Récits Érotiques De La Mythologie (18). Ganymède, Aimé De Zeus.

Dans un texte antérieur (« Récits érotiques de la mythologie (9). Les frasques de Zeus »), paru le 23 novembre 2018, j’avais déjà parlé de la bisexualité du Roi des dieux Zeus, qui était à l’image de la société grecque antique au sujet de la pédérastie. J’avais alors déjà évoqué le personnage de Ganymède, amant de Zeus.

Dans la mythologie grecque, Ganymède est un jeune mortel qui succède à la déesse Hébé dans la fonction d'échanson des dieux. Il est aussi considéré comme un amant de Zeus. Sa beauté est devenue proverbiale.

Ganymède est le fils de Tros, roi de Dardanie (qui aurait donné son nom à la cité de Troie), soit par son épouse Callirrhoé, fille du dieu-fleuve Scamandre, soit par Acallaris, fille d'Eumedes.

Cependant les traditions au sujet de Ganymède diffèrent considérablement dans leurs détails : certaines en font un fils de Laomédon, d'autres un fils d'Ilos, un fils de Dardanos, un fils d'Érichthonios ou d'Assaracos. Dans toutes les configurations, c'est un descendant de Zeus.

ENLEVE PAR ZEUS

Lucien de Samosate raconte qu'il était berger en Phrygie. Il le met en scène, en échanson, dans plusieurs ouvrages. Lucien représente l'aigle ravisseur comme une métamorphose de Zeus lui-même et implique Hermès.

Homère, dans l’Iliade, relate que Ganymède est réputé être le plus beau des mortels et qu'il fut enlevé par « des dieux ».

Alors que le jeune prince fait paître le troupeau familial sur le mont Ida de Troade, Zeus l'aperçoit et se métamorphose en aigle afin de l'enlever et l'installer dans l'Olympe. Ganymède devient ainsi l'échanson des dieux et son amant.

En compensation de la perte de son fils, Tros reçoit de Zeus quatre chevaux qu’il tenait de Poséidon. Ceux-ci figurent dans le mythe d'Héraclès : Laomédon, père de Ganymède selon certaines versions, les avait promis à Héraclès s’il sauvait sa fille Hésione. Dans une autre tradition, Zeus offre une coupe en or, œuvre d’Héphaïstos.

Il lui assura aussi que Ganymède était devenu immortel, à l'abri des infirmités de la vieillesse.

Héra, épouse de Zeus, est jalouse de ce nouvel amant, et de sa fonction d’échanson que Zeus a enlevée à Hébé, sa fille. Elle tente de forcer son époux à renvoyer Ganymède chez les mortels mais au lieu de cela, Zeus l'élève alors au ciel sous la forme de la constellation du Verseau. Dans une version tardive, c’est Éos (dont j’ai parlé dans « «Récits érotiques de la mythologie (4). Eos l’hypersexuelle », paru le 29 janvier 2018) qui enlève Ganymède et Tithon. Zeus, apercevant Ganymède, le réclame à la déesse, et l’obtient à condition qu’il exauce un vœu.

LE GANYMEDE DE PLATON

Platon attribue aux Crétois l'invention du mythe des rapports de Zeus avec Ganymède afin de justifier leurs propres amours et les mettre en accord avec celles des dieux : « Tout le monde accuse les Crétois d'avoir inventé la fable de Ganymède. Persuadés que leurs lois venaient de Zeus, ils ont imaginé cette fable sur son compte afin de pouvoir eux aussi goûter ce plaisir à l'exemple du dieu » (Livres des lois).

Dans le Phèdre de Platon, les sentiments de Zeus pour Ganymède sont décrits comme du « désir ».

LE GANYMEDE DE XENOPHON ET DES AUTEURS LATINS

Au chapitre VIII de son Banquet, Xénophon fait dire à Socrate que Zeus n'a non pas enlevé Ganymède par amour pour son corps (amour physique) mais par amour pour son âme et sa sagesse (amour spirituel).

Le mythe attira les poètes et c’est à Rome qu’il occupera une place importante. Virgile parle de Ganymède dans l’Eneide, Horace dans ses Odes ou encore Properce dans ses Elégies mais surtout Ovide dans ses métamorphoses et dans ses fastes.

ERASTE ET EROMENE : L’HOMOSEXUALITE MASCULINE DANS LA GRECE ANCIENNE

La bisexualité est omniprésente en Grèce antique. À cette époque, les hommes étaient tenus de se marier et de fonder une famille. Dans un même temps, l'amour d'hommes légèrement plus âgés envers des adolescents (pédérastie) était encouragé, bien que très réglementé, comme un moyen d'éducation de la jeunesse masculine.


Les Grecs d’alors ne dressaient pas de séparation étanche entre un comportement sexuel hétérosexuel et homosexuel. L'homme qui pénètre est vu comme viril, alors que celui ou celle qui se fait pénétrer est toujours considéré(e) comme « inférieur(e)». De fait, pour un homme dominant, peu importe le sexe de la personne qu'il pénètre. Dans la Grèce antique, les hommes ne se définissaient pas selon une certaine orientation sexuelle : les concepts d'hétérosexualité, d'homosexualité et même de bisexualité sont des notions modernes, qui n'existaient pas du temps de l'Antiquité.

Il n'existait ainsi pas deux types de désirs, l'un homosexuel et l'autre hétérosexuel ; seule importait l'attraction envers une « belle » personne, quel que soit son sexe. Un homme peut s'enticher à la fois d'une belle femme et d'un jeune homme. Ainsi Michel Foucault estime-il dans L'Usage des plaisirs que dans le cadre grec antique, c'est l'appétit naturel envers de « belles » personnes qui conduit à s'enamourer de quelqu'un, que ce soit un homme ou une femme. C'est pour cela que Foucault lui-même use du terme « bisexualité » dans le cadre de son étude de la sexualité masculine grecque antique.

Il convient aussi de préciser que l'homosexualité exclusive était très rare, et non acceptée socialement ; l'amour des hommes ne détournait, ni ne devait détourner, de l'amour des femmes. La société grecque antique, profondément homophobe, ne tolérait pas que l'on s'écarte du cycle eromenos, erastes, époux et père de famille

Le mythe de Ganymède servait donc à justifier, dans la société grecque ancienne, l’homosexualité masculine, ou en tant cas une forme de celle-ci, comme une sorte de rythme initiatique : la pédérastie.

La pédérastie grecque consiste en une relation amoureuse entre un citoyen et un jeune homme appelé à le devenir.

La pédérastie était une sorte d’initiation et de rituel de passage. La pratique de la pédérastie n'est en aucun cas exclusive d'une vie sexuelle hétérosexuelle : on attend de tout citoyen qu'il se marie et ait des s, qu'il soit déjà engagé dans une relation homosexuelle ou non.
Par coutume, ceux qui s'engagent dans un rôle actif dans une relation pédérastique sont des hommes mariés, qui entretiennent d'un autre côté une vie amoureuse et sexuelle hétérosexuelle.

Les plus jeunes étaient choisis (souvent pour leur beauté) par des hommes mûrs, appelés « érastes », qui leur apprenaient, selon eux, ce que tout bon grec devait connaître. Cette initiation se devait être aussi bien philosophique, poétique, scientifique ou littéraire que sexuelle. Comme l’éphébie grecque préparait à être un bon citoyen, la pédérastie préparait « l’éromène » (un adolescent) à être un homme bon et viril. Une fois son éducation terminée, l’éromène prenait une femme et devenait plus tard éraste à son tour.

Les rôles d'éraste et d'éromène, les attitudes ont été définies de manière plus ou moins claire, au travers de la mythologie, qui considère l'amour homosexuel comme légitime car accepté et pratiqué par des êtres divins.

Les éromènes devaient se montrer réservés et difficiles à conquérir. Ils résistaient aux attentes de l’adulte afin d’« éprouver l’amant avant de lui céder », pour vérifier ses bonnes intentions et ne pas tomber dans la vulgarité caractérisée par des désirs seulement physiques. Ainsi Ganymède, n’est jamais présenté dans les textes comme répondant aux attentes de leur éraste ; au contraire, ils semblent subir, dans leur passiveté, la relation qu’ils entretiennent avec les dieux.

La passivité est caractéristique du rôle joué par l’éromène, ou plutôt de sa représentation dans les textes ou dans le monde des arts. Ganymède est jeune, beau et a quelque chose de féminin dans son attitude ; Ganymède signifie « qui aime la virilité », le jeune homme est blond et il devient échanson, remplaçant ainsi la fonction d’une figure féminine.

Dans ce cadre, l’éraste et l’éromène jouent métaphoriquement les rôles du chasseur et du chassé, comme une poursuite de l’être aimant vers l’être aimé. En enlevant Ganymède, par le moyen d’un aigle, Zeus s’impose comme chasseur et le jeune homme comme proie.


Si Ganymède n’est pas clairement cité par les auteurs comme participant à des pratiques érotiques avec Zeus, cela est sous-entendu dans l’Hymne à Aphrodite. La déesse se sert ainsi de la relation de Zeus et Ganymède comme argument pour rassurer son amant Anchise (le père d’Enée) qui craint des représailles après avoir eu des relations sexuelles avec elle. Aussi, Anchise, au même titre que Ganymède, ne subira pas de fâcheuses conséquences.

CE QUE JE RETIENS DE CE MYTHE


En écrivant ce texte, j’ai voulu évoquer les particularités de la Grèce ancienne, qui fut la patrie de Sappho (voir « Histoire des libertines (1) : Introduction et Sappho la poétesse de Lesbos. », publié le 14 août 2017) et qui encourageait une certaine forme d’homosexualité masculine, considérée comme une forme d’initiation.

De grands personnages, comme Socrate, Alcibiade ou Alexandre le Grand furent bisexuels. Rome, héritière de la civilisation grecque, a prolongé cette tradition. Suétone ne disait-il pas de Jules César qu’il était « le mari de toutes les femmes et la femme de tous les maris. ». Ses adversaires l’appelaient « la reine de Bithynie », parce qu’il avait l’amant du roi Nicomède.

Certes, nous l’avons vu, cette tolérance ne s’étendait pas à l’homosexualité exclusive, qui était mal vue. De même, la distinction essentielle n’était pas entre hétéros et homos, mais entre celui qui possède et celui (ou celle) qui est pris.

Mais il a fallu attendre plus de 15 siècles pour que gays et bisexuels, persécutés pour « sodomie », retrouvent de tels droits, il était bon de le rappeler.

J’ai aussi voulu évoquer ce mythe de Ganymède, souvent qualifié de « dieu de l’amour homosexuel » parce que j’ai toujours été fascinée par les rapports entre hommes.

J’ai évoqué plusieurs fois ce que je ressens quand j’ai eu la possibilité d’assister à des ébats virils. Je ne cache pas que je particulièrement excitée quand je suis témoin d’une fellation entre hommes et encore davantage quand il y a sodomie.

J’ai aussi expliqué que j’avais perçu très rapidement, chez Philippe, mon mari candauliste, ses tendances bisexuelles. Ca m’avait conduit, dans nos rapports intimes à des pratiques qui avaient pour objet à le préparer à franchir le pas. Encore aujourd’hui, j’aime le prendre à l’aide de mon gode-ceinture. Et j’ai fini par le persuader d’assumer cette part de lui-même.

J’ai décrit en détail ce que je ressens quand j’ai le privilège d’être témoin de ses amours bisexuels. Je renvoie sur ce sujet au texte suivant : « Philippe, le mari candauliste et Olga, l’épouse hypersexuelle : le plaisir d’avoir un mari bisexuel », paru le 14 juillet 2019. Je ne peux penser à ces merveilleux moments sans être terriblement excitée.

Le texte sur Ganymède est une façon pour moi de défendre la liberté sexuelle et notamment les droits de ce que l’on appelle les LGBT, dont je fais partie puisque bisexuelle de longue date, en couple avec une femme.

M’adressant plus particulièrement aux gays et bisexuels, je veux leur dire, à travers ce texte, tout mon soutien et mon affection.

PRINCIPALES SOURCES SUR LE WEB

Outre l’article de Wikipédia, je renvoie aux liens suivants au sujet du mythe de Ganymède et de l’homosexualité masculine dans la Grèce antique:

• https://lesamoursdezeusenimages.wordpress.com/2015/04/23/ganymede-et-zeus-ou-la-pederastie-grecque-illustre/

• http://ocafeculture.canalblog.com/archives/2008/11/13/11342554.html

• http://www.histoire-homosexualite.org/histoire-gay/histoire-homosexualite/litterature-gay/mythologie-homosexuelle/mythologie-grecque-homosexualite/zeus-ganymede-gay/zeus-ganymede-gay.html

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