Erotisme Et Cinéma (7) : Gazon Maudit

Dans la liste des films dont j’ai prévus de parler dans cette rubrique, j’ai souhaité donner une place particulière à des films qui traitent du saphisme ou de la bisexualité féminine.

Ce sont des films grand public, mais qui ont chacun délivré des messages forts et contiennent des scènes, qui, bien que suggérées, ont un réel contenu érotique.

Je m’intéresserai dans cette publication aux films suivants :

• « Gazon maudit » de Josiane Balasko (1994)

• « La vie d’Adèle » d’Abdellatif Kechiche (2013)

• « La belle saison » de Catherine Corsini (2015)

GAZON MAUDIT, DE JOSIANE BALASKO

Cette comédie, réalisée en 1994 par Josiane Balasko, fut la première à aborder au cinéma grand public français (le cinéma italien avait, quant à lui, illustré le thème dès 1980, avec le film « Immacolata et Concetta » de Salvatore Piscicelli) l’homosexualité féminine. J’excepte le cas particulier du film réalisé en 1967 par jacques Rivette, « Suzanne Simonin, la Religieuse de Diderot », qui n’avait rien de sulfureux mais qui eut un succès de scandale, du fait d’une tentative avortée de censure, laquelle fut à juste titre sanctionnée par le Conseil d’Etat.

30 ans après, les temps avaient bien changé et fort heureusement !

« Gazon Maudit », où Josiane Balasko incarne une lesbienne assumée, revendiquée, je dirais même assez stéréotypée, tombant amoureuse d’une femme mariée plus féminine, est, à ce moment-là, une des très rares comédies grand public à aborder le sujet de l’homosexualité féminine. Il a été exporté jusqu’aux États-Unis, sous le titre « French twist ».

SYNOPSIS

Laurent Lafaille (Alain Chabat) est un homme heureux : une pétulante et fidèle épouse espagnole, (Victoria Abril), deux s, une agence immobilière prospère, dirigée avec son ami Antoine (Ticky Holgado), et de joyeuses aventures extraconjugales. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où, en l’absence de Laurent, retenu par une « affaire », débarque Marijo (Josiane Balasko), tombée en panne avec son camping-car, près de leur belle maison des environs d’Avignon.

Signes particuliers : elle fume des cigarillos, conduit un camping-car souvent en panne et préfère, elle aussi, le beau sexe. Marijo débarque, telle une tornade, dans la vie de ce couple banal.

lui accorde l’hospitalité et invite l'inconnue à partager son repas, puisque Laurent ne rentre pas ce soir. Les deux femmes, d’abord sur la défensive, en viennent à sympathiser. finit même par lui ouvrir son lit. Aucun doute, est tombée amoureuse de Marijo.

Au cours d’un dîner au restaurant, Laurent, en ramassant son paquet de cigarettes, voit Marie-Jo caresser la jambe de . Laurent découvre brutalement qu’il a un point commun avec Marijo: tous deux aiment les femmes. Et en l’occurrence la même ! Ce qui va le rendre fou de jalousie et le conduire à couper court à la soirée au restaurant et à vouloir en découdre avec Marie-Jo. Lorsqu'il

Quand il comprend que son épouse le trompe avec une autre femme, Laurent est anéanti. Encore sous le choc d'avoir appris que aimait Marie-Jo, Laurent refuse que le rejoigne dans le lit conjugal. ira donc chercher du réconfort auprès de Marie-Jo. Le lendemain, Laurent tente de se réconcilier avec mais cette dernière ne lui pardonne pas sa réaction de la veille au restaurant et à la maison.

Lors d'une balade à vélo avec son collègue et ami Antoine, Laurent lui apprend la cause de son chagrin, à savoir que sa femme aime Marie-Jo. Laurent tente de noyer son chagrin dans l'alcool, ce qui va le conduire, sous le choc, à faire de nombreuses bêtises sur le chemin du retour.

Antoine voulant arranger les choses va voir pour lui parler et la convaincre que Laurent est désolé de la situation, mais il commet involontairement l'erreur de lui dire que Laurent la trompe avec d'autres femmes, ce qui va rendre folle de rage et de chagrin.

En représailles, elle demande à Marie-Jo de s'installer à demeure. La cohabitation va s'avérer difficile entre Marie-Jo et Laurent ; l'ambiance est électrique bien que Laurent et Marie-Jo aient un point commun, leur amour pour .


Lézarde dans l’harmonie conjugale, car n’esquive plus les audaces de Marijo. Celle-ci prend goût au séjour, Laurent ne sait plus comment la chasser, y compris du lit où elle a désormais pris sa place. Modus vivendi : ce sera un soir chacun, sauf le dimanche !

Mais rivalité, colères et rapports de force l’emportent sur la sérénité souhaitée. Sur ce débarquent deux copines, deux ex, de Marijo, Dany et Solange. Leur présence provoque la jalousie de , qui s’éclipse, dépitée et boudeuse. Marijo n’insiste plus, et s’apprête à repartir, à la condition toutefois que Laurent lui… fasse un ! L’agent immobilier cède au chantage et lorsque l’apprend quelques mois plus tard, elle n’a plus qu’une idée fixe : ramener chez elle la mère et le bébé, installés chez Fabienne, patronne d’une boîte pour lesbiennes, et vivre avec eux et Laurent.

Celui-ci va donc connaître son .

Antoine aussi. Dragueur impénitent et primaire, et gaffeur en ce domaine comme en tout, celui-ci reçoit à l’agence une jeune cliente et l’aborde sans ménagement, avant de comprendre qu’il s’agit de sa propre fille. Ils ne s’étaient jamais connus, et elle redoutait de découvrir que sa mère disait vrai.

Laurent, de son côté, s’apprête à traiter la vente d’une luxueuse maison. Le vendeur lui tient des propos pour le moins ambigus. Il pourrait bien le prendre… «au mot» !

COMMENTAIRES SUR LE FILM

Gazon maudit représente à l'époque une petite révolution dans le paysage de la comédie française: aucun film populaire n'avait encore mis en scène de lesbienne comme personnage principal. Les hommes avaient eu droit aux « Garçons de la bande » (William Friedkin, 1972) ou à « La Cage aux folles » (Édouard Molinaro, 1978), mais l'homosexualité féminine n'était jamais représentée.

La sortie, le 8 février 1995, est un triomphe : la presse est quasi unanime, et le public au rendez-vous, avec 4 millions de spectateurs. Ce film aura cinq nominations aux César en 1996, Josiane Balasko étant lauréat pour le meilleur scénario.
Il sera également nommé la même année aux Golden Globes dans la catégorie des meilleurs films étrangers.

Gazon Maudit n’est pas sans clichés, Balasko interprétant une lesbienne au physique de déménageur. En 1995 il n'était pas question de « mariage pour tous », ni même de Pacte civil de solidarité (PACS), l'homosexualité était encore un sujet tabou. Balasko l'a magistralement mis en scène aussi bien en tant que réalisatrice qu'actrice.

Il y a indéniablement des personnages clichés, que ce soit la lesbienne au style « camionneuse » ou « déménageur ». C’est le cas aussi du mari volage, sexiste et homophobe, qui trompe son épouse, mais qui est super jaloux quand, à son tour, il est cocu, et qui plus avec une femme. On ne peut pas cependant reprocher au film de mettre en avant ces clichés, car ce genre de personnages existe bel et bien dans la réalité. Dans le film ils vont évoluer, même si la rivalité entre Marie-Jo, l’amante, et Laurent, le mari, est parfois explosive.

J’aime beaucoup l’interprétation de la belle Victoria Abril, qui rayonne dans ce rôle de mère de famille qui se découvre un appétit sexuel et qui ne sait choisir entre son mari et père de ses s et la nouvelle arrivée qui l'initie à d'autres plaisirs.

« Gazon Maudit » est une comédie sympathique qui parvient à traiter du thème de l'homosexualité sans vulgarité aucune. Très drôle, parfois cru, le film propose un regard inédit et juste.

Avec Gazon Maudit, Josiane Balasko aborde l’homosexualité féminine avec beaucoup de subtilité, entre harmonisant humour, passion et tendresse. A l’époque, très peu de films abordaient ce sujet, surtout avec des femmes. On peut considérer ce long métrage comme l’un des précurseurs du genre.

CE FILM ET MOI

Dès le premier texte que j’ai publié sur HDS, il y a près de quatre ans, j’ai affiché d’emblée ma bisexualité. J’ai assumé cette bisexualité le jour même où je fus déflorée, dans les bras de l’épouse de mon premier amant.
J’ai aussi parlé, au fil des récits, de mes aventures bisexuelles. J’ai eu bien moins d’amantes que d’amants et mon hypersexualité, ma sexualité compulsive ne s’étend pas à cette part de ma libido.

J’ai aussi parlé de celles qui ont marqué cette part de ma vie intime, en particulier Christine et, bien entendu Agun, avec laquelle je constitue, depuis bientôt six ans (sans prendre en compte les mois où j’avais rejoint mon amant N), un autre couple, en plein accord avec Philippe. J’ai expliqué la force des liens qui m’unissent à Agun (voir « Philippe, le mari candauliste et Olga, l’épouse hypersexuelle (52) : Agun mon amour, mon épouse. », paru le 14 novembre 2018) et récemment rappelé le rôle décisif qu’elle avait joué pour surmonter les conséquences de ma trahison qu’a constituée ma liaison avec N.

C’est ma particularité : Philippe est mon mari, Agun est ma femme. Contrairement au scénario du film, nous ne vivons pas sous le même toit, à l’exception de la période de confinement, ce qui n’a pas été d’ailleurs sans créer de problèmes, non avec Philippe, mais avec ma fille ainée.

Contrairement à Laurent, Philippe a toujours encouragé non seulement ma bisexualité (il est vrai que je l’ai de mon côté poussé à assumer la sienne) mais aussi mes sentiments pour Agun. Philippe accepte de partager, non seulement mon corps mais aussi mon cœur avec une autre personne. C’est lui qui m’avait poussé à aller rechercher en 2013, en Thaïlande, Agun, que je n’avais pas vue depuis près de neuf ans, à la faire revenir en France et à l’installer non loin de nous. Philippe connait toute la force de notre amour à moi et à Agun.

Une autre différence de situation avec le scénario du film est que, bisexuelle, je n’ai jamais été attirée par une lesbienne ayant le look masculin qu’affiche Marijo dans le film. Qu’on soit claire, je ne juge pas, je n’ai évidemment rien à reprocher à ce look, dont les traits sont un peu s dans le film, mais qui existe. Simplement, je ne me sens pas attirée par ce type de femmes. Ça ne signifie évidemment pas non plus limiter mes relations saphiques aux bisexuelles. Au contraire, lors de notre rencontre, Agun était une lesbienne exclusive. Il est vrai qu’Agun ne ressemble absolument pas au portrait de la lesbienne du film de Balasko. Elle n’a rien du « camionneur » ou du « déménageur », elle est profondément féminine. D’ailleurs, auprès d’elle, j’ai le plus souvent le rôle actif et j’aime tout particulièrement la prendre comme le ferait un homme.

« Techniquement » d’ailleurs, Agun est désormais bisexuelle, puisque j’ai insisté pour que ma chérie connaisse le plaisir de faire l’amour un homme. Et cet homme, ça ne pouvait être, pour sa douceur, son respect, que Philippe et en ma présence. Et j’ai aimé voir mon homme faire l’amour à ma femme. Mais je sais aussi qu’Agun reste, dans sa tête, exclusivement lesbienne et que surtout, elle est la femme d’une seule femme. Depuis le coup de foudre de notre rencontre, il y a près de 16 ans maintenant, Agun n’a pas connu d’autre femme que moi, y compris pendant toutes ces années où nous étions loin l’une de l’autre.

J’ai donc revu récemment, depuis le canapé de son appartement, le film de Balasko en compagnie d’Agun, la tête de ma chérie sur mon épaule. Parce que je lui avais dit que Victoria Abril était le type de femmes qui me faisaient envie, Agun n’a pas caché sa jalousie.

J’ai été surprise par la vigueur de sa réaction, elle toujours si calme et si douce. Elle sait pourtant que depuis que nous sommes en couple, je lui suis et lui resterai fidèle. Agun, qui me partage sans discuter avec mon mari, qui connait mon hypersexualité et le fait que j’ai, épisodiquement des amants en accord et en présence de Philippe, ne supporte pas que je puisse avoir envie d’une autre femme. A défaut d’officialiser notre couple, comme je l’avais proposé lors de la crise qui avait suivi mon escapade avec N, je n’ai aucune difficulté à être fidèle à Agun. Cela ne m’empêche pas pour autant de trouver désirable, en connaisseuse, une jolie femme.

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