Récits Érotiques De La Mythologie (8). Phèdre Ou Le Complexe De La Belle-Mère.

La mythologie grecque a fourni à la psychanalyse le cadre de nombre de ses « complexes » fondateurs.

On connait naturellement, à partir de l’analyse de Freud, le fameux complexe d’Œdipe et l’attrait du garçon pour sa mère.

Il y a son pendant féminin, qui a tant pesé pour mon hypersexualité, le complexe d’Electre.

Le complexe de Phèdre est moins connu et a priori moins sulfureux : il s’agit de l’attrait d’une femme pour son jeune beau-fils, symbolisé par les amours de Phèdre et d’Hippolyte.

Le mythe de Phèdre, son destin tragique, m’amènent à réfléchir sur mes choix de vie et confirment les choix que j’ai faits, parce que c’est ma nature, mais aussi parce qu’un être d’exception, Philippe m’y a encouragé : mon choix a été en faveur de la primauté du désir et du plaisir.

A nouveau, beaucoup se demanderont si ce texte a vraiment sa place sur HdS, en tant que « récit érotique».

Et bien j’ose affirmer que oui, au regard des sujets que soulève le destin tragique de Phèdre, en particulier le fait de pouvoir assumer ou pas ses désirs, même ceux qui heurtent les règles, comme le désir interdit d’une belle-mère pour son beau-fils. Certes, ce texte ne contient pas de mots susceptibles de déclencher. Il prétend seulement faire réfléchir aux ressorts de la passion et du désir.

Merci aux modérateurs de HdS de le publier et aux lecteurs qui auront la patience de le lire jusqu’au bout.

D’autres se diront que ça y est, la « nympho intello » (je récuse le terme « nympho » et ne me considère pas comme une « intello ») nous inflige encore un texte qui fait mal à la tête. Pour tenter de me faire pardonner, je promets de publier très rapidement un nouveau récit sur ma vie d’épouse hypersexuelle ! Je l’enverrai le jour même de la publication du présent texte. PROMIS§

Laissez-moi d’abord vous raconter le mythe de Phèdre et la place qu’il a occupée dans la mythologie, la littérature et la philosophie.



FILLE DE PASIPHAE ET EPOUSE DE THESEE

Phèdre est la fille du roi de Crète Minos et de Pasiphaé, dont nous avons parlé au sujet de ses amours interdits avec un taureau (Récits érotiques de la mythologie (7). « Pasiphaé et le mythe du taureau ou le bonheur d’être bien remplie »), qui avaient donné naissance à un monstre, le Minotaure, lequel fut tué par Thésée, avec la complicité d’Ariane, sœur de Phèdre.

Phèdre épouse Thésée, roi d'Athènes, qui, au retour de Crète, a abandonné sa sœur Ariane. Lors de sa venue en Crète pour le Minotaure, Thésée avait pourtant promis d'épouser Ariane, la fille aînée de Minos, mais il l'avait abandonnée sur l'île de Tzia.

RIVALE D’UNE AMAZONE

Selon les sources, ce mariage s’est fait avec l’accord de Minos, comme prix de sa réconciliation avec Thésée. On prêtait à Minos un grand nombre d'aventures amoureuses et l'invention de la pédérastie. Il aurait donc été l'amant de Thésée, se serait réconcilié avec lui après la mort du Minotaure et l'enlèvement d'Ariane, et lui aurait donc donné sa seconde fille, Phèdre, en mariage.

Selon d’autres sources, c'est Deucalion, son frère, qui donne Phèdre en mariage à Thésée, aux côtés duquel il a combattu les Amazones. Il lui aurait proposé la main de sa sœur cadette, Phèdre, sans doute pour resserrer les liens entre Athènes et la Crète.

D’autres évoquent enfin son enlèvement par Thésée, décidément très attiré par les filles de Minos et de Pasiphaé.


Thésée était déjà marié à l'Amazone Antiope, avec qui il a eu un fils, Hippolyte. Il existe certaines versions qui font état d'une attaque des Amazones lors du mariage de Thésée et de Phèdre. Si pour les uns, cette attaque est antérieure à la répudiation d'Antiope et visait à sauver cette dernière de Thésée, pour d'autres elle en est la cause directe. Ainsi, les Amazones, menées par Antiope, voulurent se venger en attaquant l'Attique, le jour du mariage. Antiope, alors qu'elle essayait d'entrer dans la salle du festin, fut arrêtée par les invités et tuée.


Phèdre a, avec Thésée, deux fils, Démophon et Acamas.

PHEDRE ET HIPPOLYTE

Hippolyte fut envoyé par son père à Trézène en Argolide pour revendiquer le trône de son aïeul Pitthé. Ce jeune homme, qui était un excellent chasseur, construisit un temple à la déesse Artémis, ce qui déplut à Aphrodite qui décida de le lui faire payer, d'autant plus qu'il voulait rester chaste (certains affirment même qu'il n'aimait pas les femmes).

Pallas, frère et prédécesseur d’Egée, avait de nombreux fils, les Pallantides. Neveux d'Egée et cousins de Thésée, les Pallantides crurent que le pouvoir leur reviendrait puisque Egée ne semblait pas avoir de descendants. Ils furent cruellement déçus lorsque Thésée fut reconnu par son père. A la mort d’Egée, ils revendiquèrent le trône mais les Athéniens leur préférèrent Thésée.

Alors ils l’attaquèrent ouvertement. Thésée, averti de leurs projets, déjoua leur embuscade et les anéantit tous, y compris Pallas. Pour se purifier de leur mort sans doute politiquement justifiable, Thésée et son épouse Phèdre durent s’exiler pendant un an, à Trézène.

C’est alors que se déroula le drame de Phèdre : Phèdre tombe éperdument amoureuse de son beau-fils, Hippolyte.

Hippolyte est un bel athlète qui méprise les femmes et préfère ses compagnons de chasse ; il refuse les faveurs de la déesse Aphrodite. Sa belle-mère Phèdre connaît une vive passion pour lui, se déclare. Hippolyte refuse et affirme son dégoût des femmes.

Hippolyte honore Artémis tandis qu'il méprise Aphrodite. Cette dernière, pour se venger, suscite chez Phèdre cette passion coupable.

Phèdre n'osa pas révéler cette passion à son beau-fils mais elle se confia à sa nourrice qui la conseilla d'envoyer une lettre à Hippolyte, dans laquelle elle lui avouait son amour et lui racontait les aventures de son père qui avait abandonné sa sœur, et sans doute sa mère. Puis elle l'invita à une chasse.


Phèdre s'offre à Hippolyte. Hippolyte, horrifié, repoussa les avances de Phèdre et vint l'accabler de reproches dans ses appartements.

Alors Phèdre, se voyant délaissée, accusa son beau-fils d'avoir cherché à la violer et se pendit, en prenant soin de laisser une lettre dénonciatrice pour son époux.

Par vengeance et craignant qu'Hippolyte ne révèle tout à son père, elle accuse le jeune homme d'avoir cherché à la violenter. Furieux, mais ne voulant pas son fils lui-même, Thésée appelle aussitôt sur son fils la malédiction de Poséidon.

Poséidon invoque un monstre marin qui effraie les chevaux du char qu'Hippolyte conduisait le long de la mer. Effrayés, les chevaux s'emballent et le jeune homme périt, traîné par ses chevaux le long des rochers.

PHEDRE DANS LA LITTERATURE

Le mythe de Phèdre a été une constante source d'inspiration pour les écrivains depuis l’Antiquité.

Euripide dans ses deux tragédies consacrées au sujet, propose deux versions de la mort de Phèdre. L'une intervient juste après qu'elle a accusé son beau-fils et provoqué sa mort, l'autre avant même qu'elle ne déclare son amour à Hippolyte. La première a ceci de particulier qu'elle ne n'intéressait pas au personnage de Phèdre. Le véritable personnage tragique de la pièce, c'est Hippolyte, car il meurt victime des mensonges de sa marâtre. Phèdre se réduit chez Euripide à un pur moyen de vengeance utilisé par Aphrodite contre Hippolyte, qui s'est voué tout entier au culte d'Artémis, la déesse vierge. Dès lors, chez Euripide, il n'est guère question de la faute de Phèdre : il est clair qu'elle n'est responsable de rien, elle n'est qu'un jouet des dieux. Elle n'a aucune indépendance, volonté propre. On ne saurait donc lui en vouloir.

Sénèque, dans « Phaedra », concentre l'action sur ce personnage féminin. La pièce de Sénèque annonce une nouvelle interprétation du mythe, dans la mesure où ce n'est plus le personnage d'Hippolyte qui est au cœur de la pièce, mais bien le personnage de Phèdre.
Mais cette Phèdre n'est pas celle de Racine. Dans la pièce de Sénèque, le personnage n'est guère ménagé. Elle déclare à son beau-fils son amour ; horrifié, il a la tentation de Phèdre, mais se ravise. Son épée jetée au sol accuse le jeune homme lors du retour de son père. Celui–ci le maudit, puis Hippolyte meurt. Phèdre meurt en pleurant le jeune homme. Thésée, devant le suicide de Phèdre, comprend alors son erreur et découvre la vérité.

Racine écrit sa tragédie, « Phèdre », en 1677. Sa pièce est une analyse et une dénonciation de la passion amoureuse à travers le personnage de Phèdre. Phèdre avoue son amour « ueux » qui la brûle et la déchire mais qui est plus fort qu'elle. Face au rejet du jeune homme et découvrant l'amour d'Hippolyte pour Aricie, elle accuse Hippolyte à tort devant son père. La pièce se termine par une double mort, celle de Phèdre et celle d'Hippolyte, suivie des tourments de Thésée.

Chez Racine, tout est fait pour disculper en partie Phèdre.

Phèdre illustre la conception pessimiste de l'homme qu'à Racine, une conception nourrie par le Jansénisme. C'est une doctrine religieuse du XVIIe siècle, selon laquelle seuls quelques élus choisis par Dieu seront sauvés. Chaque homme est prédestiné et aucune bonne action ou comportement exemplaire ne saurait changer le fait initial d'avoir ou pas la grâce divine. Ainsi Phèdre met en avant la croyance de Racine en la théorie de la prédestination, ainsi que la misère de l'homme sans la grâce divine.

Phèdre, étant la fille du sage roi Minos et de l'indigne épouse Pasiphaé, illustre d'abord par son hérédité la transmission de la faute. La passion amoureuse empêche les hommes d'être libres.

Phèdre peut aussi servir d'avertissement à un siècle, le XVIIe, et plus généralement à toute époque marquée par les débordements amoureux.

Zola, dans son roman « La Curée » (1872) dans la série des Rougon-Macquard, imagine une histoire d'amour entre une jeune femme, Renée Saccard, et son beau-fils Maxime. A l'inverse d'Hippolyte, Maxime adore le monde féminin, jusqu'à son physique qui accentue son attirance.
Il épouse Louise parce que son père arrange ce mariage. Il est le pur produit de la dégénérescence de son époque. Renée, issue de la noblesse, connaît la mésalliance en épousant Aristide Saccard. Elle est violentée par un homme plus âgé qu'elle, le jour même du coup d'état de Napoléon III : elle est déshonorée. Elle représente la France profanée par un imposteur.
C'est aussi le renouvellement de la tare originelle inventée par Racine pour expliquer le dérèglement moral de son héroïne qui reflète celui de toute une catégorie sociale, la noblesse. La mésalliance concrétise le matérialisme d'une société qui ignore la pureté des relations : l'amour entre Renée et son mari n'existe pas, il est remplacé par l'argent.
Renée connaît un destin tragique : elle est prise d'une passion frénétique pour Maxime qui l'abandonne pour épouser la jeune fille qu'a choisie son père. Elle meurt dans la solitude alors que le roman se termine sur le triomphe cynique de Saccard.

Le mythe de Phèdre continue à inspirer des écrivains contemporains, notamment le grand poète grec Yannis Ritsos. Les feux du désir de Phèdre pour Hippolyte n’ont peut-être jamais été chantés avec autant d’intensité que dans cette version du mythe par le poète grec Yannis Ritsos.
La Phèdre de Yannis Ritsos est une femme accomplie. Elle est touchée par un amour soudain, sans préavis, amour qui changera sa vie de façon définitive. Malgré la différence d’âge, inconcevable quand il lie une femme à ce stade de la vie à un homme qui pourrait être son fils, Hippolyte, et malgré le lien presque filial qui les unit, cet amour pourrait être beau, pur, juvénile. La réponse est brutale. Cette passion est coupable, impure, sale. Dans la bouche d’Hippolyte, les femmes sont en elles-mêmes coupables d’impureté, bien avant d’avoir commis le moindre crime. Au-delà de la question de la féminité, se pose, simplement, celle de la « pureté ».
Phèdre est victime d’une situation qui l’emprisonne, comme l’oiseau pris dans la glu. Chaque action, chaque décision l’empêtre plus. Seule la mort peut résoudre la situation, mais, comme le dit Ritsos, elle arrive toujours trop tard.

UN PERSONNAGE TRAGIQUE ET PASSIONNEE

Phèdre serait victime de son hérédité : elle doit à sa mère Pasiphaé le dérèglement de ses sens, avec sa passion « dépravée » pour un taureau et la naissance d’un monstre, le Minotaure. Aphrodite poursuit Phèdre et sa famille de sa haine et œuvre sans relâche à leur perte. Il y aurait sur Phèdre une malédiction divine, sous le signe des amours défendus et maudits.

La passion que Phèdre éprouve pour Hippolyte domine toute sa vie affective. La présence de son beau-fils déclenche chez elle un dérèglement sensoriel.

Phèdre se sent coupable des sentiments ueux qui l’habitent. Passionnée, Phèdre est un personnage ambigu et complexe. Racine disait que « Phèdre n’est ni tout à fait coupable, ni tout à fait innocente ». La tragédie raconte la déchéance d’un être souffrant d’un mal qui la ronge et sans lequel elle ne peut vivre.

Phèdre serait donc symbole du drame d’une humanité écartelée par le combat de la chair et de l’esprit.

Une relation entre belle-mère et beau-fils n’est pourtant pas un e en tant que tel. C’est néanmoins ainsi que cela est considéré depuis l’Antiquité, alors qu’il s’agit « au pire » d’un adultère. La loi des hommes a souvent été d’une sévérité extrême face à une telle relation, comme le rappelle le destin de Parisina et d’Ugo, dont j’ai parlé dans un récent texte (Histoire des libertines (16) : « Décapitées » Le destin tragique de trois femmes adultères dans l’Italie de la Renaissance.) où la marquise de Ferrare et son beau-fils furent exécutés pour adultère et e.

Ce qu’il y a de tragique dans le mythe de Phèdre, c’est principalement son dénouement. C’est d’abord qu’Hyppolite n’ait pas répondu aux invitations de Phèdre. C’est évidemment son droit le plus absolu, mais quel dommage car ce qu’une femme d’expérience peut amener à un jeune homme est un cadeau inestimable.

MA LECTURE DU MYTHE : LE DROIT AU DESIR FEMININ

Phèdre est la femme amoureuse et passionnée, celle qui brise les tabous et ose dire l’inavouable, sa faim inassouvissable pour le corps jeune et beau d’Hippolyte.

Oui, je sais, la « norme » sociale veut que ce ne soit pas à la femme de « draguer » et de solliciter l’homme. C’est une règle ancestrale que je rejette. Quand un homme me plait, je fais tout pour parvenir à mes fins. Je le veux et suis décidée à l’avoir. Je suis une « chasseresse » et je mets un point d’honneur à parvenir à mes fins.

Il y a naturellement les invitations plus ou moins explicites et d’abord la façon de s’habiller pour séduire, pour montrer ses envies et sa disponibilité. Ceux qui suivent mes récits savent comment je peux et sais en jouer, à travers le choix de mes vêtements. Philippe, dans ses fantasmes candaulistes, l’a parfaitement compris, en me poussant à porter les tenues les plus provocantes.

Mes armes de séduction « massive » sont diverses : une robe laissant voir bras et épaules et avec un dos nu vertigineux, laissant plus que deviner ma chute de reins, avec un décolleté plongeant, ou encore fendue jusqu’en haut des jambes. J’aime aussi porter une jupe ou une robe courte, qui met bien en valeur mes jambes et mes fesses. Mais ça peut être aussi un chemisier très échancré, clair ou même translucide, que je porte bien entendu sans soutien-gorge.

Le maquillage est aussi une arme. J’ai des pratiques différentes selon mes cibles. Il peut être quelque peu outrancier, lorsque je veux me comporter en « putain ». Souvent, je me contente d’un maquillage discret, qui met en valeur mes yeux sombres, mon visage et mes lèvres. J’aime le rouge, sur mes ongles et mes orteils, mais surtout sur mes lèvres, promesse d’un plaisir infini pour mon futur amant.

En règle générale, tout cela, appuyé par un échange de regards, par une conversation, me suffit à parvenir à mes fins.

Il est des circonstances exceptionnelles où il n’est pas besoin de cela. J’ai raconté comment je suis devenue la « femelle » d’Hassan, que je n’avais jamais vu jusqu’alors et comment je me suis offerte à lui, parce que mon désir était si intense, dans mon seul regard alors que j’étais nue et me dirigeais vers lui, offerte.

Il y a aussi d’autres moments où tous ces artifices ne marchent pas et il faut aller plus loin, à commencer par des gestes sans équivoque. C’est ce que j’avais fait lorsque j’ai fait la connaissance de Philippe (voir récit numéro 3) et que je voulais qu’il devienne mon amant. Et même cela n’avait pas suffi, car tombé amoureux fou de moi, il n’osait pas, de peur de me décevoir. Il a fallu que je lui fasse une invitation directe pour qu’il franchisse enfin le pas. Décidément, Philippe fut, dès le départ, le plus singulier de mes hommes. Il est mon Philippe, l’homme de ma vie.

LE DROIT POUR UNE FEMME DE DESIRER UN HOMME PLUS JEUNE

C’est un sujet que j’ai déjà évoqué dans d’autres textes. Le mythe de Phèdre y fait référence, puisque l’épouse de Thésée est nécessairement plus âgée que son beau-fils.

Je n’aime pas la façon péjorative dont on parle de ce désir, ce terme de « cougar ». Personne ne trouve rien à dire lorsqu’un homme a une compagne plus jeune que lui. Quand c’est l’inverse, la femme est considérée comme une « vieille » salope, une cougar. Et bien non, c’est un désir normal et qui doit être respecté.

J’ai commencé à ressentir ce désir pour des amants plus jeunes à partir de l’approche de la trentaine, alors que, jusque-là, je ne m’intéressais, dans la droite ligne de mon complexe d’Electre, qu’aux hommes plus âgés que moi.

Phèdre a été malheureuse parce qu’elle a été victime d’une passion non partagée, elle a été rejetée par celui dont elle était follement amoureuse. Il ne saurait être question de le reprocher à Hippolyte, car il avait naturellement le droit de dire non, au nom des convenances morales, de la différence d’âge ou peut-être tout simplement parce que sa belle-mère ne l’intéressait pas.

Sans condamner Hippolyte, il faut reconnaitre qu’il a eu tort, car, pour un jeune homme comme lui, il y a tant à apprendre auprès d’une femme d’expérience.

Dans mon parcours d’hypersexuelle, j’ai déjà dit la fierté que me donnaient les séances du mardi après-midi à la Cité lorsque, sous la coupe de Rachid, je m’offrais aux jeunes de ce quartier. C’était mon plaisir que de réaliser tout ce que je leur apportais.

CONCLUSION : PHEDRE, UN CONTRE-MODELE ?

Le personnage de Phèdre m’a toujours intéressé, et j’ai très vite compris que je ne voulais pas être Phèdre. Capable de passion, amoureuse, oui. Mais aliéner durablement ma liberté et tout sacrifier à un seul homme, qui, en plus repousse cette passion ? Evidemment, non !

Dans le combat de Phèdre, déchirée entre les envies de la chair et l’esprit, je ne choisis pas seulement la primauté des plaisirs de la chair. J’affirme que le choix de vie doit permettre de satisfaire les besoins vitaux d’un être humain.

De ce point de vue, le couple que nous avons construit avec Philippe répond à cette ambition. D’abord par l’immensité d’un amour qui a résisté à bien des tempêtes, mais aussi du fait de la complémentarité entre mon hypersexualité et son candaulisme. Mais aussi à cause de la communion intellectuelle qui unit Philippe et moi, à travers les passions qui nous sont communes.

Face au déterminisme d’un Racine ou d’un Zola, pour qui le destin tragique de Phèdre était écrit, j’affirme la liberté de choisir.

Je me plais aussi à rêver de ce qui se serait passé si Phèdre avait été hypersexuelle. Elle aurait probablement surmonté sa blessure et trouvé auprès d’autres ce qu’Hippolyte lui refusait.

De même si Thésée avait été candauliste, et avait poussé l’amour de son épouse jusqu’à la comprendre et l’aider. Je reconnais que cela est une situation idéale, exceptionnelle, ouverte à peu de couples, parce qu’elle va à l’encontre de siècles de préceptes et d’interdits, ancrés au plus profond des êtres.

Personnage tragique, Phèdre est pourtant ma sœur, l’exact contraire de ce que je suis devenue. Avoir pris la peine de réfléchir à son destin pour comprendre les ressorts de la tragédie, cela m’a aidé à assumer, à revendiquer, à faire. Si je ne crois évidemment pas à l’hérédité, évoquée au sujet de Phèdre (même si mon père collectionnait les maîtresses comme moi les amants), je pense qu’il y a une nature qui, combinée à l’éducation, fait ce que nous sommes.

Et puis, il y a les circonstances, certains diront le destin, construit sur les rencontres que nous faisons, sur le hasard et la nécessité. Je répète, une fois de plus, que je ne serai pas celle que je suis devenue sans la rencontre avec Philippe, son amour sans limites et les encouragements qu’il m’a prodigués afin, je ne l’oublie pas, de satisfaire son candaulisme.

Et voilà peut-être pourquoi je suis Olga et non Phèdre. Mais je ne saurais oublier son destin tragique et le fait que nous avons tous et toutes en nous une part de Phèdre, torturés que nous sommes entre nos passions et les normes sociales.

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