Réveille-Toi, Petite Poupée

Deux yeux carmins l'observaient bouger de façon presque hypnotique dans la marée humaine des corps en sueur, désireux de trouver un semblant de liberté et de divertissement nocturne. De taille moyenne, sa proie se mouvait avec élégance, un corps élancé sous une peau pâle et une masse de boucles sombres et brillantes qui tombaient en cascade sur ses épaules nues. Noir corbeau, la couleur de la nuit, celle de ses ténèbres.

Les yeux inquisiteurs dévisagèrent la silhouette mouvante, au rythme du flot sensuel de la musique, s'attardant tout particulièrement sur ses hanches qui l'attiraient comme la sirène charme le pauvre pêcheur dans ses filets. La jeune femme portait une robe satinée, coquette, dévoilant à peine sa poitrine, redessinant ses charmantes courbes avec précision. Les pupilles enflammées par le désir grandissant dans ses veines, il traça un chemin de feu le long de ses fines jambes, prisonnières d'un élégant bas...

Brûlant d'une scandaleuse promesse de luxure, ses yeux rouges se plissèrent davantage lorsque la jeune femme se tourna vers lui, le transperçant de son regard chocolat. Sa prise se raffermit sur la rambarde en voyant les lèvres de cette nymphette se courber en un lent rictus. Il sentit sa bouche s'assécher tandis qu'elle relevait légèrement le menton, rejetant sa tête en arrière puis sur le côté, le scrutant toujours de ses iris scintillants dans la pénombre. Elle caressa ses hanches, sa poitrine, puis son cou gracile de ses mains, jusqu'à tendre ses bras dans les airs, au-dessus de sa tête.

Sa petite poupée, car telle était sûrement la jeune femme, commença à se rapprocher, roulant ses hanches de façon si sensuelle dans l'étroitesse de sa robe que son souffle se coinça et ses mains en devinrent moites. Il pouvait sentir cette tentation, ce magnétisme qui depuis le début, l'avait poussé à se rendre dans cet endroit. L'aura de sa jeune proie était chaude et délicieuse, ses pupilles chargées de promesses d'un plaisir charnel.

.. Il la sentait s'infiltrer jusque dans ses entrailles, provocante, séduisante... elle lui coupait le souffle.

Elle était si proche à présent, la distance les séparant s'amoindrissait avec chaque bouffée d'air franchissant ses lèvres. Son pouls s'accélérait à chaque pas guidant sa nymphette vers lui. La soif viscérale le rongeant de l'intérieur s'intensifia, exigeante, insatiable. Il flaira les traces du parfum qui imprégnait sa peau, l'odeur de son sang, son odeur... Ses lèvres se retroussèrent.

Ah, une flagrance si pure, si douce, enveloppait la jeune femme. Elle le contemplait avec audace, mais il ne lisait rien d'autre que l'innocence dans ses yeux tendres et sur son visage rond. Il fut séduit.

Oui, approche ma petite poupée... viens, laisse-moi te goûter...

Elle l'avait finalement rejoint, pressée contre lui jusqu'à ne laisser aucun filet d'air les séparer. Il ressentit la chaleur et les tremblements de ce corps délectable, entendit les battements erratiques de son coeur, le sang chaud coulant dans ses veines, le désir suppliant d'être assouvi.

Ses yeux écarlates se voilèrent de satisfaction alors qu'il capturait une poignée de longs cheveux soyeux et, d'une main délicate mais ferme, inclinait sa tête en arrière.

- Ma chère, quel est ton nom ?

- Ça n'a pas d'importance.

Un murmure soufflé parmi l'océan capiteux de chair vibrante, implorante.

Ah, elle savait donc quels dangers recelaient les mots, le pouvoir d'un nom prononcé à haute voix.

Il se pencha, le nez enfoui contre la pâleur exquise de son cou, s'imprégnant de sa douce odeur. Elle respirait les roses et le sang. Tant d'innocence... et totalement mienne, pensa t-il en embrassant la peau tentatrice, ponctuant chacun de ses baisers d'un coup de langue. Le gémissement d'envie qui franchit les lèvres de la jeune femme aiguisa ses sens.

- Ce soir, tu m'appartiens, souffla t-il, resserrant sa fine taille d'un bras alors qu'il plongeait ses canines et goûtait voracement aux délices de ce nectar à la fois divin et maudit.


*******

La pièce était sombre mais ses ténèbres n'étaient pas suffocantes, atténuées par les braises ardentes de l'âtre, qui jetaient leurs ombres sur le sol et les murs telles de douces caresses. L'atmosphère était piquante, chargée d'arômes émanant des corps qui se mouvaient. L'air était aussi riche en sons ; les flammes crépitantes de l'âtre, le murmure des draps glissant contre la peau brûlante, le bruit lascif des chairs humides qui se mélangeaient, le concert de gémissements, de plaintes, de soupirs veloutés.

Il releva son regard gagné par la fièvre et humidifia ses lèvres, laissant son souffle chaud caresser le corps fébrile et offert sous lui. S'il vous plaît... Un sourire suffisant étira ses lèvres. Oui, pensa t-il, supplie-moi.

- Supplie-moi, ma douce.

- S'il vous plaît... oh par pitié !

Ah, quelle amusante petite créature. Pitié... de sa part ? Certainement pas...

Il n'avait pas été clément, lorsque avec délectation, il lui avait ordonné de se dévêtir et laisser choir un à un ses vêtements. Ses gestes avaient été lents, presque timides. Il l'avait vue rougir de gêne en exposant ses formes affriolantes et déjà excitées à son regard intense. Obéissante, elle s'était caressée devant lui, ouverte comme une petite fleur avide de dévoiler ses pétales et laisser jaillir son miel.

Il n'avait pas été clément, quand, perdant tout contrôle devant ce sublime spectacle, il avait violemment pris sa bouche. Une caverne étroite, chaude et moite, prête à l'accueillir, prémisse du plaisir ultime qui l'attendait. Docilement, elle l'avait savouré, recueillant chaque filet crémeux qui avait coulé sur son visage d'ange.

Il bougea jusqu'à recouvrir le corps de sa petite poupée, étendue telle une offrande à un dieu.

- Encore, murmura t-il, frôlant de ses canines les seins pâles et dénudés de la jeune femme.

*******

Elle ressemblait à une toile de peintre, claire et parsemée de taches de sang, peignant un chemin alléchant de promesses insoupçonnées.
Il ondulait lentement, arrachant des petits cris de plaisir à la jeune femme sous lui, aussi facilement qu'il s'était abreuvé de son sang et de sa jouissance un peu plus tôt.

Quel beau spécimen.

Et complètement à lui...

Continuant ses déhanchements lents et délicieux, il retraça la peau diaphane tachetée de sang avec sa langue.

Pas une goutte ne devait être gaspillée.

*******

Il faillit sombrer en sentant les soubresauts de sa chair brûlante qui l'étreignait, se resserrait autour de lui comme un écrin de velours. Il sombrait, profondément enfoui en elle, faisant rapidement claquer ses hanches contre les siennes, alors qu'il saisissait la masse de boucles sombres d'une main et de l'autre, poussait sa taille au fond des draps.

Oui, comme ça, laisse-moi t'apprivoiser, te combler, te vénérer...

Il put enfin inhaler l'odeur amère des larmes, roulant le long des joues empourprées de sa poupée, perlant sur ses lèvres divinement rouges et frémissantes. Sa poigne se resserra autour des longs cheveux, soutirant un autre glapissement exquis à cette bouche, puis il tourna le visage de la jeune femme vers lui. Il dévora ses lèvres, engloutissant chaque halètement plaintif et doux comme l'abandon, avant de chasser les perles salées de sa langue.

À cet instant, il aurait pu la défaire entièrement et la reconstruire à son image. Plonger dans les tréfonds de son esprit comme il le faisait avec sa chair, fouiller ses souvenirs et en déterrer chaque secret. Trouver son nom et tout ceux de sa lignée pour les enchaîner à lui, éternellement.

Mais cela serait renier toutes leurs lois, enfreindre les plus sacrés de leurs commandements et subir le courroux de leurs ancêtres. Une vie de servitude dévouée devait être pleinement consentie.

*******

Sa petite poupée avait abandonné toute forme de pudeur, rendue docile mais extrêmement gourmande. Insatiable, elle se trémoussait sur ses genoux, ondulant du bassin avec autant de volupté et de séduction qu'elle en avait manifesté sur la piste de danse.
Elle vibrait de désir, le corps marqué, l'âme possédée. Affaiblie par les vagues successives de plaisir inavouable. La tête relâchée sur son épaule, les lèvres humides et haletantes contre son cou, elle inondait ses oreilles de charmantes suppliques, comme une litanie.

- Oui, encore, s'il vous plaît... je suis à vous... votre servante, votre esclave, votre poupée de chair et de sang... Marquez-moi encore, prenez-moi, dévorez-moi !

Il sourit contre la gorge délicate. Comment ne pas vouloir exaucer un tel souhait ? Satisfait, il se remit à l'explorer. Il caressa sa peau en sueur, fiévreuse, glissant à l'intérieur de ses cuisses palpitantes et trempées du nectar le plus savoureux après celui qui coulait dans ses veines. Impatient, il la pressa contre les draps et accéléra ses mouvements, encouragé par la ferveur de ses gémissements qui grimpèrent rapidement dans les aigus. Leur étreinte se fit plus ardente, vigoureuse, saccadée, cherchant une fois encore à atteindre ce moment de dévotion partagée et de plénitude extrême. À nouveau, il prit possession d'elle et ses canines avides se refermèrent pour réclamer leur dû.

*******

Le soleil matinal commençait à répandre ses rayons chaleureux à travers l'ouverture des rideaux, savamment tirés pour faciliter le sommeil de la jeune femme. Elle dormait nue, étendue sur les draps frais. Dehors, le chant des oiseaux s'employait à dissiper le reste des ombres nocturnes.

- Hé oh la marmotte, réveille-toi, petit-déj' !

Des voix étouffées s'étaient rapprochées et lui parvinrent jusqu'aux oreilles. Un grognement s'échappa de sa bouche sèche, ses muscles protestant à la moindre idée de mouvement.

Non, elle ne voulait pas se réveiller. Son corps était encore trop épuisé pour se lever, son esprit trop confus pour quitter son rêve.

Son rêve. Vraiment, tout cela ne s'était-il passé que dans sa tête ?

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