Un Cycliste 3

Cycliste 3

Voilà un espace de liberté que je dois à une standardiste indiscrète. Je suis débarrassé de Lili !Je lui avais recommandé de ne pas répéter que j’allais me reposer à La Rochelle ! Son bavardage incontrôlé a envoyé mon ex-compagne, Liliane, à ma recherche dans ce magnifique port. Elle n’est pas sur le point de m’y rencontrer. Au moins puis-je me promener en ville sans avoir à affronter les récriminations de l’infidèle. Pourquoi s’est-elle lancée sur cette trace ? Que pense-t-elle obtenir de moi ? Un retour au bercail ? Elle aurait dû comprendre que je l’ai quittée pour une raison grave et que je ne veux plus de ses simagrées de femme amoureuse.

A quoi bon perdre son temps à s’expliquer; j’ai préféré partir, quitter le domicile conjugal, car pour moi la vie de couple n’a plus de sens : le spectacle que Lili m’a offert sans le savoir, ce soir de juillet, avec la complicité de son amie retrouvée, en compagnie d’un jeune chien prénommé Louis, était assez explicite pour provoquer une séparation à lui seul. Or elle a récidivé dans les huit jours sous couvert de séance de cinéma avec des copines. .« Entre filles » disait-elle en suivant les bons conseils de Charlene. Ce mensonge à lui seul méritait la sanction. Elle me prenait pour une bille ! Cette fois j’avais jugé inutile de sauter sur ma bicyclette pour vérifier par qui ou comment elle était défoncée ou de surveiller l’événement .

La rencontre serait, avec des variantes prévisibles, la répétition des rapports sexuels observés la première fois dans le parc. Que le mâle change (et Lili avait vu l’homme , l’amant ou client de sa copine ) était sans intérêt pour moi. Récidiver, rejoindre pour la deuxième fois un client fourni par la maquerelle, y aller la joie au cœur et l’envie au ventre devenait impardonnable. Des bribes de conversation me permettaient de connaître le but des sorties entre filles. Par conséquent Lili ne pouvait rien ignorer des intentions de sa copine et me cocufiait sans vergogne.

La soirée aboutirait à des accouplements très chauds dans cet endroit propice à ces rencontres adultères. Salope, deux fois salope !

Lili préférait donc ce genre de relation avec un étranger qui la gavait et la soûlait en terrasse du centre ville avant de se l’envoyer contre un arbre ou sur un banc de parc public, à une heure où la fraîcheur du soir rendait le coït plus agréable. Une erreur pouvait être tolérée : tout un chacun peut faillir en raison de circonstances particulières. Elle pouvait être victime de la surprise d’une rencontre agréable, d’un excès de consommation d’alcool, de bulles de champagne qui pétillent dans le crâne, de l’audace bouleversanted’un compagnon occasionnel, de l’attirance très forte pour un mâle aux caractères physiques surprenants ou inattendus. Un parfum enivrant ou une envie subite d’être aimée et câlinée ou l’addition de plusieurs de ces facteurs pouvaient consti des circonstances atténuantes la première fois .Mais recommencer, non.

Que sais-je encore ? Voulait-elle devenir « une gagneuse » pour garnir sa garde robe ? On chute une fois, passe. Mais se préparer à recommencer dans des circonstances semblables relève d’une volonté éclairée, ne doit plus rien au hasard ou à un effet de surprise. Ce n’est plus un accident. Recommencer, c’est avoir apprécié et se préparer à répéter indéfiniment ce type de rencontres. C’est se moquer de son compagnon officiel, laissé en rade deux fois, de manière à faciliter la tromperie souhaitée, préméditée. Quand on en arrive à tromper ainsi celui qu’on a aimé, on fait le bilan, on constate qu’on ne s’aime plus et que mieux vaut rompre.

La soumission de Lili à Charlene et son goût soudain pour les désordres proposés par la revenante ne correspondent pas à ce que j’attends d’une relation de couple et ce d’autant moins que le plaisir accordé et partagé avec un inconnu est doublé d’un cadeau en espèces. Je n’ai pas de goût pour le partage de ma femme et je ne suis pas près de me mettre dans la peau d’un proxénète qui cède sa femme pour cent euros ou plus.
Car Lili n’est pas vraiment amoureuse, celui qui la prendra la prochaine fois ne sera pas Louis, elle passera sous un autre homme au cours de ce nouvel épisode. Ce sera uniquement charnel, du cul, dirait l’autre. Elle a changé, Charlene la pourrit. Son but est évident pour moi. La fausse amie a raté son coup, il y a dix ans, elle n’a pas renoncé à nous désunir.Elle a de la suite dans les idées!

L’annonce de la répétition proche d’une prétendue « sortie entre filles » dont la probabilité avait été évoquée par Charlene à la fin du premier tour, et l’accord tacite de Lili m’avaient déçu plus que surpris. Elle avait entendu, elle n’avait pas opposé le refus que j’attendais.

De nouveau Lili avait menti et s’était préparée à accorder à un autre homme, à l’air libre, ce qu’elle rechignait à me donner à la maison en raison de la moiteur de l’air de notre chambre en été. Si vraiment il ne s’était agi que d’un problème de température, j’aurais installé un lit dans notre cave semi enterrée, ou j’aurais installé un climatiseur dans notre chambre ou encore nous aurions utilisé le canapé du salon orienté au nord ou enfin j’aurais attendu les miettes d’amour des jours pluvieux d’automne ou des jours froids de l’hiver…Quoique… Rien ne garantissait ces miettes d’amour, il y a des chambres d’hôtel pour cacher ses amours clandestines en toute saison.

J’ai donc été déçu et profondément déchiré, humilié de me sentir écarté, déconsidéré comme amant par l’apparition de concurrents à succès et ruiné comme ami par les mensonges, doublement trompé par le mensonge et par la liaison charnelle rétribuée. Ulcéré, il me restait une solution : sortir de la vie,de l’infidèle, disparaître pour retrouver un peu d’estime de moi. Fermer les yeux et rester, cela aurait été avilissant.

Je vivais heureux près d’elle dans sa maison. Cocu et négligé, je vivrais en pestiféré, méprisé mais supporté, par pitié peut-être, en souvenir d’un passé assez long et apparemment heureux jusqu’au retour de Charlene.
Partir, lui laisser le champ libre ! Lili voulait couchotter par ci par là, varier ses plaisirs, faire des expériences ? Elle était lassée de moi sans oser le dire, elle avait besoin de nouveaux horizons. La conclusion était simple à tirer : «  Elle ne m’aime plus, elle ment pour ne pas me vexer. Je ne serai pas un boulet. Je dégage! »

Je remue toujours les mêmes idées, comme si j’avais besoin de me justifier, comme si le responsable de la rupture c’était moi. Je ne suis pas parfait, je le concède. Mais être cocu sans avoir reçu des reproches, c’est dur, insupportable. Je me pour trouver comment j’ai poussé Lili dans cette voie, je rumine, je radote.

Elle a choisi, elle a souhaité participer à cette deuxième partie « entre filles ». Elle n’a rien appris la première fois du but de Charlene ? En cinq jours les vapeurs d’alcool se sont évaporées, elle est donc « accro », elle a goûté de la bite, ça lui a plu, elle voudra encore de la bite, de la jeune, vigoureuse, vive, de la bite qui bouscule, culbute et mitraille. Du zob en rodage, facile à apprivoiser, à diriger. De la queue jeune à initier avec tendresse, à goûter comme du vin nouveau, à former entre les doigts, à chauffer au four de sa bouche pour y faire courir les premiers frissons d’une première fois. Salope !

Je me demande bien pourquoi elle avait fait semblant de me consulter : sa décision était prise, je comptais pour du beurre, elle s’amusait cruellement à demander un avis dont elle ne tiendrait aucun compte s’il contrariait son projet. Elle maintenait une apparence de lien entre compagne et compagnon. Elle aurait dû me jeter à la figure que ma présence l’ennuyait la gênait, l’ étouffait, lui faisait perdre les meilleures occasions, limitait la satisfaction de ses instincts, l’empêchait de recevoir des hommes pour se faire foutre à domicile.

Sans moi elle aurait pu se faire enfiler à la chaîne, galoper comme une chienne en chaleur d’un mâle à l’autre, explorer toutes les variétés d’hommes, toutes les dimensions de sexes et elle aurait pu jouir, et jouir, et jouir encore, jouir à l’infini !.
Avec un peu de courage, elle m’aurait foutu à la porte et aurait atterri dans son lit un jeunot à la queue enchantée. Moi, je n’ai pas eu besoin de courage pour quitter une femme obsédée par une chasse à l’amant jeune, audacieux et aux poches cousues d’or. J’ai fui sa lâcheté et je vis en solitaire dans mon studio et je rumine mon malheur.

Je suis encore jeune, physiquement en forme, pas mal de ma personne. Quand je me rase, dans mon miroir je ne me trouve pas mal, même beau. Des fois on me dit que j’ai de la chance. Je gagne honnêtement un salaire convenable. Sans être un phénomène de foire, mon sexe est tout à fait convenable, d’aspect plaisant, il a longtemps enchanté Lili. Ce n’est pas un arrache moyeu, mais je le crois efficace, endurant : tout à fait convenable pour toute femme dite « normale » et je suis propre à en satisfaire plus d’une. Mon principal défaut, c’est d’être sentimental et fidèle. Faudrait-il pour être parfait boire sans modération et m’empester l’haleine en fumant ?

Il y a des cas plus désespérés que le mien. L’avenir sera beau, je trouverai une autre compagne, je la choisirai soigneusement, jeune, belle, gaie, de bonne composition, pour des jours, des semaines, ou des années : rien ne presse, je n’y pensais pas, j’aimais Lili, elle me suffisait… Avant ! …Aux yeux de Liliane j’ai perdu de mon mystère, je suis devenu une habitude transparente, un meuble ancien vermoulu : elle veut rajeunir son cadre de vie, s’entourer de neuf, de moderne : avec mes 36 ans je fais tache dans son décor imaginaire.

Il existe des hommes de dix ou quinze ans mes cadets, elle y a goûté, elle y a pris goût, elle se tourne vers eux ; mais comment me le dire ? Elle a affronté ce problème. Charlene lui a livré la solution pour sortir de l’impasse : Tu sors, tu vois du monde, tu baises, tu prends ton pied, tu prends ton destin de femme libérée en main, Laurent se lassera à la longue de tes absences répétées et il finira bien par apprendre qu’il est cocu. Il foutra le camp de lui-même. .. Pour une fois c’est la solution adaptée à la situation.

Alors, je n’allais pas attendre qu’on me donne mon congé. Je suis parti, sans tambour ni trompette. J’avais aimé Liliane, je me suis dit :

- Je vais lui éviter l’embarras de l’explication du pourquoi ou du comment d’un renvoi. Elle n’aura pas à se r les méninges pour ne pas me blesser en me présentant mon successeur ou ses clients. Une rupture n’est jamais gaie. Les larmes de crocodile d’une femme qui rompt afin de vivre sa vie avec un autre, avec le suivant, lui seront épargnées. Elle me fait pitié. J’ai eu tort de la croire différente des autres. Toutes des s…. Hélas, elle me pousserait aux extrêmes !

Le lendemain de l’annonce de sa deuxième soirée sans moi, avec « des filles » dont certaines à moustaches, couilles et verges comme constaté précédemment, j’ai acheté trois valises. J’ai eu la chance de trouver un studio à louer. Si Lili ne changeait pas d’avis, elle signait la fin de notre vie commune. Concubins, nous n’aurions pas besoin d’un juge ou d’avocats. Je reprenais ma liberté. Je ne manquerais pas à un engagement écrit signé .

Le soir du rendez-vous venu, la joyeuse fêtarde a déposé un bisou sur mon front, m’a glissé à l’oreille un doux « je t’aime » murmuré de sorte que Charlene ne l’entende pas, comme si Lili avait honte de lui montrer ses sentiments au moment où elle allait se livrer à un ou d’ autres mâles contre repas, argent et plaisir charnel. Moi-même, j’ai trouvé déplacée cette déclaration à cet instant. J’ai eu la force de répondre à mon Judas en jupe légère et dessous de charme :

- Amuse-toi bien, ma chérie. Ne perds pas ta culotte ce soir. Tu me raconteras le film à ton retour, si tu n’es pas épuisée comme la première fois. On devrait interdire ce genre de films. Enfin tu feras comme bon te semblera. Certains films s’oublient en quittant la salle de projection, tu l’as vécu il y a huit jours, souviens-toi : tu ne me l’as pas raconté .

Charlene n’a pas pu cacher une grimace ennuyée. S’est-elle sentie devinée, mise à nu ? Liliane a bafouillé un

- Oh ! Pardon, j’ai oublié de te raconter l’histoire ; mais tu dormais  !...

Elles sont parties en pépiant. J’ai chargé ma voiture et j’ai rejoint ma nouvelle demeure. Elle trouvera mon trousseau de clés dans sa boîte aux lettres et sur la table elle découvrira les raisons de notre rupture. Femme libérée elle sera. Mon dernier cadeau ! Celui qui fait mal au cœur plus qu’au portefeuille , l’affront d’être délaissée par son cocu.à
à suivre

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