Rêve D'Un Soir

La jupe est courte, très courte et noire.
Le boléro est étroit ; trop étroit et noir. Il remonte dans le dos ; il étreint la poitrine.
Au-dessus de la taille de la jupe, sous le boléro qui découvre le dos, le mince fil rouge d’un string tranche sur sa peau claire, et le fil du string qui plonge sous la jupe coupe en deux le papillon d’encre noire dont les ailes dépassent de la jupe.
Le rouge à lèvres vermillon brille de la lumière crue .
La dentelle rouge du soutien-gorge souligne l’échancrure du boléro noir.
Par un bouton oublié du boléro, entre les seins, par un bouton oublié sur la fente de la jupe courte, sur la cuisse gauche, la chair blanche soulignée de rouge s’expose et explose, en cuisses charnues dévoilées sous la jupe courte, trop courte, en seins généreux moulés par le boléro étroit, trop étroit.

La jupe et le boléro noirs
au pied du lit
sur les barreaux laqués de blanc

Il faudrait un drap de satin noir
pour la chair laiteuse
pour les éclairs rouges des lèvres, du soutien-gorge, du string.
Il faudrait une rose rouge dans un soliflore
des pétales blancs sur le drap noir,
un foulard rouge pour bander les yeux.
Il faudrait des cordes rouges
sur les poignets d’ivoire
sur les chevilles d’albâtre
aux doigts crispés
ongles nacrés de noir.
Il faudrait une cravache de cuir noir
pour strier de sang la volupté diaphane.

Je voudrais une lame d’argent
pour trancher entre les seins la fleur de dentelle rouge
pour libérer la chair comprimée
pour couper sur les hanches le filet écarlate
pour libérer l’éclat noir d’une épaisse toison
encadrant la pulpe pourpre et béante.
Je voudrais un Bordeaux aux puissants tanins
pour se marier à la fragrance d’écume de mer
qui sourd des pulpeuses béances.


Je voudrais en écho
aux zébrures d’un sein
l’éclat de l’émail de dents serrées
enfermant un cri sourd
à la blessure du ventre
la morsure blanche sur la lèvre carmin
étouffant une plainte.
Je voudrais un corps arqué de cris muets
aux muscles noués
pour révéler la douce et tendre chaleur.

Elle aurait
des larmes chaudes chargées du kolh
coulant des yeux sous le foulard rouge
une goutte de sang violent
gonflant doucement sous un téton meurtri
et une perle de liqueur nacrée
collant les voiles fragiles.
Elle aurait
un parfum de marée
et des plaintes d’angoisse
un goût de cuivre
et des cris d’attente.
Elle aurait
des frissons apeurés
d’attentes soupirées
des tensions violentes
d’espoirs murmurés
et des cris contenus
de douleur désirée

Elle aurait mon plaisir
Je voudrais me donner
Il faudrait me vouloir
Elle aurait mon désir
Je voudrais tout donner
Il faudrait me forcer
Elle aurait mon nom
Je voudrais l’effacer
Il faudrait me posséder

Ce soir j’ai rêvé.
Je m’étais habillée, de noir et de rouge.
Je ne t’ai pas rencontré, je ne t’ai pas rencontrée, et j’ai rêvé.
Une rose dans un soliflore, un Bordeaux capiteux, j’ai rêvé.
Je serais assez forte ? Je serai assez forte ?
Ce soir je l’étais … ce soir j’étais elle … ce soir j’étais à toi.

Demain je rêverai.
Demain c’est moi qui t’attacherai sur mon lit, c’est moi qui prendrai, demain, peut-être, je te rencontrerai, et je te punirai d’être seule ce soir.

Comments:

No comments!

Please sign up or log in to post a comment!