Mister Hyde - 8

- Frédéric !

Les larmes de Franck réveillèrent Frédérique en sursaut imposant une évidence à la jeune femme : Frédéric était parti. Jamais, dans le cas contraire il n’aurait laissé son fils pleurer aussi longtemps. Elle descendit et s’occupa de son . Quand elle en eut fini avec le repas, la toilette, l’habillage… elle consacra une dizaine de minutes à son thé et à l’ingestion rapide d’une tartine. En remontant, les bras chargés du petit gazouilleur, elle découvrit un message accroché à la rampe de l’escalier. Elle déposa Franck dans son par cet revint prendre connaissance de la lettre.

Elle était conçue en deux parties distinctes et d’inégales longueurs. La première, signée « Frédéric » lui annonçait qu’il était parti par le train omnibus de trois heures du matin et qu’il lui laissait la voiture, bien plus utile à une mère de famille et qu’elle pourrait, ainsi, emmener Franck où elle souhaitait tout en préservant sa santé. Elle reconnut là, la gentillesse de son homme bien qu’il tentât de la masquer sous des tonnes de raisons pratiques.

La seconde partie était plus laconique. Elle enjoignait à Frédérique de le prévenir à chaque sieste de l’ et d’attendre, nue, son appel sur skype. La phrase étant authentifiée par l’ajout de deux lettres majuscules « T. M. » : « Ton Maître ». Elle en ressentit des frissons et une vague d’excitation.
***

Frédéric débarqua à Saint-Lazare vers six heures trente du matin. Il avait somnolé dans le train mais avait besoin d’une bonne douche et de changer de fringues. Il logeait rue Molière, dans l’appartement du père, récemment décédé, de l’un de ses amis. Il ne s’y sentait pas chez lui et c’était très bien ainsi. Dans la journée, il proposerait à Pierre de lui louer l’appart, meublé comme il l’était. Tout le monde, sans doute, y trouverait son compte. Pierre, qui n’envisageait pas de vider le lieu de son contenu et encore moins de le vendre et Frédéric, qui pourrait ainsi à squatter tout en s’obligeant de tout laisser à l’identique.

Il était bien conscient de l’étrangeté de la situation : pérenniser une disposition instable tout en lui conservant l’apparence de l’éphémère, un psy en ferait ses choux gras. Mais il n’en avait cure.

Il rentra, se doucha et opta pour quelques heures de sommeil. Il prit la précaution de mettre son réveil à onze heures, trop de sommeil risquant de le tenir éveillé bien trop tard la nuit suivante.

Il ouvrit les yeux sans le secours de l’appareil. Le message qu’il espérait brillait par son absence.
***

Frédérique se déshabilla pour la deuxième fois de la journée. Il était quinze heures passées ce mercredi, Franck dormait, elle venait d’envoyer un texto à son maître. Elle n’avait aucune nouvelle de lui depuis le dimanche et elle désespérait d’en avoir aujourd’hui. Mais elle était nue, fidèle à la demande qu’il lui avait faite. Depuis le lundi, elle s’était dénudée trois fois par jour, prenant à chaque fois un screen shot à l’aide de la caméra de son ordi. Ainsi pourrait-elle prouver son obéissance aux ordres de son Maître. Elle avait été tentée de les joindre, à un message ou un courriel mais elle s’était ravisée, par crainte qu’il prît son geste pour un reproche et la punisse.

Elle fut tirée de ses pensées par la sonnerie d’un appel vidéo. C’était lui ! Elle répondit en cliquant sur l’icône verte.

- Je te vois mal, éloigne-toi.

La voix lui parvint sans l’image. Elle prit du champ.

- Je ne vous vois pas…
- C’est normal, j’ai obturé ma caméra. Puis-je savoir qui t’a autorisée à parler ?

Elle baissa les yeux sans répondre.

- J’ai décidé de modifier tes ordres. Demain, tu recevras un colis. Tu y trouveras trois paquets et une liste d’instructions. J’attends de toi que tu les suives.
Dernière chose. Ce soir, je recevrai une photo de ton cul. Imagine ce que je désire et envoie-la. Si je suis satisfait, j’oublierai ta bévue. Sinon, vendredi soir, tu n’y couperas pas.

Au fait, j’arriverais par le train de dix-neuf heures, viens m’attendre à la gare. Je te ferai savoir dans quelle tenue.

Sur ce, il raccrocha.
***

Peu importait ce qu’elle faisait, elle pensait à sa pose du soir. Quelle mise en scène attendait-il ? Elle imagina toutes sortes de scenarii mais le soir venu, elle était toujours aussi indécise. Ce n’est que quand elle fut installée en levrette, dos face à son ordi, qu’elle comprît son désir. « Ce plug, c’est ma queue » avait-il dit un jour. Or, ce qu’il voulait c’était la posséder, fusse par procuration. Elle alla chercher l’objet et l’enfonça dans son anus. Bien qu’elle mît beaucoup de douceur à la chose, l’introduction fut douloureuse. Elle aurait dû se préparer mais il était trop tard pour cela. Elle força le passage. Elle pensa, un peu tard, qu’elle aurait pu lubrifier l’instrument.

La photo plut. L’appel qu’elle reçut quelques minutes après l’expédition en fut la preuve. Il ne la garda en ligne que quelques secondes, le temps de lui dire sa satisfaction. Il n’était apparemment pas seul, il y avait du bruit autour de lui.

Elle passa sa soirée à s’interroger sur cette présence aux côtés de son Maître et la jalousie ne fut pas absente de ses réflexions. Elle finit par s’endormir, très tard. Elle avait oublié le plug.
***

Frédérique se réveilla tôt, après une mauvaise nuit. Son esprit était préoccupé et son corps mal à l’aise. Les deux états avaient une explication : un plug et un soupçon. Pour le premier, la résolution du problème fut rapide. Le second en revanche fut ren à l’arrivée du colis promis la veille par son maître. Ils contenaient bien trois sachets et une enveloppe sur laquelle était écrit : « à n’ouvrir qu’après les paquets » ; phrase affublée des majuscules « T.M. ». Pas question de déroger. Elle défit chaque surprise l’une après l’autre et les disposa sur la commode du fond puis décacheta l’enveloppe qui s’avéra en contenir trois autres chacune marquée d’un mot : Matin, Midi et Soir.
Elle se saisit de celle du matin, la plus urgente puisque Franck n’allait pas tarder à demander son lit. Elle l’ouvrit et jura comme un charretier en découvrant son contenu. Des photos. La première représentait l’objet : une chaînette terminée par une sorte de pince à chaque extrémité. Elle ignorait à quoi elle pouvait bien servir, elle passa à la deuxième page. Quatre photos, des gros plans d’une poitrine (pas la sienne) et une main d’homme (sans doute celle de Frédéric) qui ornait les tétons de la femme à l’aide des pinces. La dernière page représentait le torse féminin paré du bijou.

Le salaud ! Elle répéta le mot plusieurs fois tout en piétinant les images qu’elle avait jetées sur le sol. Ainsi, il passait ses semaines à baiser cette salope pendant qu’elle se morfondait à s’occuper de leur et à l’attendre… Elle retint un sanglot, c’eut été lui faire trop d’honneur. En tout cas, il pouvait se brosser pour qu’elle lui envoie le moindre texto et s’il osait se pointer, il serait bien reçu !
***

Le silence de Frédérique confirma à Frédéric ce qu’il savait déjà. Durant sa solitude hebdomadaire, la jeune femme se faisait des films et devenait jalouse. Les photos qu’il avait envoyées dans le colis avaient pour but de déclencher la crise afin qu’il pût, enfin, désamorcer la bombe qu’elle promettait de devenir. A vingt-deux heures, au soir du jeudi, il eut deux certitudes : une longue marche à pieds et un rude combat l’attendaient.
***

Absente à la gare. Absente de chez elle. Pas même un mot d’explication. Frédéric sourit. Il allait passer le week-end seul. D’un sens, c’était tant mieux, il avait plusieurs choses à faire et n’aurait pas Frédérique et sa curiosité dans les pattes. Finalement, le week-end s’annonçait plutôt bien.
***

Frédérique et Franck arrivèrent à la nuit tombée le dimanche soir. Aucun signe de vie dans le loft. Lassé d’attendre, Frédéric avait dû s’en aller la veille, ou en début de matinée.
Elle eut un sourire vainqueur. Qui se transforma en rictus quand il ouvrit la porte.

- Fouts le camp !

En réponse, Frédéric cracha par terre, à quelques millimètres du pied droit de la femme. Puis il fit demi-tour et grimpa l’escalier.

- Grosse colère… dit-il avec ce petit ton moqueur qu’elle détestait et qu’elle détesta plus encore, dès qu’il vit apparaître la chevelure blonde en haut des marches.
- Dégage ou j’appelle les flics…

Il se leva et vint vers elle.

- OK ! Tu veux que je parte, je pars. Je ne voudrais surtout pas que tu mentes aux flics. Parce que, corrige-moi si je me trompe, tu m’as bien demandé de venir faire quelques travaux chez toi et tu as bien emprunté ma voiture pour aller je ne sais où… tout le week-end…

Il la saisit par le poignet et la tourna face à lui, leurs fronts à quelques centimètres l’un de l’autre.

- Ecoute-moi bien ! Tant que le contrat que nous avons passé ne sera pas formellement rompu, je ne tolérerai aucun manquement de ta part. Or, tu n’as pas rompu ce contrat. C’était pourtant facile, un simple mot aurait suffi : « stop ! ». L’aurais-tu dit, écrit, chanté, dès que je l’aurais lu ou entendu, tout se serait arrêté. Tu as préféré fuir ton unique responsabilité. Tu vas être punie… Et je te jure que je vais te traiter comme une chienne !

Il la traîna jusqu’à la cheminée.

- A poil ! Vite !
***

« Si je résiste, ce sera pire… » Frédérique mourait de trouille. Il allait l’attacher, la fouetter, lui faire mal jusqu’à ce qu’elle demande grâce. Mais c’était Hyde ! Et Hyde n’avait aucune pitié. Bien au contraire, il se repaissait de sa douleur. Mais c’est lui qui l’avait trahie, bordel de merde ! C’est lui qui avait baisé une autre femme. Lui qui avait offert à cette salope les mêmes plaisirs qu’à elle… A moins, bien sûr… Et c’était pire… que cette pute en ait profité la première. Tout cela, elle le lui hurla tandis qu’il attachait sa dernière cheville. Il lui répondit par un rire et, une insulte :

- Pauvre conne !

Plus que le mot, c’est le mépris avec lequel il l’avait prononcé qui heurta Frédérique. Elle en souffrit aussi rudement que si elle eût été atteinte par la lanière d’un fouet. Elle, qui rougissait si facilement, devint pâle, vide de sang, tandis qu’elle voyait Frédéric s’éloigner. En quelques enjambées, il quitta la pièce, la laissant vulnérable, prisonnière et seule avec elle-même.

Durant les premières minutes, elle le maudit du traitement qu’il lui imposait. Et puis, le temps aidant, elle se calma, elle réfléchit… Les souvenirs, les paroles de Frédéric remontèrent peu à peu à sa mémoire. Par bribes, d’abord. Des parcelles de phrase dont le mot « jamais » était le leitmotiv. « Jamais il ne ferait ceci, jamais cela non plus… » Il lui avait expliqué ses principes de vie, la rectitude de sa pensée et de ses actions. Mais elle n’avait pas écouté, elle n’avait pas cru ses paroles, elle n’avait pas cru en lui. Alors, il lui avait tendu un piège et elle était tombée dedans comme… la « Pauvre conne » qu’elle était ! Toute cette histoire de colis et de photos, ce n’était qu’un test, une épreuve. Elle avait misérablement échoué. La meilleure preuve qu’elle avait tort sur toute la ligne, qu’il n’y avait pas d’autre femme, c’est qu’il était resté à l’attendre deux jours entiers. Il s’était montré patient, attentionné même, en ne la harcelant pas durant ces deux jours. Et elle, qu’avait-elle fait ? Elle avait fui mais surtout elle l’avait chassé, elle avait refusé de l’entendre, elle l’avait condamné. Elle s’était laissée guider par la colère et par la jalousie… De fait, elle l’avait trahie. Et maintenant elle était là, écartelée, nue, seule… Elle méritait sa punition.
***

Frédéric s’était retiré dans la cuisine où il dévorait un bouquin tout en grignotant du jambon cru et des tomates cerises. Il lut un chapitre, deux puis trois et allait entamer le quatrième quand il perçut un changement diffus dans les sons qui l’environnaient. Il y avait du mouvement là-haut ou plutôt des sanglots.

Il se déplaça le plus silencieusement possible, monta quelques marches et espionna. Comme il s’y attendait, Frédérique pleurait. Mais les larmes peuvent avoir mille motifs. Il redescendit et décida de la laisser encore un peu mariner dans son jus : lire un nouveau chapitre serait tout aussi passionnant que de s’occuper d’elle.

A la vérité, il lut en diagonale. Il avait beau se le cacher, laisser Frédérique pleurait lui était insupportable. Même s’il fallait qu’elle en passât par-là. Il ferma le bouquin et monta. Sans aucune discrétion cette fois. Il était nécessaire qu’elle sût qu’il arrivait.

Elle l’entendit mais ne modifiât pas sa position. Elle était éreintée, déjà et la séance n’avait pas commencé. Elle devait ménager ses forces et tenir, tenir jusqu’au bout.

- Je t’écoute ! dit-il alors que son visage émergeait à peine de la cage d’escalier.

Il n’avait pas de temps à perdre, soit elle avait enfin compris qu’elle pouvait lui faire confiance, soit elle était toujours enfermée dans sa colère stupide. Soit il mettrait un point définitif à cette histoire, soit il la punirait. Dans un cas comme dans l’autre, il souffrirait.
***

Maintenant, il était proche d’elle à la toucher. Les sanglots ne s’arrêtaient pas. Cela l’agaça. Il prit le menton de la jeune femme entre son pouce et son index et répéta :

- Je t’écoute !

Un filet de voix hachuré par les pleurs réussit à sortir de la gorge de Frédérique. Elle expliqua en hoquetant combien elle se sentait abandonnée quand il remontait à Paris. Elle se plaignit de son attente, souvent déçue, d’une entrée en contact. Elle insista sur les inepties imaginaires que cela créait dans son esprit. Elle avoua sa jalousie, son désespoir lorsqu’elle vit les photos. Elle admit sa bêtise d’avoir sauté à pieds joints dans ce piège. Elle présenta des excuses sans demander qu’il la pardonne. Implicitement, elle acceptait sa punition mais n’en parla pas. Surtout pas !

Lui, en revanche…

- Punition… punition… murmura-t-il. Quelle punition serait à la hauteur de ta stupidité…?
As-tu une idée ?

Une fois de plus, il la prenait au dépourvu. Elle secoua la tête en signe de dénégation.

- Heureusement qu’un de nous deux se sert de sa tête pour réfléchir et de sa bouche pour parler intelligemment. La tienne ne serait-elle faite que pour sucer et être bâillonnée tout le reste du temps ?

Question rhétorique mais qui gifla la femme aussi violemment qu’une main.

- Punition… punition… reprit-il en chantonnant. Et si je commençais par me rembourser ? Avec les intérêts bien sûr…
Tu me dois bien deux jours ?

Leurs visages étaient si proches l’un de l’autre qu’elle ne pouvait savoir s’il verrait qu’elle opinait. Elle souffla un « oui » erratique.

- Je vais donc rester toute la semaine, ainsi nous serons quittes de ce temps que tu m’as volé.

La semaine entière… Elle n’en croyait pas ses oreilles. Il allait être là tous les jours, toutes les nuits pendant une semaine entière. Son cœur fit un bond. Son visage retrouva des couleurs. Si c’était là sa punition, elle voulait bien être punie ad vitam. Elle était si contente qu’elle négligea d’écouter la suite. Si bien qu’elle ne sut pas ce qu’il attendait d’elle lorsqu’il la détacha. Le coup de martinet qu’elle reçut sur les fesses la ramena à la réalité.

- Vous manquez de constance et d’attention et vous ne respectez pas les règles que j’ai édictées. Veuillez-vous mettre en position pour la fessée… Sur le bord de la table, se sera parfait. Vous compterez les coups à haute voix et vous écouterez mes instructions. Ce sera ma dernière redite.

Les doigts crispés sur le bord de la table, le dos cambré pour offrir sa croupe au châtiment, Frédérique pinçait les lèvres en attendant le premier coup.
***

- Un…
- Deux…

Frédérique comptait. Et entre chaque flagellation, elle écoutait. Son Maître avait choisi le martinet, il n’y allait pas de main morte : son cul avait rougi dès la première atteinte. Durant la première pause, il expliqua qu’elle serait à sa disposition vingt-quatre heures sur vingt-quatre pendant les prochains jours. A la seconde, il l’informa qu’elle était condamnée, sauf contrordre, au silence absolu. Il alterna ainsi exigences et fouettements, jusqu’au dixième. Il l’invita, alors, à le remercier pour sa clémence.

Elle s’approcha à quatre pattes, s’installa face à lui, les fesses reposant sur ses chevilles, mit les mains dans son dos et attendit, bouche ouverte qu’il avance son sexe. Il entra en elle d’un coup de reins lent et profond, sans violence. Et ce fut pire. Il transperça sa glotte pour venir se loger dans sa gorge. Elle ne respirait plus, elle bavait, horriblement sans pouvoir déglutir. Il lui baisa la bouche, longtemps, à l’allure d’une tortue. Il décomposa chaque mouvement de son bassin afin qu’elle sentît pleinement l’invasion dont elle était victime ainsi que l’impossibilité d’y échapper. N’y tenant plus, elle tenta de s’extraire à son emprise, les lourdes lanières du martinet circonscrirent sa révolte.

Enfin, il lui abandonna la direction des opérations. Elle put reprendre souffle et se débarrasser de la salive qui interdisait ses caresses. Elle se montra douce et inventive. Son Maître grogna. Elle l’imita, fractionnant chaque câlin, chaque frôlement. De la sorte, elle le garderait en elle plus longtemps. Que ce fut dans sa bouche importait peu, c’était, de toutes les façons qu’il avait de la prendre, la seule qu’elle pouvait espérer.

Puis vint l’instant où tombent les barrières. Le plaisir de son Maître s’écoula sur sa langue. Elle le laissa glisser mais ne l’avala pas. Elle voulait lui montrer la joie qu’elle éprouvait en le buvant.

D’un mot, il lui fit ravaler son bonheur :

- N’exhibe pas ta réussite quand elle est à la portée de la première venue…

Puis il la planta là et alla se coucher. Depuis le lit, il lui jeta une couverture.
***

Elle se réveilla tôt, le dos perclus par la dureté du sol. Le jour poignait à peine. Elle descendit, persuadée d’être la première. Elle découvrit son Maître assis dans la cuisine. Il buvait du café et son thé était prêt.

- N’essaie pas de rivaliser avec moi, dit-il sur le ton narquois qui était la marque de Mr Hyde. Je dors peu et je lis beaucoup…
- Bonjour Maître. Se contenta-t-elle de répondre.

Il se replongea dans son livre, elle plongea le nez dans sa tasse. Et elle pâlit. Elle avait parlé… Malgré l’interdiction qu’il lui avait faite, elle avait parlé. Devait-elle réagir ou pas ? Peut-être ne s’en était-il pas rendu compte ? Mais dans le cas contraire ? Il ne lui fallut guère plus que le temps d’un battement de cœur pour décider de se dénoncer. Elle se prosterna, la croupe relevée, bras et main tendus vers l’avant, dans la position du « pardon demandé ».

- C’est bien ! dit-il. Relève-toi et tiens-moi ça.

Il lui tendit le martinet qu’elle fit mine de prendre avec les mains.

- Entre tes dents, ajouta-t-il.

Il reprit sa lecture et puis, ayant terminé son chapitre, il se leva.

- Les mains derrière la nuque, ta posture sera plus jolie.

Il contempla la jeune femme quelques secondes et fouilla dans sa poche.

- J’adore ! Cela fait ressortir ta poitrine et tu sais à quel point je l’aime. D’ailleurs, j’ai un cadeau pour elle.

Doucement, il caressa l’aréole droite de Frédérique, la pinça très légèrement, s’intéressa à la gauche de la même manière et enfin, sortit la chaînette bizarre que recelait le colis du jeudi. D’un mouvement parfaitement synchronisé, il clipsa les tétons. Frédérique ravala son cri malgré la présence du martinet qui maintenait sa bouche ouverte.

- Finalement, peut-être feras-tu une soumise convenable, dit-il en lui claquant les fesses avant de sortir.
***

- Habille-toi et vas t’occuper de Franck !

Frédéric avait juste passé la tête dans l’entrebâillement de la porte pour lui jeter des fringues avant de disparaître de nouveau. Elle enfila les oripeaux et fila voir son fils. Le petit gazouillait dans son lit, une vague de tendresse envahit la jeune mère. « Il est si doux, si patient, toujours joyeux… J’ai vraiment une chance folle », se dit-elle. Elle prit le bambin dans ses bras et le picora de baisers. Il avait besoin d’être changé, elle opta pour un bain complet.

- Hey ! Tu es encore un peu jeune pour ça !

Le garçon avait saisi un mamelon et l’emprisonnait entre ses petits doigts. Il ignorait, le pitchounet qu’il réveillait une douleur juste endormie. Elle lui fit les gros yeux mais ne put s’empêcher de rire à l’idée qu’il était le digne fils de son père.

La matinée passa ainsi, calmement. Frédéric apparaissait de temps en temps. Il en profitait pour jouer un instant avec Franck mais ne disait mot de ce qui l’occupait. Frédérique craqua et l’interrogea.

- Ça ne regarde pas la mère et la soumise doit se taire !

La curiosité de la « soumise » en fut exacerbée. Celle de la mère aussi. Il faut dire que Frédérique avait toutes les peines du monde à dissocier les deux personnes.
***

Franck s’endormit peu après le repas. Il faut dire qu’il avait passé sa matinée à chantonner et à rire avec ses parents. Ils allèrent ensemble le coucher mais sitôt la porte refermée, les jeux d’adulte reprirent leur cours.

- Tu voulais savoir, je vais te montrer dit l’homme en ouvrant une porte qu’elle n’avait jamais poussée.

Lui prenant la main, il l’entraîna dans le garage. Il la laissa un instant dans le noir avant d’allumer. L’espace n’était pas très haut de plafond mais il était large et profond. A vue d’œil, vingt mètres carrés. Ce qui effraya Frédérique c’est qu’il n’était pas arrangé pour accueillir des automobiles mais plutôt une chienne et son Maître.

- Nous serons mieux ici que là-haut.

Calme, posé, tel était le ton qu’il employa pour lui décrire chaque objet et son utilité. Elle aurait d’ailleurs l’occasion de tous les tester. Ceux-là et d’autres, qu’il apporterait au gré de sa fantaisie. Pour l’instant, il avait des doutes sur la taille de la cage. Il souhaita qu’elle s’y introduisît. Nue ! Cela allait de soi.

Cent de large, quatre-vingt-dix de hauteur, cent-vingt de profondeur, la prison en bois brut était minuscule. La trappe coulissante permettant d’y entrer ne dépassait pas les quatre-vingts centimètres de large. Il expliqua que l’idéal était d’entrer en marche arrière pour éviter de se cogner en sortant. Cela ne fit rire que lui.

- Habitue-toi ! la nargua-t-il, tu risques d’y passer du temps. Et il verrouilla le volet.

Bien que tout ne fut pas prêt dans ce donjon improvisé, il avait choisi d’en faire dès à présent les honneurs à la jeune femme. En réalité, il manquait cruellement d’idée : son imagination semblait le fuir. En enfermant Frédérique dans la cage, il évitait qu’elle s’interrogeât trop sur la suite des événements. Il relut, tout en surveillant sa prisonnière du coin de l’œil, des passages de livres érotiques dans lesquels, peut-être, il pourrait piocher des idées.

Il fit chou blanc. Ce qui était prévisible puisque le fantasme qui lui vrillait l’esprit n’était réalisable qu’avec l’aide d’une baby-sitter.

Face à tant d’adversité, il préféra passer en revue tout ce qu’il avait appris sur Frédérique ces dernières semaines.

1- La fessée : elle aime
2- Le martinet : elle aime
3- Etre humiliée : elle aime
4- Etre attachée : ça ne lui déplaît pas
5- Bandeau et bâillon : elle aime
6- Plugs et sex-toys : elle aime

… La liste n’en finissait plus et, mis à part l’enfermement dans une cage et la marche à quatre pattes, rien ne semblait rebuter sa femelle. La punir, c’était non seulement assez désagréable mais surtout épuisant. Le seul truc qui semblait efficace, c’était de la tenir à la limite du plaisir en évitant qu’elle y tombât.
***

Bien qu’elle fût munie d’un matelas de mousse qui la rendait plus confortable, Frédérique se sentait comme La Balue enclos dans la « fillette » de Louis XI. En réalité, le sort réservé au prélat par le souverain avait été plus doux que celui qu’elle subissait. Le Cardinal pouvait tenir debout dans sa cage. Elle, était contrainte à la posture d’un animal. Elle accepta pourtant son sort avec bravoure et abnégation. « Je le mérite », se disait-elle tout en sachant que cette situation ne s’éterniserait pas. Elle ressentit cependant une certaine appréhension en entendant son Maître approcher de la cage. Tel qu’elle était placée, elle lui tournait le dos. Il pouvait donc faire ce que bon lui semblait sans qu’elle reçût d’autres informations que les sons qu’il produisait. Ceux-ci ne la rassuraient pas : elle l’entendait marcher mais elle percevait aussi un sifflement dans l’air qui n’augurait rien de bon. Elle ne comprit de quoi il s’agissait que quand la languette de cuir heurta son sexe de façon rapide et répétée.

Une cravache, il utilisait une cravache pour exciter ses lèvres et sa vulve. Et cela fonctionnait ! C’était, littéralement, diabolique ! Elle écarta les jambes autant que le lui permettait l’étroitesse de la cage. Ainsi, la claquette s’insinua plus aisément entre ses cuisses et put fouetter son clitoris. Frédérique ne s’interrogea pas sur le plaisir qu’elle recevait, encore moins sur la manière. Elle était une pouliche en cours de dressage, qu’elle fût fustigée était normal et tellement… Délicieux ! Une seule chose manquait à son ravissement, la joie de pouvoir gémir. Car elle n’oubliait pas le silence auquel elle avait été condamnée : un seul souffle, et l’enchantement cesserait. Elle le savait et refusait que cela arrivât. Elle pinça fortement ses lèvres, celles de sa bouche, tandis que les autres béaient de contentement. Bientôt, tout son corps s’embrasa, elle gigota comme une damnée, se cognant sans vergogne aux parois du réduit où elle était enclose. La jouissance montait, montait et de ne pouvoir l’exprimer l’augmentait encore. Elle était sur le point de basculer, elle n’attendait qu’un mot de son Maître pour plonger dans l’ivresse. Mais le mot ne vint pas et les frappes cessèrent.

Frustration ! C’était cela sa punition. Elle s’affala, désemparée, malade de bonheur inassouvi et de tout ce désir qui ne quitterait plus son ventre.
***

L’après-midi fut dur, la soirée plus encore. Frédérique ne comptait plus les montée et les chutes que Frédéric lui avait imposées comme autant de vengeances perverses. Pour la deuxième fois, elle s’allongea sur le sol pour dormir et la dureté de sa couche la divertit de ses envies. Intérieurement, elle en remercia son Maître quand elle s’éveilla, mieux reposée qu’elle le crût possible.

Forte de l’expérience de la veille, elle s’agenouilla devant lui quand elle le vit dans la cuisine. Ainsi put-elle prendre son petit déjeuner sans crainte d’une nouvelle sanction. Frédéric ne lui en dit mot mais il apprécia à leur juste valeur les progrès qu’elle faisait. Il attendit qu’elle ait fini de se nourrir pour se faire tailler une pipe puis il la mena au donjon où il put réveiller ses sens.

Le timing fut parfait ! Elle était au bord de l’extase quand Franck se rappela à leur bon souvenir. Dépitée, Frédérique alla materner.

L’après-midi les mena en forêt, distante de quelques kilomètres. Durant le trajet, Frédéric exigea que sa femelle s’assît sur son cul nu. Il voulait voir sa chatte rose et luisante pendant qu’il conduisait. Le ton, sans concession et les termes employés par son Maître, excitèrent la jeune femme plus que de raison. Elle lui obéit en souriant.

Frédéric poussait le landau, Franck dormait et Frédérique marchait à leur côtés en sentant la cyprine s’écouler de son sexe. A leur arrivée dans le petit coin tranquille où ils avaient garé la voiture, Frédéric avait énergiquement doigté sa soumise. Il avait profondément enfoncé ses phalanges dans son sexe tout en malaxant de la paume le mont de vénus et le clitoris de la jeune femme. Naturellement, elle savait qu’il ne l’autoriserait pas à jouir et qu’il la contraindrait à le suivre, dehors, pantelante de désir. Mais elle n’attachait plus autant d’importance à la frustration à laquelle il la condamnait. Désormais, elle la voyait comme autant de promesses pour les jouissances à venir. Et puis, il était là, près d’elle, il la choyait. Cela valait toutes les frustrations du monde.

Il l’entraîna dans des chemins de plus en plus étroits et mal dégrossis qui semblaient mener vers nulle part. et c’est au milieu de nulle part qu’il s’arrêta. Délaissant le landau, il la prit par l’épaule.

- Regarde ! lui dit-il. Regarde comme cet endroit est calme, désert. Parfait pour que je t’y et que je t’y baise. Mais là, tout de suite, j’ai très envie de t’enculer… As-tu envie de m’offrir ta croupe… ?

Oooh ! Ces mots résonnèrent dans l’esprit et le corps de la femme comme autant de piqûres électriques. Evidemment qu’elle le voulait et la présence du petit dormeur n’y changeait rien. Elle avait faim, tout son corps avait faim du sexe de son homme. Elle le voulait en elle et peu importait que ce fut devant, derrière ou dans sa bouche.

Il exerça une très légère pression sur son épaule. Elle comprit d’instinct ce qu’il attendait d’elle. Une seconde plus tard, elle était à quatre pattes dans l’humus, la croupe offerte, prête à le recevoir.

Il releva la jupe sur les reins de sa chienne et posa le gland sur l’orifice bridé. Il poussa, lentement puis stoppa, le nœud à peine entré dans l’étroit orifice. Quelques secondes, il savoura la résistance de l’anus face à l’invasion de son sexe puis il entra, d’un coup de reins brusque et sauvage.

Elle avait réussi à garder le silence. Celui de sa gorge mais aussi celui de son corps qu’elle avait tenu immobile malgré la douleur que provoqua l’étape marquée par son Maître. Frédérique était heureuse puisqu’il était en elle ! Et, s’il avait interrompu son mouvement, c’était simplement pour lui faire savoir à quel point leur union lui importait, combien elle méritait qu’il s’y attardât.

Il la pilonna, soucieux de son seul amusement mais conscient qu’il ne pourrait pas interdire la jouissance à sa partenaire. Il avait trop faim d’elle pour être en mesure de la contrôler ; il n’arrivait pas même à se contenir, lui.

Elle mordit son poignet, étouffa dans son poing les cris qui s’évadaient, tenta, sans résultat, de donner à ses hanches l’apparence du calme, essaya, sans succès, de cesser de trembler. Elle jouit et, comme fétu de paille elle fut emportée.

Il l’avait prise, possédée, craché en elle sa délectation. Pourtant il n’était pas repu. Il la voulait encore, encore… Cependant, il la quitta, contrariant son désir de voir leurs corps fondre en un seul. Il ébaucha une caresse qu’elle ne sentirait jamais et réintégra son armure.

- Nettoie-moi ! ordonna-t-il.
***

Mercredi et jeudi passèrent. Frédéric, enfermé dans le garage-donjon paracheva les lieux et consacra le temps restant à Franck. Fatigué, le soir, il se couchait et dormait tôt. Frédérique veillait, seule, se demandant quelle faute elle avait pu commettre pour qu’il la battît froid. Elle dut attendre un jour entier avant d’obtenir sa réponse.

Juste avant qu’elle se rhabille, ce vendredi après-midi, Frédéric lui annonça la levée de sa punition. Il lui octroya même le droit de parler tout son soûl jusqu’à la fin du dîner. Après, lui confia-t-il, ils étrenneraient le donjon…
***

Escarpins d’un noir satiné (les plus hauts de sa garde-robe), bas de soie noire quinze deniers, porte-jarretelles de fines dentelles et string bizarroïde bien que coordonné. Telle était la panoplie revêtue par la jeune-femme pour l’inauguration. Elle s’était, selon les exigences de son Maître, habillée à la place même où elle devait l’attendre. Depuis, elle était immobile dans la position prescrite : debout, les jambes écartées d’une trentaine de centimètres, les mains derrière la nuque, les coudes dans la prolongation exacte des épaules, ses longs cheveux ramenés en chignon.

Rasé de près, l’absence de barbe rendait à Frédéric une jeunesse qui troubla la jeune femme. Il était beau, vêtu de lin noir, pantalon large et chemise de corsaire, à l’image de Guillaume Le Testu, de Jacques de Sores ou de Jean Bart.

Il déplaça quelques objets, dont le valet de nuit sur lequel avait reposés les artifices dont était découverte Frédérique. Puis, satisfait, il claqua dans ses mains.

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