Pot De Colle 4

LOUIS croit téléphoner à Myriam. Mais C'est Jean qui l'écoute.

Louis :


- En quittant précipitamment le bal tu as oublié ton téléphone sur la table. Je l’ai emporté et souhaite te le remettre comme promis hier, sans éveiller l‘attention. C’est un excellent prétexte pour te rendre visite. Ton mari n’y verra rien à redire. Quel grincheux celui-là. Il ne te mérite pas. C’est un détestable jaloux.

- C’est mon mari, ne l’oublie pas. Ne l’indispose pas, il pourrait se montrer violent !

L’animal se vante d’avoir exploré le corps de ma femme en frottant sur la piste et s’amuse à me dénigrer. Il y va fort, certain de ne pas être rabroué par sa dulcinée, donc ce n’est pas son premier essai. J’ai dû lui servir de tête de turc au bal. Il s’est payé ma tronche pour faire rire ma femme. Elle a ri, par conséquent il se croit tout permis quand il lui parle de moi. Il appuie :

Tu m’as mis le feu !
- Oh !

C’est un rapide. Jamais je n’aurais osé des propos aussi directs quand j’ai fait la cour à Myriam. Mais Louis fonce, sûr de plaire. Cette audace a séduit ma femme, l’a fait rire aux éclats et « femme qui rit est à moitié dans ton lit ». Surtout si ta jambe appuyée sur la vulve renforce les mots.

- J’ai profité de mon mercredi pour essayer de te rendre ton mobile. A la poste on a bien voulu exceptionnellement me communiquer ton adresse. Je suis devant ta porte. Es-tu seule à la maison ? Ce serait magnifique, nous pourrions mieux nous connaître, danser encore et faire des choses qu’on ne peut pas oser au bal.

- Non, mon mari est à la cave…Je regrette…Mais je suis sous la douche. Je te recevrai dans une demi-heure. Ça te va ?

J’évite les phrases trop longues pour ne pas trahir ma « merveilleuse voix » comme il dit. Mon épouse fait ses courses en quittant le bureau.. Je vais le faire patienter et m’informer sur ses intentions. Je ne crois guère à la fable du téléphone« oublié » .

Myriam le lui aurait remis pour lui fournir un prétexte à visite ? Ce serait un signe de trahison supplémentaire. Elle est très méticuleuse, oublie rarement ses objets personnels. Quoique… Elle a quitté le bal rapidement lorsqu’elle a vu ma chaise vide, grâce aux signes de Sabine. A mon avis, Louis s’est servi dans son sac pendant que nous dansions. Et le voilà, avec sa gueule enfarinée, prêt une fois de plus à me prendre pour un idiot avec son histoire de téléphone abandonné; « Ton mari n’y verra rien à redire ». Crétin, c’est raté. Je suis curieux de voir la tête de Myriam .

Je jette discrètement un œil à l’extérieur. Louis passe devant la maison et s’éloigne d’un bon pas. Quelques minutes plus tard Myriam range sa voiture derrière la mienne dans le garage. J’enfile ma veste.

Bonsoir mon amour. Tu sors ?

- Oui, je fais de la place pour ta visite. Ton ami Louis ne devrait pas tarder. Il attendait sur le trottoir à hauteur de l’arrêt de bus. Il a appelé ici, j’ai répondu en imitant « ta merveilleuse voix ». Il m’a rappelé que tu l’avais contacté hier et que tu l’avais invité à passer pour te rendre le téléphone que tu aurais oublié au bal.

- Ah ! Oui, il est bien aimable. Ça se sent immédiatement quand on le rencontre. Qu’a-t-il dit autrement ?

Je lis un peu d’inquiétude sur le visage de ma femme.

- Bof, comme il croyait s’adresser à toi, il a énuméré tes qualités, surtout tes qualités physiques, tes seins, tes cuisses, ton ventre, tes hanches etc.… tout y est passé accompagné de qualificatifs et de superlatifs flatteurs et irrésistibles. En résumé, je le cite : tu lui as mis le feu et il brûle de désir pour toi. Si bien que lui ai demandé , toujours avec ta voix, de repasser dans une demi-heure. J’ai un peu honte d’avoir trompé ton ami, j’ai été indiscret et je ne veux pas l’être davantage. Après m’avoir dit que ce garçon ne comptait pas pour toi, vous avez échangé vos téléphones. Et tu t’es empressée de lui donner rendez-vous par téléphone.


- Cela se fait couramment. Tiens, Sabine et moi l’avons fait également, vois sa carte sur le living.

- Je n’y vois pas celle de ton ami à oublier. Et depuis as-tu téléphoné à Sabine ? L’attends-tu aussi ce soir ? Non, évidemment puisque seul Louis t’intéresse. Donc, après avoir entendu son souhait de te rencontrer seul à seule pour faire ce que l’on ne peut pas faire sur une piste de bal, (sic) , où pourtant, d’après ce charmant danseur, tu as trempé de ta cyprine la jambière de son pantalon, je juge absolument nécessaire de vous laisser en tête à tête, d’autant plus que ton soupirant ne m’apprécie guère et a déclaré « Ton mari n’y verra rien à redire. Quel grincheux celui-là. Il ne te mérite pas. C’est un détestable jaloux »

- Ah! Le maladroit ! C’est un péché de jeunesse ! Ne prends pas tout au premier degré

- Quel serait le second ? J’ai entendu ce que j’ai entendu. Tu l’as habitué à se moquer de moi pendant le bal, il ne se gêne pas quand il pense s’adresser à toi.


-Donc tu te sauves, tu abandonnes ton poste, tu vas aller ruminer dans un coin et imaginer un soupirant en train de séduire ta femme infidèle, et ta femme heureuse de faire l’amour avec lui. Jean, tu n’as pas le droit de me laisser seule face à lui.

- Il ne fallait pas l’inviter sans m’avertir. Je ne veux pas tenir la chandelle.

- Mais quel est ton problème ? Tu es mon mari, ta place est près de moi. J’ai sans doute eu le tort de le rappeler. Il m’avait fait rire en m’exposant ses théories sur l’amour, le mariage et le célibat ou le divorce. Il racontait ses idées sur un ton badin, trouvait des exemples.

- Tu le trouvais drôle; n’aurais-tu pas dû le trouver trop entreprenant ? Comment expliquer la forte humidité de sa jambière si tu n’as pas pris plaisir à faire aller et venir on sexe sur sa cuisse ?

- C’est une blague, pas très fine j’en conviens. Il est peut-être épris de moi, je ne le suis pas de lui.
Il plante des banderilles et croit ainsi me pousser à m’abandonner un jour.

- Ho ! Ho ! Pourquoi avoir repris contact ? Tu espères avoir une ou de nouvelles occasions d’amidonner les jambières de ses pantalons ?

- Ça suffit, tu restes avec moi , ou je pars n’importe où. Tes soupçons sont insultants à la fin. Et puis, il s’est peut-être vexé de devoir attendre et s’en est allé. Tant mieux.

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