec une petite moue en regardant mes nouveaux meubles, tâtait de la main les tentures de soie que j’avais posé aux murs du salon, redressait une pile de magazines sur la petite table du salon.
Il m’a regardée en s’approchant de la bouteille de scotch posée sur la desserte. De l’entrée de la pièce, je lui ai fait signe que non.
Eh ben vous savez pas ? J’ai jamais su pourquoi il était venu ! Enfin, j’ai bien une petite idée ! Mais son petit sourire niais quand il était rentré avait disparu à la vue du papier sur le frigo, et sa tentative avortée de s’attabler en sirotant mon scotch a refroidi ses ardeurs.
Moi, j’avais eu peur de ressentir un petit pincement à le revoir. On a quand même vécu deux ans ensemble ! Mais rien ! Juste de l’agacement à le voir se dandiner autour de la table du salon avec un petit air pincé.
Et j’ai surtout pas lancé la conversation ! Muette !
« Bien, bien, bien … ». Je cite de mémoire. Du Frédéric in the text !
Il a hoché une ou deux fois de la tête. Il pensait à quoi ? Je m’en foutais, et il a décidé assez vite de mettre les voiles. « Je vois que tout va bien … je vais te laisser … ». Il s’est un tout petit plus raidi quand j’ai juste dit « Bonne idée ! ».
Deux ans avec lui . Trois mois après lui. Et je compterais plus jamais le temps comme ça !
Pitoyable ? Un peu. Un peu quand même.

J’avais un coup de blues.
J’ai appelé Sandra pour lui demander si on pouvait trouver un créneau pour jouer au tennis et pour lui dire que, désolée pour samedi, mais j’avais autre chose de prévu.
J’ai failli appeler José. Failli seulement. C’était pas une bonne idée.
J’ai pris un bain, je me suis épilé les jambes, je me suis rasée dans les aines et le haut des cuisses, je me suis fait un masque, et j’ai mangé froid les trucs chinois que j’avais acheté en rentrant.
Croyez-moi sur parole, le chinois, froid, c’est pas le top !

J’ai joué au tennis avec Sandra le vendredi soir, en nocturne. Pas terrible. Le tennis, c’est pas comme le vélo ! Faut du temps pour s’y remettre ! Et comme elle insistait, je suis allée chez eux le lendemain.
J’ai pas de constance. Je sais.

Un petit pantalon, un chemisier, mon blouson de cuir. Soft. On était trois couples. Elle m’avait rien dit, mais elle avait invité un copain à eux pour que je me sente pas déplacée. Elle aurait pu choisir moins collant et moins con. Elle a vu au cours de la soirée que ça marchait pas fort et m’a dit qu’au débotté, elle avait pas trouvé mieux.
Je discutais sur la terrasse avec Hervé en buvant du Champagne quand les autres sont venus dire au revoir.
« T’as le temps, fini ton verre », qu’il était en train de remplir.
Bon, après les papouilles de Sandra quand elle m’avait ramené chez moi la veille en rentrant du tennis, j’avais bien imaginé un truc de ce genre !
J’étais pas obligée de venir et je pouvais partir. Je suis restée. D’ailleurs, plutôt sympa sur ce coup-là, Sandra m’a posé la question franchement. Elle était assise sur l’accoudoir de mon fauteuil. J’ai posé la joue contre son bras. Plutôt sympa aussi, Hervé s’est esquivé. Après, après … C’était bien.
Sandra, c’est pas une nana à fioritures. Hervé avait à peine tourné les talons qu’elle avait déjà les mains sur mes seins. Et c’est pas uniquement pour lui faire plaisir que j’ai mis ma main dans sa culotte. J’en avais envie.
Hervé était couché quand on l’a rejoint et avait éteint la lumière. Dans le noir, c’est bien aussi. J’ai bien aimé.

Au ptit-déj, y avait des chaussons aux pommes et des pains au chocolat. On a traîné un peu et Sandra m’a ramenée chez moi avant midi. Je regrette pas. Pas de fausse note. J’ai pris mon pied. Eux aussi. Bonne soirée.
Vous aimez pas l’amour-copains, vous ? Moi oui. Plus simple. Bon, ok, un peu de fièvre et de passion, c’est bon aussi. Il y a un temps pour tout. »

— Ça vous ennuie pas si on s’arrête pour ce soir ? Moi, ça m’arrangerait, je me lève tôt demain.
— …
— Le week-end ? Il y a deux semaines, pourquoi ?
— …
— Oh oui, vous en faites pas, j’ai encore de petites choses à vous raconter !
Si vous avez le temps, bien sûr ! On se retrouvera bien un de ces soirs !Tu vas l’écrire, ça aussi ? Je pourrais lire ? T’arrange un peu, quand même, parce que c’est un peu décousu … non ? Rien ? C’est quoi ton nom ? Misa, bon ! eh bien bonsoir à tous, et bonsoir Misa ! A la prochaine, bye !

Comme après notre première rencontre, je me suis mise au travail dès mon retour chez moi, tant que je gardais frais en mémoire et son rythme et ses mots.

(à suivre)

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