La Hase Et Le Rapace - 2

Lundi matin. Il est neuf heures deux quand le téléphone de l’homme joue « les yeux revolver », sonnerie qu’il a créée exprès pour Evelyne. Il n’a pas le temps de répondre et c’est tant mieux se dit-il. Il a bien d’autres soucis en tête. Entre autre, il se demande comment il va occuper sa journée. Il déteste les vacances. Elles ne sont pour lui que source d’ennui et de désœuvrement. Comme il n’a guère d’amis et que ceux-ci travaillent, son choix d’activité est limité en cette fin d’octobre. Par acquis de conscience plutôt que dans l’espoir de décrocher une occupation, il téléphone aux boîtes de prod avec lesquelles il travaille durant l’été. Mais la période n’est pas propice pour elles non plus. Il raccroche sur la promesse d’un montage délicat la semaine suivante. C’est toujours mieux que rien. Il est tellement préoccupé par son inactivité que le tintement qui lui annonce un message vocal, le surprend. Il a complètement oublié l’appel manqué d’Evelyne.
Il écoute le message et pense assez vite que sa journée est sauvée. Une invitation à déjeuner n’est pas pour lui déplaire. D’autant qu’il se remémore avec délices, la pipe qu’elle lui a prodigué. La bouche de cette femme est un régal, pense-t-il. Qu’en est-il du reste de son corps ? Il sait désormais qu’il ne va pas tarder à le découvrir.
La voix d’Evelyne lui dicte son adresse et l’heure du rendez-vous. Le fait que l’invitation se passe chez elle ne laisse aucun doute sur la suite des événements. Il s’en réjouit et confirme sa venue par un texto des plus concis : « OK ! »

Mufle !
Bien entendu, la jeune-femme ne s’attendait pas à autre chose de la part du bonhomme. Elle espérait néanmoins que sa goujaterie se serait un peu estompée après l’apothéose du dimanche matin. Elle se leurrait. Les hommes ne changent pas aussi vite. En fait, les hommes comme lui ne changent pas, un point c’est tout. Ce constat ne l’empêche pas de mettre les petits plats dans les grands et de préparer un repas qu’elle souhaite à la fois délicieux et suggestif.

Au menu : jambon de Bayonne sur lit de melon (ce n’est pas vraiment de saison et elle a dû courir les marché pour trouver un melon acceptable en ce milieu d’automne) ; filet de sole sauce meunière et pour finir pommes au four et leur coulis de caramel.
La présentation qu’elle réserve à ces mets ne devrait laisser aucun doute sur ses intentions. Dans le cas contraire, le « verre » dont elle a eu l’idée pour lui permettre de goûter l’armagnac grand cru, emportera sans aucun doute, l’adhésion de l’homme qu’elle convoite.
Une compilation de slows pour parfaire l’ambiance. Et le tour sera joué !
Il est déjà presqu’onze heures quand elle se rend compte qu’elle n’a rien prévu pour l’apéritif. Comme elle n’a pas le temps de le faire elle-même, elle se précipite chez le traiteur qui aura bien quelques petits fours à lui céder…
Mais nous sommes lundi, le traiteur est fermé. Elle court donc de boulangerie en boulangerie. Pour rien. Et quand elle revient, catastrophe ! Les filets de sole qu’elle avait mis à bouillir avant de les poêler, ne sont plus que des miettes. Plus question de leur donner la forme aphrodisiaque qu’elle leur destinait.
Tant pis ! Même s’il ne lui reste qu’un quart d’heure avant l’heure du rendez-vous, elle trouvera bien une idée pendant qu’elle s’habille. Une robe blanche, courte et près du corps. Pas de soutien-gorge, elle veut que ses tétons, déjà dressés, soient bien visibles. Porte-jarretelles, bas et string, complèteront le tableau et se devineront sans mal sous l’étoffe légère qui la moule comme une seconde peau.
La solution qu’elle a trouvé pour le plat de résistance ne la satisfait pas mais c’est trop tard, l’homme sonne à la porte.
Ce sont ses yeux qu’elle voit en premier. Ses yeux et leurs mille petites dents qui la dévore déjà. Elle a faim, elle aussi. Elle se jette à son cou et l’embrasse sans aucune attention pour le bouquet qu’il porte et qu’elle écrase entre leurs deux corps. Elle l’entraîne vers le salon, le pousse dans le canapé et le chevauche.
Jamais encore elle n’a eu envie d’un homme comme de celui-là. Elle extirpe sa queue du pantalon et s’empale dessus. Pas besoin de le sucer pour le durcir, pense-t-elle. Il est comme moi, il a envie…
L’homme et ravi de la tournure des événements même si laisser l’initiative à la jeune-femme ne lui convient pas tout à fait. Il se laisse faire cependant. Il savait, avant d’arriver qu’ils baiseraient dans les cinq minutes mais il ne voyait pas les choses ainsi. Il s’imaginait la prenant par derrière, debout, contre la table ou dans la cuisine, elle en appui sur le plan de travail…
Evelyne a écarté son string pour libérer le chemin de son intimité. L’homme la regarde faire, sans un mouvement du bassin. Si elle veut être la seule artisane du plaisir à venir, il n’y voit pas d’inconvénient. Bien au contraire ! Il n’ignore pas à quel point être maître à bord, donner et prendre du plaisir sans participation de l’autre, décuple la jouissance. Or, il veut la voir jouir. Il l’avait pris pour une hase et il s’était trompé, elle est renarde : fine rusée et sensuelle. Mais paraissant ce qu’elle n’est pas pour attirer entre ses pattes, l’animal qu’elle convoite. Ainsi, en joueur fair-play, il lui laisse l’initiative. Ce n’est que la première manche…
Evelyne adore être à la manœuvre, mener l’assaut, diriger. Mais les mains de l’homme lui manque, elle voudrait les sentir crocher ses fesses, griffer son dos, pincer les pointes de ses seins… Elle n’ose pas lui demander aussi crument. Caresse-moi, murmure-t-elle simplement. Et l’homme s’exécute. Ses doigts agiles survolent le dos de la femme, viennent effleurer la tendre peau de son fessier, moulent d’une paume suave le galbe de ses seins… elle, ralentit sa cadence pour être en accord avec la douceur des caresses. Elle voulait aller vite, jouir dans une explosion. Mais le rythme des mains est bien meilleur. Elle sent dans son corps se former les vaguelettes qui deviendront raz-de-marée. Et elle se laisse aller à la tempérance du moment.
Deux doigts qui pincent son téton et les vagues grossissent. Elle soupire d’aise. Une claque sur la fesse et elle accélère ses mouvements. Elle ne mène plus la danse, même si le bassin de l’homme reste immobile, c’est lui désormais qui dirige. Un doigt explorateur glisse dans sa raie, frôle son anus. Oh le salaud ! Il sait… Il sait que j’adore ça…! Pense la jeune-femme qui soupire de plus belle. Une pression légère et le doigt est entré. Il ne s’enfonce pas, il s’emballe d’un mouvement tournant. Et la vague déferle, propulsant Evelyne contre le torse de l’homme, qui la repousse pour admirer l’orgasme qui emporte sa partenaire.
Lui s’étonne de n’avoir pas joui. Il n’est pas si performant d’ordinaire, surtout lors du premier assaut : il a toujours si faim qu’il se consume en feu de paille.
- Humm ! C’était bon ! dit Evelyne en déposant un baiser sur les lèvres de l’homme.
- Oui répond-il laconiquement.
- Mais tu n’as pas…
- Je suis d’un naturel discret l’interrompt-il.
Mais elle n’est pas dupe, elle sait bien qu’il n’a pas joui et se demande pourquoi il le lui cache…
- Tu veux boire quelque chose ?
Evelyne, elle ne sait pourquoi, éprouve le besoin de changer de sujet. Une sorte de gêne occupe son esprit, qu’elle ne comprend pas.
- C’est un billard ?
Debout à côté de la table, il passe une main négligente sur le plateau.
- Oui. Mais il a plus d’usage comme table…
- Je peux voir ?
- Bien sûr. Qu’est-ce que je te sers ? Un whisky ?
L’homme a déjà plié le premier pan du plateau et caresse tendrement le tapis du billard. Il y a vraiment quelque chose d’érotique dans ses gestes.
Evelyne l’observe tout en servant une généreuse rasade de whisky. Il l’interrompt :
- Un verre d’eau, ce sera parfait. Excuse-moi, je ne bois jamais avant dix-neuf heures, pas d’alcool fort en tout cas. Je ne sais pas m’arrêter. C’est un de mes travers, je n’ai aucune limite.
La jeune-femme range le verre dans un coin et sert un verre d’eau glacée.
Elle le lui apporte. Il le vide d’un trait.
- L’eau glacée… Un régal pour celui qui a soif.
Ce disant, il saisit la taille de la femme et l’attire contre lui.
- Tu sais jouer ? On fait une partie ?
- Je me défends, répond-elle. Mais avant il faut que je m’absente une seconde. Excuse-moi.
Elle se dégage et s’éloigne vers le fond de l’appartement. L’homme, lui, débarrasse le plateau et libère le billard.
Un américain, dommage. Pense-t-il. Je m’en satisferais.
- Un gage pour le perdant, dit Evelyne, de retour de la salle de bains.
- OK ! Prends ta queue et donne m’en une.
Je prendrais bien ta queue là où était ton doigt pense-t-elle en un éclair. Mais elle décide d’être sage et de gagner sa sodomie à la loyale.
- On joue par les côtés ?
- Ça me va. A toi l’honneur.
Evelyne s’applique. Dans sa position d’abord. Elle la veut à la fois pratique pour le jeu et tentatrice pour l’homme et le joueur. Elle se cambre, mettant ses fesses en valeur et décoche son coup.
Deux billes tombent du côté droit de la table et le 8 est allé bloquer l’accès de la dernière poche à gauche. Si elle se débrouille bien, elle gagnera la partie sans qu’il ait pu jouer. Elle se concentre donc sur le 4 qui se dirige vers le trou mais s’arrête, en équilibre sur le bord, sans y tomber. La main passe.
L’homme tourne autour de la table afin de déterminer le meilleur positionnement. La bille 8 l’ennuie, elle est vraiment très mal placée et, pour l’éviter il va devoir jouer des bandes. Il pousse la blanche d’un coup sec. Une bande, puis deux. La blanche enfin percute la 6 qui s’empoche du bon côté. Au tour de la 9 maintenant. Un coup direct avec léger effet rétro qui vient positionner la 7 qu’il rentre dans la foulée. La blanche vient se coller à la 1 et la 5 qui sont à touche-touche. Il est temps de dévoiler son jeu. L’homme grimpe sur le billard, s’agenouille sur le bord et trouve son équilibre. La queue perpendiculaire à la table, il se prépare pour un « massé ». L’inflexion courbe qu’il donne ainsi à la bille blanche projette la 5 vers la 8 qu’elle déloge sans rentrer. La 1, elle, reste sur place. La main passe.
Laissant couler sa queue, la jeune femme pousse la 2 qui, percutant la 4, la fait rentrer. Elle, qui espérait faire d’une pierre deux coups en empochant également la 2, est dépitée. D’autant que la boule blanche est allée se loger au milieu de la table. Elle se positionne, la taille collée à la table, le buste en avant. Et elle effleure une bille, qui bouge. Elle perd la main, que l’homme reprend et ne lâchera plus. En trois coups, il empoche les billes restantes. Positionne la blanche et envoie la noire dans un trou après les trois bandes réglementaires.
La jeune-femme est renfrognée.
- Passons à table, tu veux ?
Ce n’est qu’une question rhétorique et l’homme sourit. Un instant, il a dans l’idée d’exiger son gage : non ! Moi je passe à table et toi, tu me sers… pense-t-il. Mais si cette idée l’inspire, il n’en dit rien. Il ne faut pas aller trop vite et puis il a une autre envie, qu’il conserve pour le dessert.

Le déjeuner est délicieux et extrêmement évocateur : les tranches de melon entremêlées tête-bêche, stylisent sans équivoque, la position du soixante-neuf. Le jambon qui repose dessus, a pris forme humaine et, deux petites boules de melon affirment sa féminité. L’homme prend le temps de déguster sans quitter son hôtesse des yeux. Elle le lui rend bien.
Arrangées en ovale imparfait, les miettes de sole représentent les grandes lèvres d’une chatte d’où s’échappent, sous forme de sauce, une cyprine délicieuse.
En apportant ses plats, Evelyne a un air bravache. Bien qu’au tréfonds d’elle-même, elle soit rouge de confusion. Comment ai-je osé faire ça se demande-t-elle. Mais elle assume. L’homme cependant, rit sous cape, des grandes inspirations qu’elle prend pour se calmer, dans la solitude de sa cuisine.
Le repas est assez silencieux. Aucun des deux n’ose parler. Le désir est tellement palpable que la moindre parole risque d’en déclencher l’explosion. Elle comme lui sentent leurs sexes s’imbiber du plaisir de l’attente. Ils ne veulent pas gâcher cet instant. Ils mâchent, calmement, sans se perdre de vue. Elle, imagine le gage qu’il va lui imposer. Lui, imagine la réaction de la jeune-femme quand elle saura ce qu’il désire… ils se sourient. Et puis… Parce qu’il fallait bien que cela arrive, elle demande.
- Le gage…? Que désirez-vous de moi ?
Elle est prête à parier qu’il s’agit d’une pipe. Après tout, c’est un homme et les hommes n’ont aucune imagination pour ces choses-là. Ils aiment se faire sucer donc, ils se font sucer à la moindre occasion. Celle-ci est trop belle pour qu’il la laisse passer… elle ne se rend même pas compte qu’elle l’a voussoyé.
- Vous êtes bien pressée, belle dame, de savoir à quelle sauce vous allez être dévorée. Laissez-moi savourer les dernières effluves de celle que vos bons soins viennent de me faire goûter et profiter du bien-être où je suis d’en avoir eu ma part…
A vrai dire, j’hésite encore mais vous, que pensez-vous que j’ai choisi ?
Naturellement, elle n’ose pas le dire, elle devine qu’il niera avoir choisi la fellation quand bien même c’eût été le cas. Elle propose :
- Ecrivez votre choix sur un papier, ainsi, vous ne pourrez pas tricher.
L’homme rit mais s’exécute.
- Vous n’avez pas confiance en moi, je suis vexé.
Alors, quel est mon choix ?
- Une fellation… sous la table…
- Vous parieriez là-dessus ? Non ! vous me connaissez mieux que ça…
J’ai beau garder un souvenir émerveillé de celle d’hier matin, et peut-être même, parce que je garde un souvenir émerveillé d’hier matin, ce n’est pas ce que j’ai choisi. Je préfère que vous forgiez en moi, un souvenir original.
Ce que je désire de vous, belle dame, c’est un striptease…
De fait, c’est bien le mot qui est griffonné sur le bout de papier. Elle n’en revient pas. C’est sans doute le premier mec qu’elle rencontre qui exige si peu alors qu’il pourrait tout avoir.
Il poursuit en riant :
- Heureusement pour vous, il n’y avait aucun gage à la clé, je me serais laissé tenter… Ou pas ! Vous m’êtes une source constante d’idées perverses. J’aurais sans doute été plus exigeant…
- Alors, heureusement pour moi, comme vous dites…
- Oh mais, vous ne perdez rien pour attendre… je trouverai moyen d’assouvir vos désirs les plus secrets et les plus ignorés aussi…
Mais pour le moment, je veux mon striptease.
- Maintenant…
La jeune-femme est quelque peu déboussolée. Elle pensait qu’il lui donnerait un peu de temps pour se préparer, pour penser à une chorégraphie pas trop tarte, à une musique d’accompagnement… Mais non. Le goujat est de retour !
- Maintenant ! Dit-il en se dirigeant vers le canapé.
- Je vous demande deux minutes…
Evelyne s’enfuit à nouveau vers le fond de l’appartement. Elle en revient avec un CD qu’elle insère dans le lecteur. Un morceau qu’il ne connait pas surgit des enceintes. La femme se met à danser. Elle ferme les yeux pour s’imprégner de la musique et de son rythme langoureux. Son corps suit la voix de la chanteuse. Elle se déhanche, se recroqueville, se déploie, selon la mélopée. Et puis sa robe glisse dévoilant ses seins nus, menus. Les bras en croix, la poitrine en avant, elle laisse s’évader sa robe le long de son ventre, le long de sa taille. Elle ne se dévêt pas, elle laisse la musique le faire à sa place. Mordious qu’elle est belle ! Pense l’homme alors que la robe est stoppée par le porte-jarretelles. Mais que leur importe ce détail. L’homme est fasciné, c’est tout ce qui compte. Lui, ne sait plus où il en est. Elle, est arrivée à ses fins.
D’un doigt aussi agile que discret, elle libère la robe qui poursuit sa chute vers le sol. La blancheur de ses dessous, la transparence de son string, laissent l’homme sans voix. De nouveau elle le chevauche mais, cette fois ci, elle ne lui laissera pas prendre la direction des opérations. Elle cavalcade sans s’arrêter et se sert de lui comme d’un godemichet humain. Cette fois, le plaisir de l’homme explose en elle. La chaleur qu’elle en ressent l’envoie dans les sphères de l’extase. Elle est heureuse du plaisir qu’elle vient de donner. Il est comblé. Tout va bien.

Comments:

No comments!

Please sign up or log in to post a comment!