Lulu 6

LULU 5 6

Partir huit jours, pour un stage de formation artistique ou un stage de perfectionnement en coiffure, ce n’était pas te quitter pour une éternité. Tu saurais te passer de moi pendant cette courte absence. Le mensonge sur la nature du stage était sans conséquences, il m’évitait d’avoir à dévoiler la fameuse surprise que je te préparais. Je reviendrais vite et je pourrais reprendre en mieux le spectacle à la lune bleue. Cette fois tu serais mon invité à la table d’honneur. Richard me le promettait. Ce qui m’ennuyait c’était la conduite de Richard avec moi le samedi à la maison; une fois de plus je m’étais laissé surprendre par un excès d’euphorie et le champagne; je devrais m’abstenir de boire de l’alcool pour réussir à me faire respecter. Richard me persuada que c’était un accident et jura qu’il ne se reproduirait plus :

- Tu sais, je me sens fautif, pardonne cet écart. Et puis tu étais si belle que j’ai failli à mes obligations de patron. Fais moi confiance, j’ai trop d’estime pour toi pour me permettre de recommencer. Mais de toute ma vie jamais je n’avais connu un plaisir aussi fort et un bonheur aussi grand. Tu es merveilleuse dans tout ce que tu fais.

Forte de ses excuses assorties de compliments , je suivis Richard. Voyage en train dans le confort de première classe, passage par le wagon restaurant et son bar : mon patron m’en mit plein la vue. Par contre en quittant la gare de l’est il suggéra de marcher afin de nous dégourdir les jambes. Par la rue du faubourg saint Denis, puis la porte du même nom et une rue saint Denis bien longue Richard m’a fait visiter un certain nombre d’établissements surprenants que je découvris avec stupéfaction. D’une étroite cabine à entrée payante on avait vue sur des spectacles à caractère sexuel. Ici deux femmes se livraient à des jeux osés. Ailleurs un couple faisait l’amour . Richard me montrait le bas de l’échelle d’artistes déclassés

- Voilà où il ne faut pas tomber.

Mais « aux Folies Bergères »ou demain « Au Moulin Rouge », « Au Crazy horse » ou « Au Lido » « Au Paradis latin » etc… tu verras de véritables artistes de renommée mondiale, ce que tu dois viser., car tu en as l’étoffe. Nous visiterons les coulisses et assisterons aux spectacles.

Le maître investit pour moi dans une robe de soirée « très chic ». Le soir , au Moulin, nous nous sommes retrouvés à table avec son très cher ami Pablo accompagné d’une belle allemande également promise au plus bel avenir. J’ouvrais des yeux émerveillés, je bu très modérément. Je me couchais ais follement heureuse

Mon bonheur fut de courte durée. Richard appelé par téléphone dut rentrer sans tarder pour régler un problème important à La lune bleue. A regret il me confia immédiatement à Pablo, devenu mon nouvel employeur par le contrat dont l’encre n’était pas sèche. Je signai sans lire, tant ces gens m’impressionnaient. Je n’avais pas à m’inquiéter, mon nouveau maître serait comme un père pour moi.

Un père ueux, puisque la porte fermée sur les talons de Richard, Pablo décida de tester mes bonnes dispositions. Aidé d’Ingrid il me remit au lit. A deux ils m’échauffèrent. Je ne voulais pas déplaire et participais de mon mieux. Pour montrer mes talents de comédienne, devant eux je dus me masturber selon leurs indications, à genoux, assise ou couchée, un index devant, l’autre sur la rose, ou des deux mains à la fois sur et dans le sexe. Gênée comme jamais.

Devant deux témoins je luttais contre ma honte. Eux se réjouissaient de me voir tourmenter mon clitoris, remuer mes doigts dans ma chatte et écoutaient mes soupirs, le halètement accéléré par la montée en température. Et l’orgasme grondait au bout de mes doigts énervés par la lenteur du phénomène. J’aurais aimé exploser vite et en avoir terminé. Je trempais mon index dans ma salive et grattais les zones érogènes, m’acharnais à titiller le bouton qui gardait l’entrée. Pour m’aider Pablo se mit à me sucer les tétons.


Sa participation balaya les scrupules qui bloquaient l’éclosion de ma jouissance. Je me sentais moins coupable parce que ce n’était plus le plaisir solitaire devant des spectateurs. Ensuite j’eus un mal incroyable à parvenir à l’orgasme avec mon vibromasseur et Ingrid dut m’apprendre à l’utiliser. Je ne voyais pas le lien entre cette démonstration et mon art d’effeuilleuse. Pablo vint au devant de mes interrogations muettes. J’étais selon lui une fort jolie créature, je devais être une femme complète, capable de tout faire, avec naturel, rien ne devait limiter mon talent.

Ingrid s’était allongée tête-bêche et s’occupait avec la bouche et les doigts à prolonger mon orgasme. Je lui rendais la politesse en fouillant les lèvres épaisses et congestionnées de sa chatte velue, j’apprenais vite et frottais d’un index vif le clitoris majuscule dégagé par mon pouce et mon majeur. Nos ventres répondaient par de petits bonds à l’excitation, notre mouille facilita les contacts. Je sentis la présence de Pablo dans mon dos. Ingrid tira des mains sur mes fesses. Je n’eus pas le temps de refuser, le gland de l’homme frappait à ma petite porte et s’enfonça dans mon cul en m’arrachant un cri de douleur qui fit rire l’allemande.

J’étais prise en sandwich entre elle et Pablo qui en position haute savourait le plaisir d’avoir le passage étroit. Et il se mit en mouvement. Je subissais les derniers outrages dans un désarroi augmenté par la souffrance. J’avais le feu au cul au sens propre. La brute forçait, roulait, pestait qu’il m’élargirait le sens interdit et y aménagerait une confortable salle de réception. Heureusement je ne souffrais pas d’hémorroïdes! Mais j’avais mal. Il me consola en déversant sa liqueur séminale en guise de baume réparateur. Au propre et au figuré, j’en avais plein le cul.

Satisfait le nouveau patron nous invita à nous reposer. Il reviendrait nous chercher vers quinze heures pour nous conduire sur le théâtre d’opérations.
La discussion fut lente et difficile avec Ingrid. Elle aussi était nouvelle, elle aussi rêvait d’être une vedette de cabaret, elle avait passé les mêmes épreuves que moi avec 24 heures d’avance. C’était une mise à l’épreuve pénible, mais comme moi elle s’était soumise aux consignes avec l’espoir de voir sa candidature retenue. Elle me demanda de lire son contrat et de lui en expliquer le contenu. Il ressemblait au mien.

Je n’en avais pas reçu de copie, il suffisait d’attendre. Curieusement il n’y était question ni du lieu, ni du nombre d’heures, ni du salaire. C’était un engagement d’un an à sens unique, en qualité d’artiste polyvalente au service de la S.S.V. (société de spectacles de variétés) gérée par monsieur Pablo Suarez. La S.S.V. se réservait le droit de licencier le personnel mais omettait de laisser une possibilité de démission. Lavée, rafraîchie, je m’étonnais et souhaitais avoir signé un contrat plus précis. Je voulais connaître mes cachets, la dénomination exacte de mon emploi et mes différents droits de salariée.

Dans la voiture qui nous conduisait au cabaret j’en parlais à Pablo. Très protecteur il chassa mes doutes. D’ailleurs je pouvais si je le voulais prendre le train du soir et retourner chez moi si je ne lui faisais pas confiance. Venue avec Richard, tous frais payés pour un séjour d’une semaine, je n’avais pas de quoi me payer le billet de retour. Pablo nous fit descendre devant un cabaret, nous le fit visiter: il était en pleins travaux de rénovation et nous devrions attendre deux mois avant la réouverture. Je cherchais en vain un panneau mentionnant la S.S.V. Tout était commandé.

Plus loin il prit une place de stationnement et nous fit marcher. Je connaissais cette rue, j’y étais passée avec Richard la veille. Nous entrâmes dans le jeep-show où les deux filles tournaient hier. Le spectacle attendait des artistes en retard. Pablo nous conduisit dans une loge et nous proposa de tenter un essai au pied levé, pour dépanner le propriétaire.
En deux mots il nous expliqua notre rôle: Sur le lit tournant nous faisions connaissance, nous nous dévêtions, nous nous caressions; nous reproduisions le plus lentement possible la scène de lesbiennes vécue dans son appartement.

Faire durer, jouer la comédie, jouir ou faire semblant, émettre des sons vrais ou pas pour donner l’illusion de la jouissance. C’était à notre portée, il n’en doutait pas. Une lumière s’éteignait pour signaler la présence de spectateurs derrière les judas. Nous pouvions suspendre nos ébats quand toutes les lampes brillaient. Pour nous décider, il nous remit un beau billet.

Déçue mais rassurée par la coupure, j’acceptai le dépannage. Ingrid, certainement aussi fauchée que moi n’eut pas plus le choix. Au rythme des lumières qui s’éteignaient ou se rallumaient nous avons gagné les applaudissements de notre employeur et du maître des lieux. En attendant la réouverture du cabaret, nous pourrions donner un spectacle quotidien et gagner chaque jour une coquette somme. Le soir nous pourrions également nous produire dans un établissement voisin mais dans des scènes hétéros, avec un ou deux artistes masculins. Nécessité faisant loi, pour passer le temps, pour louer une chambre de bonne dans le quartier et pour me nourrir je fis bonne figure. C’était un déclassement provisoire mais je ne voyais pas d’autre solution. Pablo avait les clés des chambres. A la porte de l’immeuble veillait innocemment un grand noir à l’air féroce. On nous recommanda de ne pas nous éloigner car le quartier n’était pas sûr.

A 20 heures nous avons débuté le spectacle dans l’autre peep. Ici le client était roi. En appuyant sur un bouton numéroté il demandait une fellation ou un cunnilingus, un accouplement simple ou une sodomie, un tableau avec un homme et deux femmes ou une scène avec deux hommes et une femme, une double vaginale, une double rectale ou une combinaison. Évidemment chaque bouton correspondait à un tarif affiché, selon une table de valeur préétablie en fonction du nombre de participants et de la durée de l’exécution. Le cachet me surprenait par sa générosité.

J’ai vite pris l’habitude de pratiquer les hommes de la maison. Ils fatiguaient plus vite, se relayaient plus souvent que les filles, nous les usions. Quand ils débandaient, cela se voyait, alors que personne ne se souciait de notre épuisement. Le règlement, respecté, imposait des mesures d’hygiène strictes, comme le port du préservatif. J’ai connu des blancs, des africains, des chinois, des grosses bites, des courtes épaisses, des longues un peu molles, de toutes les tailles, des sucrées ou d‘autres à la saveur âcre. Je me suis fait prendre toutes les ouvertures, j’ai appris à supporter la douleur, la fatigue. des accouplements répétés.
Mais ma cagnotte se remplissait. Hélas, deux jours avant la fin du premier mois, on a cambriolé ma chambre, volé mes économies et je me suis trouvée dans l’impossibilité de payer mon premier loyer! Un collègue de travail voulut bien garder mon pécule. Il disparut avant la fin du deuxième mois, me laissant couverte de dettes. Pablo calma le jeu, m’avança de quoi vivre et payer. Les travaux du cabaret avaient pris du retard, puis la SSV avait dû le revendre pour payer ses factures et je dus comme Ingrid prolonger ma collaboration dans les deux établissements qui nous faisaient la grâce de nous employer. Les candidates se bousculaient au portillon et il fallait avoir l’échine souple pour continuer à travailler.

Au bout de trois mois, dettes enfin remboursées, je me suis retrouvée aussi démunie qu’au premier jour. C’était désespérant. A la première occasion je déserterais et retournerais au salon de coiffure. Mes reins étaient douloureux, je ne prenais plus aucun plaisir à simuler d’impossibles orgasmes, je trouvais mon activité dégradante, j’en avais marre. Tous les jours passer des heures à mignoter une chagatte, sans cesse recommencer à pousser trois phalanges dans la mouille du vagin d’Ingrid ou à la sodomiser avec un godemiché, puis subir à mon tour les mêmes intrusions dans mon corps, cela devenait monotone et ennuyeux à la longue.

Nous changions d’établissement et il fallait indéfiniment répéter les gestes de l’amour avec un partenaire, puis avec un autre. Sans amour, sans autre sentiment que la pitié, nous trompions le touriste sexuel en simulant un état de béatitude. Parfois un remplaçant ou une remplaçante éveillait un peu de curiosité: les vagins ou les bites sont tous différents, comme les visages. La nouveauté apportait du piment dans une activité devenue banale et lassante. Seuls les gogos dans les cabines y trouvaient de l’intérêt.

Sans armes ni bagages j’achetais enfin un billet de train. Qui m’accueillerait, qui voudrait encore de moi? Je voulais fuir, retrouver ma liberté. Sur le quai, une grosse main s’abattit sur ma nuque. C’était le gardien de l’immeuble, le grand noir à l’air féroce. Inutile de lui résister, il me tenait fermement et me ramena au bercail, non dans ma chambre mais dans une cave qu’éclairait une lumière blafarde où il m’enferma en me disant que je pouvais crier, personne ne m’entendrait. Vers le soir quatre hommes arrivèrent avec Pablo. Sans interrogatoire, j’ai été condamnée, couchée sur la planche qui devait me servir de lit et prise brutalement sous les yeux de Pablo impassible.

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