Sauvetage 1/2

- Allô Lætitia,
- Tiens Patrick, un revenant.
- Oui mais, Patrick PP06, ne confonds pas. Maintenant tous les garçons s’appellent Patrick.
- Mais non, je ne confonds pas, tu es unique (un peu de brosse à reluire ne nuit pas). Alors que veux-tu ?
- N’ayant de nouvelles de toi que par HDS, j’ai pris mon téléphone.
- Je te vois venir… Tu veux remettre ça.
- Avec toi, toujours prêt.
- Eh là ! T’emballes pas.
- Une nouvelle histoire écrite à deux mains, une belle histoire d’amour,
- Ok, mais plus d’amour en maison de retraite comme tu nous l'as raconté il y a quelque temps, laissons Louise et Daniel * vivre tranquillement.
- D’accord, cette fois c’est toi qui publies… Imagines un beau couple, la trentaine, Claire et Laurent, mariés depuis 2 ans, ou 3 si tu préfères. Belle situation. Ils sont beaux, ils sont heureux, ils ont des projets pour agrandir leur famille.
- Bof, ça ne fait pas une histoire. Tu commences par la fin, le happy end comme tu aimes. J’espère que tu as prévu quelques drames… Tiens une idée. Claire attend un bébé, bonheur parfait. Laurent doit partir deux jours pour son travail. Son avion s’écrase, aucun survivant. Sous le choc, elle fait une fausse couche. On retrouve la jeune veuve au cimetière en pleurs. Le lendemain, elle se suicide sur la tombe de son mari et du bébé… C’est pas un beau drame ça ? Je me vois l’écrire au second degré, avec plein de petites vannes. Tiens le croque-mort, on pourrait l’appeler Soihyeur, prénom Adolfo bien sûr. Super non ?
- Eh ! T’en fais pas un peu trop là ?
- Oh là là, chochotte va ! Plus sentimental alors. Laurent est un chaud lapin, au boulot il saute sur toutes les femmes qu’il croise, les jeunes stagiaires, même la vieille comptable. Une belle scène de sodomie sur la photocopieuse. C’est bon ça.
- Ben ??? J’voyais pas ça comme ça.
- Alors, un truc dans l’air du temps. Claire est nymphomane, elle se tape régulièrement le voisin, un grand black avec une queue démesurée.

Laurent les surprend alors qu’elle est prise en double avec le pote de son amant, il regarde en branlant sa petite bite. Bien ça ? C’est la mode en ce moment, ça devrait plaire.
- Dis Lætitia, t’aurais pas fumé ce matin ?
- Rabat-joie, t’es pas drôle… Alors Patrick, c’est quoi ton idée ?
- Écoute.


* Le récit « Louise et Daniel » a été publié par PP06, en décembre 2020.

---oOo---

Aaaaah… Ouiiii …

Le cri de jouissance de Claire résonne dans la chambre d’hôtel.
Elle lâche les draps qu'elle serrait à s'en faire blanchir les articulations de la main, et enlève l’autre bras passé autour du cou de son amant.

Il est encore sur elle, se retire et s’allonge à ses côtés. Se sentant libérée, instinctivement Claire resserre les jambes.

L’esprit ailleurs, elle expire bruyamment l'air encore dans ses poumons Ses muscles se relâchent. Progressivement son souffle prend un rythme plus normal. Elle rouvre les yeux.

Claire vient d’avoir un orgasme, comme elle n’en a pas eu depuis si longtemps. Que c’était bon !

Toujours à côté d’elle, content de lui, il retire négligemment son préservatif.
« Un peu tue l’amour ce truc », se dit-elle.

- C'était bien ? lui demande-t-il d'un ton satisfait.
- Oui bien sûr.
- On se revoit quand ?
- Je ne sais pas, c’est compliqué.
- Tu en as envie au moins ?
- Oui … enfin, je ne sais pas.

Sous la douche, dans la salle d’eau de la chambre, pourquoi ne se sent-elle pas à l'aise ? Oui c’était bon, très bon même, mais elle est soucieuse.
C’est la première fois qu’elle couche avec un autre homme depuis son mariage. Enfin quasiment la première fois. Les fois précédentes, ce n’était pas pareil. Ses sentiments sont partagés. Elle a aimé, mais elle a un peu honte, surtout.
Il y a encore un mois, jamais elle n’aurait pensé se retrouver ici, dans cet hôtel avec cet homme, dans cette situation.


Elle se rhabille au milieu de ses pensées.
Pendant qu’elle met son manteau, son amant s'approche, veut l’embrasser. Elle détourne le visage, il l'embrasse sur la joue :

- A bientôt donc… Claire ?
- Je ne sais pas …
- Tu me contactes ou je te contacte ?
- On verra …

La honte lorsqu’elle a traversé le hall de réception de l’hôtel. Elle a senti le regard du réceptionniste la transpercer. « Il sait ce que je viens de faire » se dit-elle.
C’est rouge comme une pivoine qu’elle a pressé le pas pour regagner sa voiture garée une rue plus loin. Même les passants, elle a l’impression qu’ils l’ont tous vue sortir de cet hôtel, qu’ils savent pourquoi elle était là. Elle a l’impression qu’ils la jugent, qu’ils vont la montrer du doigt.

« Pourvu que personne ne me reconnaisse ».

Une fois assise dans sa voiture, elle reprend son souffle.

« Qu’est-ce que j’ai fait ? … Pourquoi j’ai accepté de le voir ? Oui, c'était bien. Mais est-ce que ça en valait la peine ? Parce que tu as trompé ton mari là, ma grande. Oh mais la honte ! Là j’ai trop honte.
Bon, c’est lui qui m’a relancée. J'aurais dû balancer son message. Pourquoi avoir accepté de le revoir bon sang. Juste pour discuter, qu’il a dit. Je ne vais pas me cacher derrière mon petit doigt, je savais pertinemment ce qui allait se passer en acceptant ce rendez-vous. Est-ce qu'au fond de moi je l'espérais ? Juste boire un verre, c’est ça ! C’est lamentable. Quelle conne ! »

Elle essuie une larme qui coule sur sa joue :

« Non, mais, quelle honte ! D'accord, la dernière fois, il m’a fait jouir, mais ça n’avait rien à voir. Là, c’est bien pire. Qu'est-ce que j'ai fait ? Je ne suis pas une bête bordel, j'aurais dû passer à autre chose.
J’ai trompé Laurent. Pour une heure de baise, j’ai trompé celui que j’aime, à qui j’ai juré fidélité, celui qui m'aime. Après ce que nous avons vécu. Comment est-ce que je vais pouvoir me pardonner ça.
Comment Laurent pourrait-il me pardonner, s'il l'apprend.

Ce qui est sûr, c’est que l’autre là, il pourra toujours essayer, je ne le vois plus, plus jamais.

Laurent ne doit rien savoir. Ma trahison lui ferait trop mal. Parce que c'est bel et bien une trahison, il faut appeler un chat un chat. Une trahison et une belle. Aucune excuse ! J’espère que l’autre saura rester discret. Dans quoi je me suis fourrée.
Comment je vais faire pour regarder Laurent en face ? Il y a une demi-heure, j’avais le sexe de l'autre en moi, et dans la bouche.
Dans quoi je me suis embarquée. Même si je ne le revois plus jamais, je vais devoir mentir à mon mari, enchaîner les mensonges.
Je me dégoûte ».

Claire a démarré sa voiture, elle rentre lentement chez eux. Devant le garage, elle se gare juste derrière la voiture de Laurent.
Avant de descendre, dernier regard dans le rétroviseur, pour vérifier que ses yeux ne sont pas trop rouges après les larmes qui ont coulé.

- C’est toi ma chérie, tu es rentrée ?
- Oui, je suis là.

Claire vient derrière Laurent assis sur le canapé et dépose un baiser sur sa joue.

- Bien travaillé ma puce ? Pas trop dure ta journée. Pas drôle le lundi …
- Non, ça va. Je vais prendre une douche. Après on mangera. Je t'aime.
- Moi aussi je t’aime.

---oOo---

Je suis gelé, je n’aurais pas cru qu’elle soit si froide. Et ces vêtements qui m’empêchent de nager correctement.

Où sont-ils ? Je les ai pourtant vus tomber depuis le petit pont, le courant aurait dû… Ah ! je vois un pied, ou plutôt un talon qui dépasse. Vite, je le tire. Il doit avoir quel âge, cinq ans tout au plus. Mais sa sœur où est-elle ?
Juste le temps de le déposer sur la berge dans les bras des promeneurs de ce matin ensoleillé. J’y retourne. Décidément elle est froide, j’ai les bras engourdis.

La chance me sourit, une longue chevelure blonde essaie de se maintenir hors de l’eau.
Elle s’agrippe à mon cou, je la serre contre moi, … nager, nager vers la rive, malgré le courant qui m'entraîne. Un tourbillon me tire par les pieds, je m’enfonce, mes vêtements gorgés d’eau sont lourds, trop lourds. Ne pas la lâcher, ne pas la lâcher...

En une seconde, je revois Claire, le sourire de Claire, une maison, c’est dimanche, petit jogging ce matin, et ces deux s qui jouent sur le pont. Attention, non ! Un réflexe, je plonge.

Où suis-je ? J’ouvre les yeux.

- Monsieur, il se réveille.

Le sourire de Claire est toujours là, des larmes plein les yeux :

- Laurent, tu m’as fait peur.
- Les s ?
- Ils vont bien, rassures toi.

Alerté par l’infirmière, un interne arrive :

- On vous garde deux jours en observation. Vous avez perdu connaissance et fait une hypothermie. Ça va aller, mais il peut toujours y avoir des effets secondaires.
- Quel genre d’effets ?
- Rien de grave. A votre âge, sportif comme vous l’êtes, vous allez vous remettre rapidement.

Je ne sens plus mon corps, j’ai froid, je grelotte, j’ai mal partout. Je referme les yeux tenant la main de Claire.

Le soir, à la télé régionale, passe un reportage sur le sauvetage de deux s. Une vidéo prise avec un téléphone par un spectateur, les images sautent. On voit la tête d’un homme avec une petite fille blonde qui s’enfonce dans les flots, et un bateau qui arrive.
Le journaliste parle d’un héros inconnu qui au péril de sa vie…Bla Bla Bla. Claire me serre dans ses bras
La porte s’ouvre brusquement, sur le trio d’infirmières qui ont suivi les infos dans leur bureau et viennent me féliciter en riant. Ça me réchauffe le cœur.

Il a bien fallu deux jours pour que je sois enfin sur pied. Je commençais à en avoir assez de cet univers blanc, malgré le sourire des infirmières qui passaient voir si tout allait bien. Oui, je vais bien.

Tandis que Claire remplit les papiers de sortie, on frappe à ma porte.

Une dame que je ne connais pas entre, accompagnée de deux charmants bambins, une petite fille une boîte de chocolats à la main et un garçon un peu plus jeune.
Pas besoin de présentation, je reconnais la longue chevelure blonde. Les larmes me montent aux yeux. La dame me sourit :

- Comment vous exprimer ma reconnaissance.

La petite fille s’approche timidement avec son frère coller à elle. Elle me tend son paquet, et me claque une énorme bise sur la joue.

Je souris bêtement en entendant une petite voix :

- Merci monsieur.
Leurs sourires… C’est la meilleure des récompenses.

Comprenant ma gêne, Claire dit en me serrant la main :

- Laurent est très gourmand, vous aviez deviné ?

J’arrive difficilement à articuler un « merci les s ».

Claire les raccompagne dans le couloir. Elle parle avec la maman, elle doit sûrement lui dire que je suis encore sous le choc. Je les vois se serrer dans les bras.

Claire rentre dans la chambre tout sourire :

- Mon héros au cœur tendre. Tu m’en donnes un ? me dit-elle en ouvrant la boîte de chocolat.

Et elle me glisse à l’oreille, avec un grand sourire :

- Ce soir, on va en faire d’aussi beaux.

En partant, Claire discute quelques minutes avec le médecin, dernières consignes. Je ne remarque pas son sourire crispé en montant dans la voiture.

---oOo---

Je suis dans la salle d'attente de cette psy. Elle m'a été conseillée par mon médecin. Qu'est-ce que je fous là ?
La salle est pleine.
Quand je suis arrivé, il n'y avait plus qu'une seule chaise de libre. Je l'ai prise.
Depuis j'attends.

Il est 10h30 et j'avais rendez-vous à 10 heures, et il y a encore une personne avant moi.

Je voyais ça plus feutré comme ambiance. On se croirait vraiment chez un généraliste pendant une épidémie de gastro.

Je suis mal à l'aise parmi ces patients qui attendent. Ce n'est pas ma place ici. J'ai un caractère fort, une personnalité marquée. Jamais je n'aurais cru avoir besoin de venir ici un jour.

La psy a appelé la personne avant moi. La prochaine fois, c'est mon tour.

Je n'ose pas observer les autres personnes assises autour de moi.
Les regarder, les scruter, chercher à décrypter leurs soucis me fait peur. C'est un peu comme un miroir en fait. Trop peur de voir dans leurs regards mes propres difficultés.

Trop peur aussi de lire sur leurs visages, les stigmates des problèmes qui les minent.
Trop peur surtout de les surprendre et de croiser leurs regards qui chercheraient à décrypter le mien de problème.
J'ai trop honte de ce qui m'arrive. Je n'ai pas envie de le partager. Enfin, pas avec eux du moins.

Faute de mieux, je fixe la porte qui mène au cabinet. On entend vaguement des voix derrière. La porte est suffisamment épaisse pour qu'on ne comprenne pas ce qui s'y dit. Notre intimité est respectée.
Derrière cette porte est en train de se régler le cas de la grosse dame qui était juste avant moi.

Pour la énième fois, je regarde ma montre : 10h50.
Je ne m'impatiente pas, je m'attendais à attendre, comme toujours chez un médecin.

Du coin de l'œil, je vois le sexagénaire assis en face de moi. Il regarde sa montre lui aussi.
Et cette femme à l'air triste, quel âge peut-elle avoir ? Elle est jeune. Je remarque la cicatrice d'une entaille à son poignet. Je détourne le regard pris dans un élan de pudeur. Je n'ai pas envie de violer son intimité.

Cette salle d'attente, c'est le cri silencieux d'une société qui va très mal, voilà ce je me dis quand Chloé Antoine, la psy, m’appelle :

- Vous me suivez Monsieur Mattéi, me dit-elle avec un sourire avenant sur son visage.

Chloé Antoine est une grande fille d'une trentaine d'années. Elle a des cheveux noirs, coupés très courts. Mignonne ! Très mignonne même, me dis-je en la suivant dans le couloir menant à son cabinet.
J'ai le regard fixé sur ses fesses, serrées dans une petite jupe courte écossaise qui virevolte légèrement. Le tout balance au rythme des mouvements de ses hanches.

Cette psy me plaît finalement. J'ai l'impression d'être ailleurs que dans un cabinet de psy. Je me détends. Cette fille, c’est toujours mieux qu’un vieux barbu pédant. Avec elle, je crois que ça va coller, que je vais pouvoir m'exprimer.

Elle m'a invité à m'asseoir dans un profond fauteuil club en cuir. Elle fait de même en face de moi, dans le même fauteuil.
Mes yeux s'arrêtent sur ses cuisses, qu'elle croise et sur sa jupe qui remonte. Je détourne aussitôt le regard :

- Monsieur Mattéi, comment vous sentez-vous ?

Sa voix est douce, presque chantante.

- Ça va, comme tout le monde, je supporte ma vie. Pas rose tous les jours, mais il y a pire.
- Lorsque nous nous sommes parlé au téléphone, pour la prise de ce premier rendez-vous, je vous ai demandé d'écrire votre histoire, afin de faire votre connaissance.
- Je pensais que les psys faisaient parler leurs patients, vous me faites écrire vous ?
- Rassurez-vous, nous allons parler aussi, beaucoup parler même. La première fois, on exprime mieux ses sentiments par écrit que lors d'un entretien plus formel. Racontez-moi votre histoire, comme vous l’avez vécue me dit-elle avec un petit sourire.
- J’ai juste écrit quelques lignes lui dis-je en montrant les feuillets que je sors de ma poche.
- Pourriez-vous m'en faire la lecture ?
- Je veux bien essayer, mais je vous préviens, je ne suis pas écrivain.
- C’est votre histoire, ce sont vos mots que je veux entendre.
- …
- Si vous avez besoin de faire une pause, dites-le-moi.

Je vais commencer ma lecture … Elle m’interrompt d'un geste de la main :

- Excusez-moi, avez-vous donné un titre à votre histoire ?
- Oui, « Sauvetage ».
- D’accord. Je vous écoute…

---oOo---

Au retour de l’hôpital, Laurent est assis à côté de moi dans la voiture. Il a l’air heureux de rentrer à la maison. Je suppose qu'il repense aux deux s qui sans lui ne seraient sûrement plus là … Il peut être fier, en tout cas moi je suis fière de lui.

Mais aujourd’hui, j’ai encore dans la tête ce que vient de me confier le médecin. Comment le dire à Laurent, comment lui dire sans le froisser, il a l’air encore si fragile.

Après avoir pris en tête à tête le petit repas que j’avais préparé, fatigué il a voulu se coucher rapidement. C’est presque en s’excusant qu’il m’a dit :

- Je ne suis pas en forme ma chérie, après une bonne nuit ça ira mieux. Demain matin, tu ne perds rien pour attendre.

Et avec un sourire complice, il m’a embrassé tendrement.

Ce sont ses mains qui m’ont réveillée. Il était câlin, prévenant. Je l’ai laissé parcourir tout mon corps. Mes seins, mon ventre appelaient ses caresses. Je l’embrassais avec fougue … J'espérais que le médecin se soit trompé, mais j'ai dû me rendre à l’évidence, il ne bandait pas.

Lui aussi, bien sûr, s’en est vite aperçu… Un moment interdit, il s’est arrêté net, s’est retourné sans rien me dire.
J’ai compris son désarroi, frappé dans son honneur de mâle. Je me suis collée à lui, espérant encore un miracle.

Alors, je me suis lancée. Lui parlant à l’oreille, je lui ai expliqué ce que le médecin m’avait dit avant de sortir de l’hôpital. Qu’il pourrait avoir des problèmes d’érection, il avait décelé un blocage.
Il sursauta :

- Un blocage ? comment ça.

Je lui ai parlé en cherchant mes mots, lentement, en essayant de ne pas trop le brusquer :

- Après ton séjour dans l’eau, tu as été victime d’hypothermie, une forme grave d’après le médecin. Ce type de pathologie provoque un blocage technique qui peut déboucher sur un blocage neurologique.
- Mais ?... C’est irréversible ? Pourquoi ne pas me l’avoir dit tout de suite ?

Il avait l’air affolé. Je l’ai rassuré comme j’ai pu. Il faudra qu’il prenne contact avec notre médecin qui lui donnera un traitement.

Dans un souffle il m’a murmuré :
- Qu’allons-nous devenir si je ne suis plus un homme ? Tu ne voudras plus de moi.

Je le serre fort dans mes bras. Mon chéri, non… Je lui ai pris les mains, je les ai posées sur mes seins et sur mon ventre :

- J’aime tes caresses, n’arrêtes pas.

Dans les jours qui ont suivi, je faisais tout pour lui donner des idées. Je prenais ma douche face à lui, en me savonnant langoureusement. Moi qui ne pouvais pas dormir sans pyjama, j’ai pris l’habitude de dormir nue, me serrant contre lui, espérant qu’au matin…
Que pouvais-je faire d’autre ?

Il faisait tout pour me satisfaire. Il me massait longuement, partout. Que c’était bon ! Il me faisait jouir, avec ses mains, avec sa bouche, évitant tout contact de son sexe pouvant me rappeler ce qu’il appelait son handicap.

J’étais pleinement comblée par ses caresses. Lui l’était-il ? J’ai du mal à le croire.

Parfois, le soir, il s’enfermait dans son bureau, je n’osais pas le déranger. Voulait-il comprendre ce qui lui arrivait ? Regardait-il des films porno ? Recherchait-il de nouvelles caresses. Peut-être, ou tout simplement ne voulait-il pas me voir.
Une fois, je l’ai entendu pleurer. J’étais malheureuse pour lui.

Un dimanche, nous promenant dans un parc, deux s sont passés en courant :

- Bonjour m’sieur.

Je ne les avais pas reconnus. Mais Laurent a suivi du regard la longue chevelure blonde. Il avait l’air triste, que se passait-il dans sa tête ?

Leur maman qui suivait nous a salués, nous avons bavardé quelques minutes. Elle était contente que Laurent soit sorti de l’hôpital, et en pleine santé. Elle nous a à nouveau remerciés. Laurent n'a rien dit. C'est moi qui ai répondu, « tout va bien maintenant, merci ».
Mais après, j'ai bien senti qu’il était songeur, morose même.

Son médecin lui a conseillé d’aller voir un psychiatre spécialisé dans ce genre de problème. Après avoir longuement hésité, il s’est décidé. Il y va toutes les semaines. Il ne m’en parle pas vraiment, mais je ne vois aucun changement. Pourvu qu’il ne se démotive pas.

Un jour, je ne sais pas comment ni pourquoi, c’était dans le métro, il y avait du monde. Comme d’habitude, je regardais les autres voyageurs, sans les voir.
Et là, nos yeux se sont croisés, avec cet homme, qu’avait-il de plus ? Si je me souviens, il me regardait. Un peu flattée j’ai baissé les yeux.
C’est à ce moment-là, enfin je crois, que j’ai ressenti comme un grand vide, un grand vide entre les jambes.
J’y ai pensé toute la journée.

Le soir en prenant ma douche, je me suis caressée pour faire baisser la tension qui me tenaillait. Ce n’était pas suffisant, je n’y arrivais pas. J’ai pris la brosse à cheveux, enfin le manche…l’effet a été immédiat. J’ai failli crier, me mordant les lèvres pour ne pas alerter Laurent.
Sans savoir comment, je me suis retrouvée recroquevillée par terre, essoufflée, repue, et j’ose dire heureuse.
Touchant mon ventre, la terreur m’a envahi. Pourrons-nous avoir un un jour ?

J’ai eu honte à cette idée. Mon chéri, ce n’est pas ta faute. J’ai tellement envie que tu guérisses, je ferais tout pour t’aider …

Je ne sais pas quoi … Mais je ferais tout…

---oOo---

Cela fait plusieurs mois que je vais régulièrement voir la psy, aucune amélioration. Claire ne dit rien, je devine qu’elle subit en silence. Mais j’ai peur qu’elle ne se lasse. Elle dit m’aimer, mais qu’est-ce que je lui apporte ? Elle veut des s, nous en avions souvent parlé. Elle ne va pas finir sa vie avec un homme qui n’est plus un homme.

- Pensez-vous que je vais guérir un jour ?
- Bien sûr voyons.
- Vous me dites ça, mais …
- Allons, allons. Vous n’allez pas baisser les bras.
- Mais, pourquoi, pourquoi ? J’aime ma femme, elle est belle, j’ai envie d’elle, j’ai envie de lui donner du plaisir. Je deviens fou, que se passe-t-il dans ma tête ?

- Laissez-moi vous expliquer. « J’ai une érection, donc j’existe » ! C’est ainsi que bon nombre d’hommes voient les choses. C’est au plus profond, pardonnez-moi l’expression, de l’inconscient collectif. Pas étonnant que cela provoque un sentiment de panique.
- J’ai tellement envie d’y arriver.
- Le problème n’est pas là. Vous ressentez du désir, c’est certain. C’est le décalage entre désir et érection qui a fait émerger le doute chez vous. Votre problème au départ était neurologique. Il s’est transformé en problème psychologique. Vous appréhendez, vous avez peur, vous vous bloquez. Vous n’y arrivez pas. C’est la spirale infernale.
- Qu’est-ce qu’on peut faire ? Il faut que j’en sorte.
- Il y a de multiples traitements selon le degré de gravité. A commencer par les petites pilules bleues. Dans votre cas, c’est inutile. Il faut juste que vous puissiez vous débloquer. Et là, il n’y a que vous qui avez la clé.
Ça mine la vie des hommes, de leur partenaire, il y a une peur d’en parler, une honte même.
Le mécanisme de l’érection est orchestré par le cerveau. Une érection est le résultat direct des signaux d’excitation envoyés par le cerveau. Vos troubles neurologiques empêchaient l'envoi de ces signaux. Ça, ça semble réglé.
Dorénavant, vous ressentez de l’envie, mais vous n’avez pas d’érection. Le cerveau envoie ses pulsions, votre envie, votre excitation, votre pénis ne les reçoit pas. Il faut juste faire sauter le blocage psychologique, afin que les pulsions arrivent à votre pénis.
Le pénis devient phallus uniquement lorsqu’il reçoit ces injonctions de la part du cerveau, via des circuits nerveux.
- …
- Dit comme ça, ce n’est pas très sexy, j’en conviens, dit-elle avec un léger sourire, mais c’est bel et bien comme ça que ça fonctionne.
Le circuit que je viens de vous décrire est très sensible au stress et à l’anxiété.
- Et vous avez une idée pour débloquer la situation, ce fameux déclic. Comment ?
- Je vais vous poser une question, répondez-moi franchement.
- Je vais essayer.
- Me trouvez-vous désirable ?

Elle ne va pas me faire le coup de la séduction pour me faire bander tout de même !

- J’ai surpris plusieurs fois votre regard sur mes formes Laurent, me trouvez-vous désirable ?
- Euh … oui bien entendu, vous êtes très belle.
- Ressentez-vous un stimulus sexuel en me regardant
- C’est gênant …
- Bien entendu que c’est gênant, mais allez-y libérez-vous. Je suis consciente que les hommes n’ont pas une érection dès qu’ils voient une femme qui leur plaît, mais ils ressentent ce fameux stimulus. L’avez-vous, ce picotement derrière le crâne ?
- Oui, je l’ai.
- Donc tout va bien pour vous. Il faut juste faire sauter le verrou qui bloque encore le bon fonctionnement de votre cerveau.
- Comment ?
- Ce qui vous bloque, ce n’est pas vous. C’est le fait que votre épouse ne ressente plus de plaisir avec vous. Vous vous sentez coupable de ça. Pour vous, c’est de votre faute. Elle est la personne qui compte le plus pour vous, vous l’avez toujours satisfaite et là, vous n’y arrivez plus. Vous avez peur aussi. Peur qu’elle vous délaisse, peur même qu’elle vous quitte. C’est ça qui vous bloque, rien d’autre.
- Oui, vous avez sûrement raison Mademoiselle Antoine.
- Appelez-moi Chloé, la confiance entre une théute et son patient est indispensable, l’usage des prénoms est important. Et puis nous nous connaissons bien maintenant, après une dizaine de séances.
- D’accord Chloé.
- Le problème ce n’est pas vous finalement, c’est votre épouse. Enfin pas elle directement bien sûr. L’image que vous-même que vous pensez lui renvoyer, la peur de la décevoir. C’est ça qui vous bloque. Pour faire sauter notre fameux verrou, il faudrait un électrochoc.
- Comment ça ?
- Tout d’abord une question. Comment votre femme réagit-elle ?
- Vous voulez dire, au fait que je ne peux plus la pénétrer ? Certainement pas très bien.
- Mais encore ? Elle a des orgasmes ?
- Oui, je la caresse pour. Elle ne me reproche rien, mais je vois bien qu’il lui manque quelque chose.
- Pour résumer. Elle vous aime, ne vous reproche pas votre état, mais elle est frustrée sexuellement, en tant que femme. Vous vous sentez responsable de sa frustration, c’est ce qui vous bloque.
- Oui, sûrement… On peut résumer comme ça.
- Comme nous l’avons vu tout à l’heure, quand vous voyez une belle femme, ou si vous regardez un film porno, vous sentez bien quelque chose, mais votre pénis ne répond pas à votre volonté. Pire, vous avez peur de ne pas donner à votre épouse le plaisir qu’elle est en droit d’attendre de son mari.
- C’est ça oui. Que pouvons-nous faire ?
- Il y a bien une solution, radicale. Pas simple.
- Je suis prêt à tout pour satisfaire Claire. Nous nous aimons, nous voulons avoir des s, mais dans mon état. Dites-moi.
- Cela risque de vous choquer, mais aux grands maux les grands remèdes… Présenter un homme à votre femme qui lui fera l’amour en votre présence. Vous l'embrasserez, la caresserez. Elle jouira, comme si c’était vous qui la pénétriez.
- Quoi ?
- Laissez-moi terminer. Elle vous en sera reconnaissante, vous prendrez de l’assurance sachant que grâce à vous elle est pleinement satisfaite, et petit à petit vous guérirez. Vous reprendrez la place qui vous revient.
- Je ne pourrais jamais. Elle ne voudra pas prendre un amant. Que va-t-elle penser de moi ?
- Ce ne sera pas un amant bien sûr, disons un substitut. A vous de le lui expliquer comme je vous l’ai expliqué.
- Mais, si je ne guéris pas ?
- Ce serait très étonnant. Je ne vous ai pas tout dit. Le choc, c’est pour vous. Un choc émotionnel. Comme dans un film porno, vous serez aux premières loges pour voir un homme caresser votre femme, l’embrasser, peut-être voudra-t-elle le sucer, vous le verrez la pénétrer… cette vision devrait déclencher l’érection que vous désirez tous les deux.
- Vous croyez. Voir ma femme… Non, ce n’est pas ça qui va me faire bander, bien au contraire.
- Vous ne seriez pas le premier. Réfléchissez-y. Parlez-lui en. Et prenez tranquillement votre décision ensemble. Sachez bien que c’est théutique.
- Merci. Je ne sais pas, si….
- Courage !

---oOo---

A son retour, Claire voit au premier coup d’œil que Laurent est perturbé :

- Quelque chose ne va pas mon chéri ?
- Non non, tout va bien.
- Des soucis ?
- Non ma chérie, rassures-toi tout va bien.

Comment lui dire ? Il n’osera jamais.

- Tu ne devais pas aller voir ta psy aujourd’hui ?
- Oui comme toutes les semaines. Justement, elle m’a dit…
- Non, ne me dis pas que pour elle, tu ne guériras jamais. Non, c’est pas ça, dis.
- Au contraire, elle m’a proposé une sorte de traitement qui devrait, selon elle, résoudre tous nos problèmes.
- Mais c’est merveilleux. On voit enfin le bout du tunnel. Alors, c’est quoi son traitement.

Prenant une grande respiration, Laurent se lance, d’une traite, rapidement. Il ne veut pas que Claire l’interrompe. C’est assez difficile comme ça. Il tourne un peu autour du pot, mais enfin c’est dit. S’attendant à une réaction vive de sa part, il se souvient des mots de Chloé pour le convaincre :

- … Tu sais, c’est uniquement théutique.

La réaction de Claire ne se fait pas attendre :

- Non, mais c’est n’importe quoi ! Tu imagines ? Tu m’imagines … Avec un homme, devant toi … Je ne pourrais jamais …

Laurent s’attendait bien sûr à un refus, le contraire l’aurait même choqué :

- Juste pour essayer …
- Je t’aime, le faire avec un autre et devant toi, c’est au-dessus de mes forces.
- Je t’aime moi aussi. J’ai honte de te demander ça, crois-moi, mais …
- Je ne suis pas puritaine, mais une autre personne au sein de notre couple, c’est non. Désolée. Je ne peux pas, je ne pourrais jamais.

Fin de non-recevoir. Finalement Laurent est rassuré. Il décide d’en rester là, c’était une mauvaise idée.

Le surlendemain, une fois de plus comme à chaque fois ces dernières semaines, Laurent a fait jouir Claire en la caressant avec ses doigts et sa bouche.
Comme d’habitude, elle l’a embrassé tendrement. Comme d’habitude, il a vu dans son regard les sentiments opposés qui l’animent, l’amour qu’elle lui porte, bien sûr, mais aussi la frustration qu’elle ressent.
Même s’il a compris que Claire y est opposée, il se décide à aborder le sujet qui le taraude depuis sa visite au cabinet de Chloé Antoine :

- Si je te vois avec un autre, parce que je serais là ment, peut-être que je me sentirais moins déçu de te voir prendre le plaisir que je ne suis pas capable de t’apporter.
- Mais tu m’apportes du plaisir, mon chéri, à chaque fois. A l’instant encore, j’ai eu un orgasme, grâce à toi.
- Tu as eu un orgasme, oui, mais as-tu pris du plaisir ? Vraiment pris du plaisir ? Réponds-moi franchement.

Claire regarde son mari dans les yeux :
- Tu as raison, mais ce n’est pas important. Je t’aime, je ne veux pas te tromper. C’est tout. C’est aussi simple que ça.
- Moi aussi je t’aime, et tu ne me tromperas pas, je serais là. Avec toi.
- Je ne pourrais pas … Tu imagines ? Moi pas, je n’imagine même pas …

Quelques larmes coulent de ses yeux :

- Je ne sais plus chéri … je voudrais te faire plaisir, je voudrais… Mais franchement ...

Laurent s’endort confiant. Cette fois Claire n’a pas émis un refus catégorique. Ces hésitations le rassurent, il les espérait même, il les partage. Lui aussi hésite, lui aussi a peur, peur de voir sa femme jouir grâce à un autre, même s’il est là, même si elle ne le trompe pas. Mais Chloé l’a convaincu.
Claire l’aime, elle lui est fidèle et veut le rester. Ça le conforte, mais ça ne règle pas leur problème.

C’est elle qui aborde le sujet le week-end suivant :
- Chéri, j’ai réfléchi… Ça me fait peur, rien que d’y penser …

S’attendant à un autre refus de sa part, Laurent est résigné :

- Je sais chérie. Je ne t’en veux pas, au contraire. On va trouver une autre solution.
- Écoute … si … enfin … on peut …
- Tu veux bien ?
- Non je n’ai pas dit ça, mais... Et puis on ferait ça avec qui ? Sûrement pas avec quelqu’un qu’on connaît.
- Non, il y a sûrement des sites sur internet.
- Et on ferait ça où ? Pas ici, pas dans notre lit.
- Non, bien sûr. A l’hôtel, dans un environnement inconnu, plus impersonnel, moins impliquant.
- Je ne sais pas … Tu vois ça comment ?
- On trouve un type sur internet, un type correct, qui te convient, qui me convient, quelqu'un de normal quoi. C'est nous qui décidons, On impose la façon dont ça doit se passer, nos limites aussi. Si ça ne se passe pas bien, on arrête tout. Je serai là.
- J’ai encore besoin d’y réfléchir. Je t’assure, je ne me sens pas du tout à l’aise avec ça.
- C’est normal ma chérie, moi non plus je ne me sens pas à l’aise. Regarde-moi …

Claire plonge son regard dans celui de Laurent :

- Sois sans crainte, je ne serai pas jaloux, enfin si ment, je le serai, mais je ne t’en voudrai pas, jamais. Crois-moi. C’est moi qui te le demande. C’est pour nous, pour notre couple.
- Je sais …

Une heure plus tard, Claire vient s’asseoir sur le canapé, près de Laurent devant la télé. Les jambes repliées sous elle, elle pose la tête sur l’épaule de son mari :

- D’accord chéri, on va le faire …
- Tu es sûre …
- Non, bien sûr que non, dit-elle avec un sourire triste, je ne suis sûre de rien, mais on va le faire, je vais le faire, pour toi, pour nous.

---oOo---

Un peu anxieux tous les deux en nous dirigeant vers le lieu de ce premier rendez-vous, Claire s’accroche à moi.

Pourquoi lui ? Nous avions le choix. Son physique bien sûr, grand, brun, type méditerranéen, il plaisait à Claire. Il semblait avoir l’habitude de ces rencontres, j’ai pensé qu’il nous mettrait à l’aise. Ses messages sympas, son humour a définitivement rassuré ma chérie. J’ai trouvé gentleman qu’il précise « Je réserve la chambre, tous les frais sont pour moi ». Un peu direct, mais Grand Seigneur.

Bon d’accord, l’hôtel n’était pas le trois étoiles rêvé, il avait choisi un Formule 1, plus discret nous a-t-il dit ? La chambre ? Banale, pas sordide, mais plus simple pas possible. Rien de bien glamour. Nous avons pris un verre rapide au café où nous nous sommes retrouvés.
Il semblait pressé. Normal, Claire devait lui plaire.

Dès la porte refermée, je n’ai pas eu le temps d’enlever le manteau de Claire, déjà il la prenait dans ses bras et tentait de l’embrasser. Elle tourna rapidement la tête, surprise de la rapidité de son geste. On a le temps que diable.

Il a rigolé, et lui donnant une tape sur les fesses :

- Va enlever ta robe dans la salle de bain, j’ai hâte de te voir à poil.

J'ai croisé le regard de Claire, ce n’était pas vraiment ce que nous avions envisagé.

Tandis que notre premier choix commence à se déshabiller, un sourire ironique s'affiche sur ses lèvres :

- Alors, t’es candauliste ?
- Quoi ? Candau quoi ?
- Ben, t’aime être cocu quoi. C’est ça qui te fait bander non ? Voir ta femme se faire défoncer par un beau mec comme moi ça te plaît.
- …
- Tu vas voir. Je vais la faire jouir ta petite femme, elle en redemandera… Regarde et profites-en… En plus, elle a l'air gourmande ... J’espère qu’elle suce bien.

Claire revient, elle a passé un long peignoir. Il s’approche d’elle. Sans un mot, il défait sa ceinture et ouvre en grand les deux pans qui protègent encore sa pudeur. Elle est nue, entièrement nue :

- Ah ouais ! Elle est bonne ta femme, on va s'amuser toi et moi ma chérie. Tu ne vas pas le regretter.

Claire tremble, pas de froid, je devine sa peur. J’ai l’impression de l’amener au sacrifice.

- Allez, viens ma beauté.

Non ! Pas possible. Je me précipite. Je referme rapidement le peignoir sous les yeux incrédules du beau ténébreux. Il me crie :

- Eh ! Tu fais quoi mec ?
- Rien, dégage. C'est bon, on en a assez vu.
- Mais t'es malade.
- Tu dégages j’te dis.

Je lui tends sa chemise. Sans attendre qu’il soit rhabillé, je l'att par le bras et le mets dehors.

- Eh ! C’est moi qui ai payé la chambre.

Le salaud, mesquin avec ça. Je lui jette un billet couvrant certainement deux fois ses frais. Pauvre type !

Assise sur le lit, Claire pleure la tête entre les mains :

- Pardon chéri, pardon. Je n’ai pas pu.
- Non, c’est ma faute. Pourquoi t’ai-je demandé ça ? Du grand n'importe quoi. Je n’aurais jamais imaginé un tel type. Je suis vraiment trop con. Tu aurais raison de m'en vouloir. Excuse-moi.

Après un long silence, je lâche un sanglot dans la voix :
- C’était pour toi. J’espérais te faire plaisir, combler ton manque.
- Idiot va, c’est toi qui me manques.

Je la serre dans les bras, on s’embrasse doucement. Je pose mes mains sur ses seins, sans la caresser, juste pour nous sentir plus proche. Son cœur bat sous mes doigts. Elle pose sa main sur ma cuisse, remonte sur mon entre-jambe. J’aime sa caresse, mais aucune réaction :

- Oh mon chéri, je suis tellement désolée.

Pour calmer le stress qui nous envahit, nous nous allongeons dans les bras l’un de l’autre. Sombrant dans un léger sommeil, nous sommes tirés de notre torpeur par des coups frappés à la porte :

- C’est le gardien. Votre heure est terminée, faut libérer la chambre.

Ensemble, nous éclatons d’un même rire, « Une heure ? Vraiment radin l’étalon ».

Le soir en nous couchant, je lui donne le maximum de ce que je peux faire. Blottie contre moi, elle murmure :

- Je t’aime Laurent.
- Plus jamais. C’est la première et la dernière fois.

Je devine son sourire dans le noir.

Le lendemain, en ouvrant ma messagerie, je découvre une douzaine de messages. Premier réflexe, tout effacer, oublier.

Claire s’approche, me prend la main :

- Attends… Si c'était la seule solution ?
- Quoi ?
- Et si ta psy avait raison ? Et si c’était la seule façon de retrouver une vie normale. Et s’il fallait en passer par là.
- Tu veux dire …
- Mon chéri, si c’était notre seule chance. Essayons encore une fois.
- Mais…
- J'ai réfléchi cette nuit. Je me sens capable de tenter une nouvelle expérience.
- Tu es sûre de toi ma chérie ? je m’en voudrais de te faire revivre le même calvaire. C’est une mauvaise idée, je le sais maintenant. Il faut trouver autre chose.
- Ne t’inquiète pas. On va le faire. Je t'aime, n'oublie jamais ça… Regardons ensemble ces candidats, nous trouverons peut-être l’oiseau rare. Sinon tant pis…Allez, on choisit ensemble me dit-elle dans un grand sourire.

Les messages défilent ...

Trop ceci…
Trop cela…
Pas assez…
Pas lui quand même ...
Oh non ! Il manque pas d’air celui-là…
Bof !

- Tant pis ma chérie, laissons tomber.
- Maintenant, c’est toi qui baisses les bras. Parmi ceux-là, il y en a ment un qui peut faire l'affaire. C'est obligé.
- Un ? mais lequel ?

A chaque prétendant, Claire fait non de la tête. Je force le destin :

- Celui-là alors, écoute « Veuf, la quarantaine, sans oublier mon épouse, je recherche un peu de tendresse ». Il est parfait non ? Et sa photo ? Sympa, rien d’un macho.
- Oui … peut-être… Mais je n’arriverais jamais à lui donner de la tendresse.
- Il a mis ça pour faire bien, ne pas paraître le mec qui cherche du cul. S’il est sur ce site ce n’est pas pour rien. Justement sa retenue est un bon point.

J’ai tout organisé. J’ai pris contact avec lui, trouvé un hôtel discret mais confortable. Rendez-vous au bar pour faire connaissance, avant de monter dans la chambre, une petite suite avec salon.

Quand nous arrivons, il nous accueille le sourire aux lèvres. Plus petit que ce que je pensais, quelques cheveux blancs, il nous serre la main. Malgré son stress, Claire lui sourit, ça me rassure, « monsieur tout le monde » lui convient.

Nous discutons de tout et de rien devant un verre. Claire n'est pas très rassurée, elle a un petit sourire crispé. Lui parle peu, attendant que nous posions des questions, il semble intimidé. Il nous fait part de ses appréhensions, de son trouble même. On dirait qu’il se cherche des excuses, il nous parle de sa femme, de sa maladie, de sa solitude depuis bientôt deux ans. Claire raconte avec plein de détails mon acte héroïque. Je lui explique pourquoi nous sommes là, la frustration de ma femme, mon désir de lui apporter le plaisir que je ne peux plus lui procurer. Mais ni elle ni moi n’évoquons le fameux électrochoc espéré, pas besoin qu’il sache, c’est trop intime.

Dans la chambre, Claire gagne directement la salle de bain nous laissant dans le petit salon. Nous nous regardons, gênés, sans trop savoir quoi dire. Il rompt le silence :

- Elle est belle votre femme.

Et, regardant autour de lui le luxe de la chambre :

- Vous devez beaucoup l’aimer.

A ce moment, Claire passe la tête :

- On y va ?

Nous la retrouvons allongée, les mains croisées sur la poitrine. Elle a revêtu une petite nuisette, on devine qu’elle est nue dessous. Elle m’avait dit ne pas vouloir qu’il la déshabille.

Je m’assieds sur le bord du lit pour l’embrasser, tandis qu’il ôte ses vêtements et sans un mot se couche à côté d’elle en caleçon.
Il la regarde tendrement, passe ses mains sous sa nuisette pour la caresser. Ses cuisses, son ventre, ses seins. Claire ferme les yeux, sa main serre la mienne. Je lui enlève son vêtement et lui murmure à l’oreille :

- Je suis là ma Chérie. Oublie-moi, laisse-toi aller.

Moins tendue, sa respiration s’accélère. Petit à petit, Claire s’abandonne à ces mains qui ne sont pas les miennes.
Discrètement, il enlève son caleçon. Elle frémit au contact de sa queue contre sa cuisse. Il se frotte sur elle, lui embrasse les seins, lèche ses tétons. Elle sursaute quand il lui prend la main pour la poser sur son sexe. Elle hésite. Puis doucement, sa main se referme et elle commence à le branler, sans le regarder, sans me regarder.

La voyant se pencher vers lui, j’en envie de m’enfuir, une boule au creux de l’estomac. Mais la main de Claire s’accroche à moi, je ne vais pas l’abandonner.

Se retournant, il enfile un préservatif. Claire écarte les jambes. Il se blotti contre elle, la tête sur son épaule, et la pénètre lentement. Une dernière vision, Claire les yeux fermés, et ces fesses qui montent et descendent entre ses cuisses.

Je détourne la tête pour ne plus voir. En tremblant, j’entends un grognement, suivi immédiatement d’un cri de jouissance.

Reprenant ses esprits, Claire me regarde, honteuse. Je lis sur ses lèvres « désolé ». Lui se lève et s’enfuit dans la salle de bain.
Quand il revient, Claire s’est réfugiée sous le drap remonté jusqu'à son cou. Je n’ai toujours pas bougé, assis sur le bord du lit.

Après m’avoir serré la main avec un sourire complice, il fait la bise à Claire sur les deux joues. C’est la première fois qu’il l’embrasse.

Restés seuls, Claire s’approche de moi, cherche mes lèvres et pose sa main sur ma cuisse. Elle remonte lentement :

- Voyons voir ? Eh, Eh ! Coquin.
- …
- Me dis pas que ça ne t’a pas fait d’effet ?

Je me retourne vexé, la mine renfrognée. Non pas comme ça non. Je ne vais tout de même pas bander d’avoir vu ma femme se faire baiser, de l’avoir entendu jouir. C’est donc ça le fameux choc dont parlait Chloé, j’ai du mal à y croire.

Claire me voit soucieux, elle se méprend :
- Mon chéri, c’est bien ce qu’on voulait ? Bon d’accord, ce n’est pas encore l’idéal, mais t’en fait pas on va y arriver. Ne fait pas cette tête.
- Non, c’est pas ça.
- Qu’est ce qui ne va pas ?
- Tu as joui.

Un peu de mauvaise foi, mon ton trop brusque l’a fait sursauter :

- Oui … Enfin non.
- J’ai pas rêvé, tout de même.
- Ne me dis pas que tu n’as pas compris, mon chéri.
- J’ai très bien compris. Tu as aimé le caresser, il t’a baisée, il t’a faite jouir. Ton orgasme était assez clair.
- T’es bête. Tu me connais, je ne suis pas aussi rapide. J’ai voulu en finir au plus vite avec lui. Tu n’as pas remarqué que j’ai simulé. Sentir en moi un autre que toi, je n’y arrivais pas,
- Pourquoi alors ?
- Pour ne pas le vexer. Il était gentil. Ça lui a fait tellement plaisir.
- Ouais !
- Mon petit mari jaloux, je t’aime.
- Jaloux, Pfff ! Ça m’a fait bizarre, voilà tout.

Nous restons silencieux quelques minutes, chacun dans nos pensées. Claire se réfugie dans mes bras :

- Je suis désolée mon chéri.
- Mais non, je suis ridicule. C'est moi qui t'entraîne dans cette galère et après …
- T'inquiète. En te regardant, j'ai vite compris ce que tu ressentais. J'ai simulé pour en finir, autant pour toi que pour moi.
- C'est ma faute. Je m’en veux de t’avoir demandé ça. Je sais bien que le plus compliqué, c'est pour toi. C'est toi qui ...
- Chut ! Me dit-elle en mettant son index sur ma bouche, index vite remplacé par ses lèvres.

Avant de partir, nous prenons une douche ensemble. Elle me lave, je la lave, elle m’embrasse, je la caresse… elle me taquine, histoire de me faire oublier les images qui inévitablement hantent mon esprit.

Ma main descend sur son ventre, son pubis. Je pars à la recherche de son point G, je ne sais pas où exactement, mais l’effet est immédiat, en se serrant dans mes bras, son cri me vrille les oreilles.

Nous nous sourions, mais je suis perplexe :

- Merci mon chéri.
- Tu… Tu as…
- Que vas-tu imaginer. Non jamais avec toi, je n’ai jamais simulé. Embrasse-moi au lieu de dire des bêtises.

En arrivant chez nous, je veux en avoir le cœur net. Je m’enferme dans les toilettes. Pour tester, une seule solution, une petite branlette comme quand j’étais ado. Le résultat n’est pas concluant, il est vrai qu’à l’époque je feuilletais des magazines de cul. Je me souviens que j’étais régulièrement interrompu par ma mère qui trouvait que l’occupation des lieux avait assez duré.

Tout en continuant à me branler, je revois Claire, nue sur le lit. Je le revois lui peloter les seins, je la revois empoigner la queue de ce mec. Je pensais qu’elle allait le sucer, elle a hésité. Si elle l’avait pris dans sa bouche, je l’imagine refermer ses lèvres, le sucer, deviner son plaisir… Je suis fou, qu’est-ce que je raconte ? Dans ma main, Popaul prend une certaine consistance, pas vraiment comme j’aimerais, mais enfin ça me redonne le sourire. Ça me rappelle l’autre con avec son histoire de mari candauliste, il n’avait peut-être pas tort, après tout. Oh ! si Claire savait, que penserait-elle de moi ?

Des coups frappés à la porte me tirent de mes pensées :
- Eh ! Tu t’es endormi ?

Bien entendu, la semaine suivante, j’en ai discuté avec Chloé. Ses réponses ne m’ont pas apporté la solution miracle que j’espérais. Je me souviens de ses paroles :

- C’est un bon début pour une première fois.
- Pour une première fois ? Combien en faudra-t-il ?
- Autant que nécessaire. Souvenez-vous des paroles du philosophe : « Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage. Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage. »
- Ouais ! Il est philosophe lui, pas moi. J'aurais bien voulu l’y voir.
- Persévérez. Ayez confiance. Il faut créer un choc, un vrai, violent. Vous avez réagi, c’est encourageant. La prochaine fois sera la bonne.

La prochaine fois, la prochaine fois ! Y aura-t-il une prochaine fois ?


A suivre . . .

---oOo---

Y aura-t-il une prochaine fois ?
Claire osera-t-elle recommencer ?
Laurent pourra-t-il rebander ?...

Vous le saurez prochainement en écoutant sur nos ondes la suite de votre feuilleton préféré, SAUVETAGE ou les aventures de Claire et de Laurent… Et maintenant une page de réclames ...



- Alors Lætitia, t'as plus d'idées, c’est ça ?
- Ah si plein ! Mais, pas certaine qu'elles te plairont mes idées Patrick. (PP06, ne pas confondre).
- Tu veux qu'il bande, oui ou non ?
- Bah écoute, au début oui... Là, maintenant, tout de suite, j'hésite. Je le vois bien ne ... et elle qui se ...
- Euh ... t'es sûre là ?

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