Clotaire Et Pierre - Onzième Épisode

Encore troublé par l’annonce de Clotaire qui venait de lui annoncer son prochain départ pour Rouen, Pierre s’était réfugié, depuis plusieurs jours déjà, dans le silence. Mais ce qui le surprenait un peu, c’est que son compagnon ne semblait pas s’en offusquer, comme si tout cela, au fond, lui était indifférent. Cette « pause », même si elle n’était pas franchement désirée par l’un ou par l’autre, avait au moins un mérite pour Pierre : il pouvait pleinement se consacrer à ses révisions pour les partiels, qui s’annonçaient ardus.

Résolument décidé à faire de son mieux, Pierre y mettait du sien pour la révision de ses cours, aussi indigestes soient-ils pour certains d’entre eux. Droit administratif, introduction au droit constitutionnel, droit des affaires, sciences politiques… Parmi ces cours, le jeune homme trouvait parfois son bonheur mais, toutefois, n’était pas loin de se tirer les cheveux tant le contenu pouvait être d’une confusion totale. Découragé en cet après-midi plutôt ensoleillé – chose rare en ce début d’année – Pierre décidait d’ouvrir la fenêtre avant de s’allonger sur son canapé pour aller à la rencontre de Morphée le temps d’une sieste. Épuisé, il n’allait se réveiller que bien plus tard, en début de soirée, perturbé par un vent très frais qui l’incitait, en ouvrant les yeux, à découvrir la ville couverte par un ciel très obscur toutefois contrarié par la clarté émise par les lampadaires de rue et les lumières émanant des immeubles d’habitation ou de bureaux.

Avant de dormir, quelques heures avant le début de cette série d’examens qui ne s’annonçait pas de tout repos, l’étudiant prenait soin de lire quelque pages du Traité de l’approche thématique du droit : de l’introduction au développement de la matière, un ouvrage du professeur René Montagny-Gibert dont le titre prévenait déjà les étudiants et autres lecteurs de l’aspect très technique du contenu. En réalité, si Pierre s’était lancé dans pareille lecture, c’est davantage parce que ses professeurs lui ont vivement recommandé de le faire que parce qu’il s’agissait de sa décision personnelle… Neuf pages lues : cet effort – le mot n’est pas excessif puisque leur contenu n’est pas ce qu’il y a de plus intelligible pour tout un chacun – accompli, il éteignit la lumière, s’endormant paisiblement pour quelques heures, presque heureux de pouvoir savourer la chaleur bienvenue de son épaisse couette qui couvrait son corps en partie dénudée et barré d’un boxer noir qu’il avait enfilé pour la nuit.



Le lendemain matin, dans les couloirs de la fac, c’était branle-bas de combat : tous les étudiants paraissaient tendus, nerveux… Du moins ceux qui étaient présents : pas mal d’étudiants manquaient à l’appel. Parmi eux, quelques amis de Pierre qui, lassés d’obtenir mauvaises notes sur mauvaises notes, avaient déjà fichu le camp sans même prendre la peine d’attendre la fin du semestre. La tare de l’enseignement supérieur à la française : quelques passionnées, pas mal de motivés, beaucoup de lassés…

Respectant à la lettre les consignes posées par les enseignants observateurs, les étudiants présents prenaient place dans l’amphi dans le calme mais pas ment dans le silence, laissant entre eux une place vacante pour prévenir, au moins en apparence, les risques les plus immédiats de tricherie entre bons camarades… En jetant un coup d’œil au loin vers le bas de l’amphithéâtre, Pierre remarquait qu’il était observé par Clotaire, la tête tournée, qui lui adressa finalement un petit sourire encourageant. N’ayant pas réagi sur le coup, Pierre baissa la tête et constatait que le professeur avait déjà distribué les feuilles blanches, les feuilles de brouillon, roses de couleur, et l’intitulé du sujet. A la lecture de celui-ci, très nombreux furent les étudiants qui lâchèrent un soupir sincère, qui devait traduire la défaite, la déception voire la déception des étudiants qui partaient vaincus d’avance à défaut d’avoir convenablement révisé. En ôtant son regard de l’intitulé, Pierre constatait que Clotaire était déjà lancé à corps perdu dans sa rédaction ; comme d’habitude, malgré le fait qu’il soit assis, il se tenait bien droit, la tête haute, l’attitude finalement propre à un étudiant plein de sang-froid capable de disserter pendant des heures en couchant sur le papier tout ce qui pouvait lui passer par la tête sans trahir le moindre signe de stress ou de tension quelconque. C’est aussi pour cela qu’il suscitait l’admiration de Pierre (et de tant d’autres parmi leurs camarades de promo, par ailleurs) : ce mec était l’incarnation parfaite, presque caricaturale sur les bords, de l’étudiant convoité par tant de professeurs d’université…

L’épreuve devait durer trois heures mais ce n’est pas exagéré de relever que pas moins de la moitié des étudiants présents en amphi s’étaient levés au bout d’une heure pour rendre leurs copies (plus ou moins remplies) aux enseignants chargés de veiller à la régularité de l’épreuve.
Pierre refusait de succomber à la tentation d’en faire autant, car il voulait réellement produire un travail sérieux et correct, même si cela n’allait pas de soi, finalement. La tension était à son comble car pour beaucoup, trois heures d’épreuve peuvent paraître suffisantes pour un étudiants ; dans les faits, trois heures pouvaient sembler excessives pour certains, rudimentaires pour les autres…

Finalement, Pierre s’était résolu à attendre la fin de l’épreuve pour rendre ses copies : trois feuilles doubles entièrement rédigées sous la forme d’une rédaction… Rendu des copies, puis signature de l’acte de présence et c’en était fini de cette première épreuve il est vrai éprouvante aussi bien dans la forme que dans le fond.

En se retournant après avoir honoré les formalités pour quitter la salle, Pierre tomba nez à nez face à Clotaire qui e put s’empêcher de lui adresser un sourire des plus provocants… Le jeune homme s’efforça de détourner le regard mais à sa grande surprise, son interlocuteur lui prit la main pour l’attirer vers l’extérieur, faisant vraisemblablement peu cas du regard des autres s’ils venaient à remarquer ce contact manuel… En silence, et après s’être lâché la main, tous les deux se dirigeaient en quelques minutes vers une petite cafétéria très appréciée des étudiants en première année pour le calme et l’apaisement qui semblaient y prendre place.

En se dirigeant vers une petite table inoccupée et placée dans une zone délaissée par les autres étudiants qui se trouvaient de l’autre côté de la grande salle, les deux hommes prirent place, avant que Clotaire ne brisa la glace à sa manière :

- Tu veux boire quelque chose ?
- Je n’ai pas très envie de…
- Mec, fais un p’tit effort ! Tu es partant pour un chocolat, un café… ?
- Va pour un Coca, plutôt…
- Cela marche !

En deux minutes, Clotaire réapparut avec deux Coca, un pour lui, l’autre pour son compagnon qui ne se sentait pas très à l’aise.
Une fois encore, Clotaire, qui souhaitait se montrer prévenant, rompit le silence :

- Alors… Comment cela s’est passé, ce premier partiel ?
- Tu me poses la question sérieusement ?, répliqua Pierre, le regard effronté.
- Tu peux me dire pour quelle raison je te demanderais cela si je n’en avais rien à faire ?, lâcha Clotaire sur un ton devenu plus froid, presque glacial qui lui était en fait assez courant.
- Eh bien, puisque tu me le demandes… Je n’en sais trop rien… Franchement, je ne suis pas très optimiste… Ni pessimiste, non plus.
- Cela te donne des raisons d’être confiant, finit par sourire Clotaire. J’ai remarqué que tu es resté jusqu’au bout des trois heures… Cela veut dire que tu avais pas mal de choses à dire !
- En trois heures, j’ai pu composer… Ou dormir !, ironisa Pierre
- Tu ne dormirais jamais sans moi, se voulait taquin Clotaire, en souriant toujours.
- Avant de te rencontrer, j’y suis parvenu, j’ai de bonnes raisons de croire que cela continuera, répondit calmement mais assez sèchement son ami.

A ce moment-là, Clotaire fixa son compagnon d’un regard perçant, noir, laissant transparaître son agacement. En buvant en vitesse quelques gorgées de la canette de Coca qu’il reposa vivement sur la table, il se rapprocha de lui pour soutenir son regard avec encore un peu plus d’intensité.

- Écoute, cela ne peut pas continuer ainsi !, lâcha Clotaire
- C’est l’annonce de notre séparation que tu me fais là, répondit Pierre soudainement inquiet.
- Non… Mais j’en ai ras-le-bol de cette situation car je ne t’ai pas pris en traître.
- Tu m’as annoncé ton départ pour Rouen, je te rappelle…
- Et alors ? Tu le reconnais toi-même : je t’en ai fait part. C’est déjà pas mal, non ?
- Pourquoi tu pars ? Tu veux me fuir ?
- Tu n’es vraiment qu’un imbécile…
- J’apprécie tes marques d’affection à mon endroit…
- Ferme-là !
- Pardon ?
- Tu m’as fort bien compris ! Si je te demande de la fermer, c’est parce que j’en ai marre de t’entendre dire des conneries !
- Je peux me barrer, ce sera plus simple…
- Bien sûr… Une belle manière d’échapper à la confrontation ? Laisse-moi simplement te dire que si je t’ai proposé de me suivre à Rouen, ce n’est pas parce que je me sens coupable vis-à-vis de toi.
J’ai fait des choix que j’assume et que je ne cherche pas à amoindrir. Si je t’ai proposé de me suivre, c’est parce que je veux t’avoir à mes côtés.
- Aller à Rouen ne me dit trop rien… Je ne tiens pas particulièrement à partir m’enterrer là-bas…
- Et après, ce sont tes potes qui me taxent de snobisme…
- Qu’est-ce que ça veut dire ?
- Tu le sais parfaitement ! Rouen, ce n’est pas un patelin paumé en pleine cambrousse ! Cesse de te comporter comme ses bobos qui pensent que les frontières du monde ne s’étendent pas au-delà de Paris… Si ce n’est pas trop te demander, bien sûr.
- Je ne vois pas pourquoi on s’est lancé dans cette conversation, toi et moi…

Alors que Pierre s’était levé, il sentit une force lourde s’emparer de son poignet et, levant le regard vers Clotaire, s’aperçut que celui-ci présentait un visage glacial, presque saisissant.

- Maintenant, tu vas m’écouter une fois pour toutes…
- Lâche-moi, tu me fais mal…
- Je vais te donner un ultimatum, même si ce n’était pas ma volonté : je te laisse une semaine pour te reprendre. J’ignore si tu veux venir avec moi là-bas même si j’en ai très envie. Du moins, j’en avais très envie… Mais je ne vais pas me mette à genou pour chercher à convaincre un mec qui, visiblement, a toutes les peines du monde à comprendre que je tiens à lui. Je t’invite à grandir un peu : c’est ce que tu attendais de moi après que tu aies balancé à tes potes que nous étions ensemble…
- Tu es encore bloqué là-dessus ?
- Laisse-moi finir, je te prie ! Je veux faire tous les efforts possibles pour te prouver que je tiens à toi et c’est pour cela que je te propose de venir avec moi. Si tu ne veux pas, parce que tu veux rester ici, avec tes amis, je comprendrais… Mais je pense qu’en te faisant cette proposition, j’ai fait la preuve de mon attachement à ton égard. On peut commencer quelque chose de bien sérieux tous les deux mais cela ne dépend pas que de ma seule volonté. A toi de te sentir concerné ; pour ma part, j’ai fait ce que j’avais à faire.

Sur ces mots, le geste imposant, sans lancer un regard à Pierre, Clotaire prit sa sacoche et son Coca (qu’il avait à peine entamé), laissant là son interlocuteur encore ébahi par la déclaration du jeune homme. Il était décidément perdu : bien sûr, il était profondément touché par ce discours et la sincérité qu’il dégageait mais, en même temps, il se sentait presque « oppressé », quasiment pris en otage par son compagnon : moi ou rien ; c’est ce qui semblait sortir de cet ultimatum (un mot qui a été, après tout, lâché par Clotaire lui-même…).

Dans l’après-midi, songeur, Pierre avait regagné son immeuble pour se retrouver seul chez lui, dans l’espoir de méditer un peu, s’extraire à toutes les pensées négatives qui pouvaient le tarauder. Il était tenaillé par un doute immense : le suivre ou pas ? Couché sur son canapé-lit, il se redressa pour commencer à réfléchir à la question quand il entendit quelqu’un frapper à la porte.

Quelle ne fut pas sa surprise quand, en l’ouvrant, il tomba sur monsieur Ridez Major, son voisin (et accessoirement professeur d’espagnol).

- Bonsoir, jeune homme ! Je viens de rentrer d’une journée d’examens à surveiller et, sur le chemin, je me demandais si mon nouveau voisin pouvait accepter de prendre un verre chez moi, pour l’apéritif. Ce sera quelque chose de simple bien sûr, mais cela pourrait nous inciter à faire connaissance…

Si monsieur Ridez Major était espagnol de naissance et que cela se devinait du fait de son léger accent, il parlait un français réellement impeccable, comme s’il s’agissait de sa propre langue maternelle.

- Eh bien… Je dois vous avouer…
- Je sais, je suis votre professeur et vous êtes l’un de mes étudiants, mais vous savez, la fac, ce n’est pas comme le collège ou le lycée… Et puis, rassurez-vous : je n’ai pas l’intention de vous noter comme si vous passiez un examen !
- Bon… Vers 20 heures, cela vous irait ?
- Cela sera parfait, jeune homme !
- OK… Eh bien, à ce soir !
- A ce soir…
- Au fait, monsieur… Je dois amener quelque chose à boire ?
- Ne vous en faites pas, il y aura ce qu’il faut, je pense ! Ce ne sera pas un bar mais cela devrait suffire !
- D’accord, merci.

Alors qu’il paraissait terne, Pierre était cette fois-ci presque euphorique. Il lui tardait de faire réellement connaissance avec son professeur et voisin… Certes, il ne voyait monsieur Ridez Major qu’une fois par semaine, pour deux langues rendues obligatoires par le programme universitaire, mais il était tellement beau et dégageait tellement de prestance que trop forte était la tentation d’en savoir plus sur son compte. Entendons-nous bien… Il n’était certes pas en train de tomber amoureux de cet enseignant, mais il ne pouvait nier lui-même qu’il était admiratif de son charisme et de son aura. Un aura qu’il allait voir de près durant cet apéritif…

De son côté, Clotaire était rentré chez lui, frustré de l’attitude de son ami. Bien sûr, une fois la porte de son grand appartement fermée, il ne s’était pas effondré en larmes (pas du tout le genre du garçon !) mais comme il lui arrivait de le faire dans ces cas-là, il s’assit sur le canapé, fixant de ses yeux noirs intenses le mur qui lui faisait face et tapota nerveusement ses genoux de ses doigts fins. D’un geste d’un seul, il ôta son tee-shirt gris pour se diriger vers la salle de bains afin de prendre une bonne douche, cela avant de bûcher la dernière épreuve qui devait avoir lieu le lendemain. A peine l’eau commençait-elle à couler que la sonnerie retentit ; furieux d’être dérangé en pareilles circonstances, le jeune homme s’empressa d’enrouler une serviette fine autour de sa taille afin d’ouvrir la porte.

En ouvrant la porte, il vit Cédric, vêtu tel un chic type, chemise blanche sous veste noire et sur pantalon clair, petit sourire complice aux lèvres accru par la vue de Clotaire en tenue si légère…

- Salut… Que me veux-tu ?, demanda sobrement Clotaire, les mains flanquées sur ses cotes.
- Rien de spécial… Je passais dans le coin, je me suis dit que si tu étais là, on pourrait…
- Non, pas de plan cul ! Je n’avais pas envie il y a quelques mois et je n’ai pas changé d’avis ! répliqua vivement le locataire des lieux.
- Bien que ce ne soit certes pas l’envie qui m’en manque – bien au contraire ! – j’avais juste en tête de papoter avec toi autour d’un verre pour faire le point sur nos partiels. Mais comme tu ne sembles pas d’humeur accueillante…

Alors que Cédric, l’air navré, allait rebrousser chemin, Clotaire s’empressa de l’attr par la main pour le retenir, ce qui troubla un instant les deux jeunes hommes.

- Je… Je te prie de m’excuser, mec… Je suis sur les nerfs en ce moment, c’est assez compliqué, s’excusa Clotaire.
- A cause des partiels ?, demanda son interlocuteur.
- Non, je n’ai rien à dire là-dessus… En fait… Entre, je vais t’expliquer.

Sans se faire prier, Cédric entra dans l’appartement, posa ses affaires de manière posée et suivit son hôte jusqu’au salon. Clotaire, après avoir apporté deux jus d’abricot, lui racontait les derniers événements : son départ prochain pour Rouen, l’hystérie de Pierre qui s’en est suivie, sa fatigue soudaine et réelle après tous ces examens… Il en avait clairement sa claque et Cédric, tout en sirotant sa boisson, paraissait attentif à son récit. Les deux jeunes hommes discutaient de tout cela depuis un peu plus d’une heure. Et Clotaire, un peu décontenancé par les derniers événements, tenait à demander conseil à Cédric (ce qui ne voulait pas dire, pensait-il alors, qu’il allait le suivre)…

- Tu sais tout… Libre à toi de me dire ce que tu en penses.
- Franchement ?
- Oui, puisque je te le demande.
- Il ne te mérite pas…
- Ne dis pas ça…
- Tu m’as demandé d’être franc, je le suis ! Ce mec ne te mérite pas ! Un type comme toi, je le suivrai n’importe où pourvu qu’il me le demande. Je ne le comprends pas ton mec. Qu’est-ce qu’il retient ici ? Il faut être imbécile pour renoncer à toi par orgueil…
- De toute façon, ne le prends pas mal, mais je ne vois pas pourquoi tu me dis ça… Après tout, tu n’es pas amoureux de moi…
- Non… Très attiré sexuellement, ce n’est déjà pas mal, reconnais-le !

Les deux jeunes hommes rirent de concert, avant de se regarder tous les deux les yeux dans les yeux, le tout dans un silence qui devenait de plus en plus lourd de sous-entendus.

- Tu as peut-être raison… Je pensais qu’il était attaché à moi.
- Peut-être qu’il l’est, peut-être qu’il ne l’est pas…
- Mais j’avais envie de croire que…
- On a tous envie de croire au grand amour mais entre y croire et le vivre, il peut y avoir un fossé très large !
- Depuis quand uses-tu de métaphores ? Cela te va bien…
- Restons sérieux… Tu l’aimes ?
- Oui… Enfin, je crois…
- Tu l’aimes ou non ? Cela ne peut pas être « peut-être bien que oui, peut-être bien que non » …
- Je ne sais plus où j’en suis…
- Et lui ? Il t’aime ?
- Je le croyais… Mais depuis la proposition, je n’en suis plus très sûr…
- Alors… ?
- Alors, quoi ?
- Tu sais ce qui te reste à faire, maintenant.

Sans plus attendre, Cédric colla ses lèvres contre celles de Clotaire qui, cette fois-ci, ne prenait pas la peine de le repousser ou de le résister. Alors que Cédric lui caressait les cheveux puis les joues, Clotaire restait immobile, comme s’il voulait se laisser faire sans se rendre coupable de quelque dérapage… Tout juste pouvait-il accepter le terme de « complicité ». Et alors que Cédric commençait à lui enlever la serviette, il suffisait d’un geste pour que Clotaire mette un terme à ce baiser.

- Je savais que tu allais en profiter…
- Tu en as mis du temps à me repousser !
- Je ne suis pas dans mon état normal, je suis fatigué et blasé…
- Je peux encore trouver le moyen de te détendre, même si dans le cas présent, ce serait plus une façon de parler, ironisait Cédric en faisant référence à la bosse que dissimulait avec peine la serviette enrôlant la taille de Clotaire.
- J’apprécie la tentation que tu éprouves pour moi, c’est très flatteur mais ce n’est pas une bonne idée.
- La question n’est pas de savoir si c’est une bonne idée ; la question est de savoir si tu en as envie, et j’ai ma petite amie sur la question.
- Tu te trompes, je pense car si tu crois que j’en ai envie, ce n’est pas le cas…

Sur ces mots, Cédric ôta vivement la serviette de son ôte, désormais à poil devant lui. D’abord très surpris, Clotaire s’empressa de saisir un coussin posé à ses côtés pour dissimuler son sexe tout en érection mais Cédric lui envoyait en guise de réponse un sourire coquin du genre « Bas le coussin, je l’ai déjà vu de toute façon ! ». Sans se départir de son sourire grivois, Cédric s’approcha de nouveau vers Clotaire qui, tétanisé, ne semblait pas opposer la moindre résistance.

- Je n’ai pas envie de lui faire ça…
- Il n’en saura rien, je te le promets.
- Mais même… Je ne veux pas le trahir. Arrête, s’il-te-plaît…
- Quand je t’aurais sucé jusqu’à jouissance, tu te mordras les doigts de m’avoir demandé d’arrêter parce que tu aurais pu louper le plus beau coup de ta vie.

Cédric pouvait paraître prétentieux, mais il avait raison : c’était un très bon coup, déterminé, enthousiaste, capable de rendre dingue un mec résolu à le sauter. Tout cela, Clotaire le savait, d’où le mal de chien qu’il avait à résister. Plus il repoussait (bien que timidement) son partenaire, celui-ci s’impliquait davantage, comme si cette résistance le grisait plus que jamais. Pour résister, Clotaire pensait à Pierre et parvenait à soustraire ses lèvres de celles de Cédric. Mais la tentation était trop forte et au fond de lui-même, même s’il voulait que Pierre le suive, il était persuadé que leur romance était terminée à cause de la fermeté de son compagnon. Plusieurs questions tourmentaient son esprit mais Cédric sut en profiter pour l’embrasser à nouveau, de manière plus poussée. De nouveau repoussé par Pierre qui voulait se convaincre que ce qu’il allait faire était mal, Cédric, ne voulant pas perdre plus de temps, se posa de sorte à saisir la queue de Clotaire, complètement nu, pour la mettre en bouche. La fellation qu’il commençait à lui prodiguer s’avérait exquise alors qu’elle débutait à peine. L’effet procuré par les caresses octroyées par la bouche et la langue de Cédric laissaient Clotaire dans un état de quasi-sidération. La divine fellation de Cédric avait eu raison de l’entêtement de Clotaire, qui se laissait complètement faire, tête en arrière, bouche semi-ouverte, yeux fermés, profitant intensément de cette caresse buccale qui le stimulait au point de voir sa queue se durcir de plus en plus. Pour l’encourager, Clotaire avait posé sa main sur la tête de Cédric afin de le presser, pour le voir s’appliquer à sucer cette queue que Cédric convoitait depuis des mois, depuis cette fois durant laquelle tous les deux avaient réalisé leur premier – et jusque-là dernier – corps à corps. Évidemment, Cédric, sans discontinuer, regardait son partenaire prendre son pied avec délice : il rêvait de cet instant depuis fort longtemps… et rien, absolument rien, dans son esprit, ne pouvait l’interrompre.

Totalement perturbé par cette entrée en matière, Clotaire paraissait perdu dans ses pensées, complètement sonné et dépassé par ce qui venait de se produire. Conscient que tout pouvait s’arrêtait là alors qu’il ne le voulait pas, Cédric ne tarda pas à l’embrasser de manière franche, tel un amant fougueux n’attendant rien d’autre qu’un bon coït. Après ce baser, Clotaire, pour la première fois, fixa Cédric de ses yeux sombres ; tous les deux se regardèrent et se comprirent : sans s’échanger un seul mot, ils quittèrent le salon après que Cédric eut enlevé ses fringues, bien trop content de ce qui allait suivre…

Sans mot dire, Clotaire poussa fermement Cédric sur le lit de sa chambre pour s’imposer sur lui avant de l’embrasser avec énergie. Il s’y refusait jusqu’à présent, mais le désir était bien trop fort : il voulait s’envoyer en l’air avec cet amant décidément doué. Cédric, tout à sa merci, s’abandonnait volontiers à lui. Tous deux entamèrent un 69 qui allait les ravir : Clotaire, tout en prenant en bouche la queue de son partenaire, étouffait quelques gémissements stimulés par les divines fellations de Cédric, qui tenait à lui prouver sa motivation par le biais de délicates caresses buccales qui allaient rendre la queue de l’hôte des lieux, bien large et imposante, assez humide. Se saisissant d’un préservatif qui sommeillait dans sa table de nuit pendant que Cédric continuait à le sucer, Clotaire mit un terme aux préliminaires pour embrasser son partenaire à pleine bouche. Après cela, celui-ci ne put se contenir de sourire tel un gâté par une gourmandise.

- Ça fait longtemps que j’attends ce moment, mec !, avoua t-il.
- Tu vas voir… Ta patience sera bien récompensée… Je vais te défoncer jusqu’à te faire crier…, répondit Clotaire.
- J’aime bien quand tu me parles comme ça… Fais ce que tu veux de mon cul, il est tout à toi.
- Il va se souvenir de cette soirée, ton petit cul !

Sans plus attendre, le duo allait entamer un coït passionné. Positionné par-dessus Cédric pour un missionnaire, Clotaire, qui voulait contempler son amant prendre son pied, inséra sa queue dans le trou de Cédric qui lâchait un premier soupir expirant une légère douleur qui allait bientôt se commuer en plaisir brut. Entre deux coups de rein, Clotaire parcourait les lèvres de Cédric sans faiblir de son effort et ce dernier caressait son partenaire en mouvement sans quitter ses lèvres, désireux de voir ce moment prolongé sans cesse. Bientôt lassé, Clotaire lâcha un simple « Mets-moi maintenant à quatre pattes » pour que son amant d’un soir s’exécutât. Et sans attendre, Clotaire entama une nouvelle série de va-et-vient, cette fois bien plus énergique : il retrouvait son habit d’amant dominateur qui commençait à lui manquer depuis quelques temps. Parallèlement à ses coups de rein, il fessait, et plus d’une fois, son partenaire qui gémissait à tel point qu’il se sentait contraint de continuer ce rapport dominant/dominé. Les gémissements de Cédric n’étaient pas exagérés, tant la cadence de Clotaire était fougueuse ; il avait affaire à un étalon, et c’est précisément pour cette raison qu’il savourait chaque minute de ce corps-à-corps intense qui durait déjà depuis plusieurs minutes. Après avoir empoigné bien longtemps son partenaire qui devait supporter quelques fessées supplémentaires, Clotaire se retira pour enlever la capote et éjaculer sur le cul de Cédric, épuisé par ce corps-à-corps mais ravi de recueillir sur son fessier la précieuse semence du mec qu’il désirait, alors que lui-même allait éjaculer sur les draps de son amant, le tout dans un cri tout aussi singulier que fut celui de Clotaire, qui traduisait, aussi bien pour l’un que pour l’autre, la satisfaction délivrée par leur performance. Une fois la dernière goutte de sperme sortie de sa queue, Clotaire se poussa du lit puis invita son compagnon de jeu à prendre une douche.

- D’ac, mais tu viens la prendre avec moi, répondit Cédric d’un ton grivois franchement assumé.
- Ce n’est pas une bonne idée, je pense qu’il vaut mieux en rester là, répondit Clotaire presque gêné de la situation.

Sans autre mot dire, Cédric se dirigea vers la salle de bain pour prendre une bonne douche, qui allait durer plusieurs minutes ; bien sûr, le jeune homme aurait tellement désiré que Clotaire et lui puissent poursuivre les hostilités sous l’eau chaude, mais Cédric était conscient que Clotaire, l’euphorie de la baise passée, allait sans doute adopter l’attitude du mec désolé d’avoir trompé son homme. Cela n’allait pas manquer… Une fois la douche terminée, Cédric, encore nu, s’allongea brièvement, dans une position très suggestive sur le lit de Clotaire, songeur, l’air pensif et triste, qui se reprenait soudainement en voyant la scène.

- On remet ça, coquin ?, lança Cédric sur un ton proche du défi.
- Écoute, mec… C’était très sympa, j’ai beaucoup aimé, tu t’en es sûrement rendu compte, mais je préfère qu’on en reste là.
- Je me doutais que tu allais me dire ça…
- Ne m’en veux pas, mais… Je me déteste pour ce que j’ai fait.
- Tu ne penses pas que lui serait capable d’en faire autant ?
- Je ne le pense pas…
- Tu ne le penses pas… Mais tu n’en es pas sûr, apparemment !
- Écoute, je pense que tu as deviné que je me suis bien éclaté avec toi, et si je n’étais pas dans ma situation actuelle, je remettrai ça sans problème. Mais je me sens vraiment mal de l’avoir fait, tu peux le comprendre…
- C’est un peu facile de dire ça après, non ?
- Tu as raison, mais je devais le dire. Ne le prends pas mal : tu es un super coup, mais cela doit s’arrêter là. Aussi bien pour toi que pour moi.
- D’ac, pas de souci. Mais si l’envie devait te reprendre, tu sais où me trouver…
- Encore une chose…
- Oui ?
- Je peux te demander de garder tout ça secret ?
- Tu peux compter sur moi, personne n’en saura rien.
- Merci, Cédric. Vraiment.

Sur ces mots, les deux jeunes hommes, amants d’un soir, se séparèrent. En tournant le dos à la porte que Cédric venait de refermer, Clotaire fit quelques pas dans le salon, le regard perdu, la bouche fermée, la tête saisie d’un mal persistant, le cœur lourd. Pris d’un accès de colère, il cogna si fort son pied contre la table basse du salon que l’un des verres posés dessus tomba et se brisa en deux. Sans même y faire attention, le jeune homme s’allongea de manière lente sur le canapé, presque recroquevillé, et se mit à pleurer, dégoûté par sa propre attitude vis-à-vis de l’homme qu’il aimait. Il était dépassé par tous les événements écoulés dans la soirée : il aimait Pierre mais après avoir couché avec Cédric, il se mettait à douter : est-ce je l’aime réellement encore malgré ce qui s’est passé ? Ce genre de question devait l’envahir tout le reste de la soirée. Après avoir ramassé les débris de verre, il s’empressa de changer les draps de son lit, presque écœuré de savoir que Cédric et lui se sont envoyés en l’air quelques minutes plus tard dans ce lit encore frappé du sceau de leur coït.

De son côté, Pierre, à mille lieues de s’imaginer ce qui venait de se produire, se prépara pour l’apéritif que s’apprêtait à lui offrir son professeur et voisin…

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