Collection Zone Rouge. Matricule 100 605. Début De La Saison I (1/3)

• Bonjours Aleksandra, quel effet ça fait de prendre l’avion demain pour revenir à Varsovie, votre pays pour recevoir 40 ans après la médaille d’honneur de la ville.
Votre bravoure lors du premier soulèvement du Ghetto va enfin être reconnu !
Mais avant dites-nous les circonstances qui vous ont amené à ce moment héroïque ?

Héroïque, c’est un bien grand mot, mais je veux bien vous expliquer ma vie quand tout a commencé.
Je venais d’avoir 20 ans quand la rumeur nous est parvenue que les Allemands envahissaient les pays voisins au leur dont certains de leurs amis.
Nous étions le 1er septembre, j’ai perdu la mémoire de toutes ces dates, mais celle-là je suis obligée de m’en souvenir, c’était celle de ma naissance.

• Qui étiez-vous et que faisiez-vous dans ce pays.

Je suis née dans le petit village de Zgersky au nord de Lodz.
Nous étions 60 habitants environ.
Inutile de le chercher sur une carte, il a été intégralement détruit, il est devenu un village martyre.
Mes parents à ma naissance m’ont appelé Aleksandra avec un K.
Dans ce village, ils étaient paysans, quelques terres, deux vaches, un cheval, des brebis et deux cochons sans compter les poules et les canards et une oie qu’il tuait pour la Paque juive.
À oui, un chien, c’était mon ami et il me manque.
Nous avions de quoi manger, potager et volatiles étant la base de notre alimentation.
J’oubliais, nous avions des pigeons.
J’étais toujours triste quand papa en attrapait pour les et les plumer avant que maman nous les fasse cuire dans notre vieille cuisinière à bois avec de la graisse d’oie et des petits pois.
Mon père chassait dans ce coin de pays où les bois et les forêts nous apportaient un surplus de nourriture.
Tous au village étaient juifs et tous nous pratiquions cette religion.
Après-guerre, je suis restée la seule rescapée répertorier vivante.
Il y avait plusieurs jours que nous entendions des avions allemands passer au-dessus de nos têtes, mais miraculeusement nous en avions réchappé.


Papa et maman avait repris l’habitude de retourner à l’office du vendredi dans notre petite synagogue construite par nos anciens.
Elle était vieille de plusieurs dizaines d’années.
Nous étions un village sans souci, presque heureux dans ces années-là ou nous savions nous contenter de peu.
Ce vendredi-là, j’avais prétexté un mal de ventre pour rester à la ferme.
J’ai vite été rejointe par Marek, le jeune homme fils de la ferme dite de « la rivière » à une centaine de mètres en contrebas de chez nous.
J’aimais Marek, garçon de 21 ans, futur fermier lui aussi avec des bras comme ceux de bucherons qu’il était à ses heures surtout pendant la période d’hiver.
Les hommes coupaient le bois l’hiver pour approvisionner le village chaque année.
Ce bois était vital pour nous afin de pouvoir manger et nous chauffer.
Nous nous connaissions depuis l’école et c’est un jour où il nous a livré notre quantité pour l’année suivante, le temps qu’il sèche, que l’amour a fleuri entre nous.

• Aleksandra, avez-vous couché avec lui ?

Surtout pas, ça aurait été péché, en ce temps-là, c’est vierge que nous nous présentions devant le rabbin.
À ces explications pleines d’images me reviennent en mémoire.
Ce soir-là, j’ai juste accepté une main caressant ma joue et un baiser au coin de mes lèvres.
Quand il est reparti, l’office devait finir et mes parents allaient revenir.
La seule chose dont je me souvienne, il passait son temps à me répéter avant de me quitter, qu’il nous fallait fuir vers la mer Baltique pour rejoindre le Danemark.
Je lui avais dit non, refusant d’abandonner mes parents.
Je le regardais s’éloigner dévalant en courant la pente dans ce début de nuit quand le bruit des avions et les premières bombes sont tombés sur notre village.
Quelques secondes, je suis restée littéralement pétrifiée, surtout qu’autour de moi aucun endroit assez profond pour me cacher.
Nous avions des granges, des celliers, mais point de cave.

Les bombes tombaient si drues dans un vacarme assourdissant que lorsque j’ai vu Marek entrer chez lui, je me suis couchée sur le sol fataliste.
Combien de temps s'est-il passé avant que je voie l’une d’elles pulvériser la ferme de mon amour.
Impossible de le dire, j’ai émergé quand je me suis rendu compte du non-retour de mes parents.
Je me suis relevée, les oreilles sourdes du vacarme fait par les avions et les bombes m’ayant miraculeusement épargné.
J’avançais dans le brouillard et l’odeur des bombes ayant explosé.
Toutes les fermes avaient été détruites.
Quand je suis arrivée près de notre bâtiment religieux, l’une d’elles l’avait complètement pulvérisée et elle brûlait encore par endroits.
Tout le village était mort sous une seule bombe.
Pas tout à fait, j’ai entendu gindre, j’ai soulevé des morceaux du toit pour découvrir Hanna, le visage en partie arrachée.
Hanna, ma rivale il y a quelques mois, toutes les deux nous étant retrouvée en concurrence pour l’amour de Marek.
Je l’avais emporté, de façon éphémère quand je vois la bombe tomber sur sa tête.
Dans ce temps-là, nous étions des paysans sédentaires et trouver un homme bon travailleur était très limité, afin d’éviter les risques de consanguinité et j’avais eu cette chance.
Je les prise dans mes bras, je caressais son front épargné.

• « Aleksandra, je dois soulager ma conscience, je sais que je vais mourir.
• Qu’as-tu à confesser mon amie ?
• J’ai fait l’amour avec Marek, un jour où je me promenais le long de la rivière, il était seul et je l’ai rejoint.
C’est lui qui m’a embrassé, mais c’était si bon que je me suis laissé faire.
Je savais que je trahissais notre amitié, mais j’étais jalouse, qu’il est un penchant pour toi.
À partir de ce moment, j’ai perdu la notion du temps et quand je suis revenue à moi, son sexe me labourait jusqu’à ce qu’une liquide chaude sorte.
• L’avez-vous fait une seule fois ?
• Non, nous l’avons fait chaque fois qu’il savait que tu étais retenue par ton père à votre ferme.

Pardonne m... »

Ce fut son dernier mot sans avoir terminé.
Elle a rendu son dernier souffle.
Comment lui en vouloir, elle a dû le rejoindre près de celui qu’ils étaient tous venue vénérer ?
Quelque part, j’ai été cocu avant le début de ma vie de couple.
Maintenant à part moi tous les habitants étaient morts.
Bien sûr, il faut ajouter Marek lui aussi mort et reposant sous l’amas de gravats de sa ferme, inutile de lui en vouloir le très haut s’en était occupé.
Je venais miraculeusement de tout perdre, mes parents, mon amour et tout de même ma copine à deux endroits de notre village.
Une nouvelle fois, je revois les images de Marek courant vers ce qui aurait dû être notre chez-nous ?
Pourquoi ai-je mis du temps à prendre la décision de le suivre ?
En ce moment, je reposerais avec lui pour l’éternité dans cette ferme que je voyais pour la dernière fois au moment où j’ai franchi la porte de notre propre maison.

• Vous avez été dans l’impossibilité de les sauver à ce que je comprends.

Pour ma famille et mes amis, tous avaient brulé, j’ai cru reconnaitre mes parents étroitement enlacés et je les ai laissés ainsi, je mesure 1 mètre 60 et à cette époque je devais peser 50 kilos, toute mouillée.
Quant à Marek, les kilos de matériaux qu’il avait reçus sur la tête doivent encore le recouvrir.
J’ai ramassé quelques affaires et j’ai décidé de prendre la route de Varsovie.
Avant j’ai fait le tour des fermes en partie épargnée
J’ai pensé aux vaches et autres animaux que j’ai laissés partir à l’aventure.
Dans le fracas des bombes, comment croire à ma chance mais la suite de mon histoire va montrer que c’était une chance relative.

• Aleksandra, évitez de te vous disperser, allez à l’essentiel, qu’était-il arrivé aux animaux !

Quand je suis partie voir pourquoi mes parents mettaient du temps à revenir de la synagogue, je me suis rendu vers notre grange ou nos animaux se trouvais.

Tous morts, une bombe avait tout pulvérisé, grange, écurie et bêtes, même les pigeons, à l’exception de l’un d’eu blessé, mais vivant encore.
Pour la première fois de ma vie, je me suis senti obligé de lui serrer le cou mettant fin à ses souffrances.
Tu me dis de rester concentré sur le sujet, mais je m’aperçois que j’ai oublié un fait capital, je suis blonde aux yeux bleus !

• Et alors beaucoup de femmes sont blondes aux yeux bleues.

Je vois que celui à qui je raconte mon histoire ignore bien des choses sur notre vie dans ces années-là.
J’étais blonde hors dans mon village, tous étaient bien bruns.
J’étais la seule à être née blonde.
Toute ma jeunesse, j’étais raillée par les autres filles sauf Hanna, c’est pour cela qu’elle était mon amie.
Ces filles disaient que ma mère était une salope qui avait couché avec un de ces salopards de Boches.
Elles me disaient que leurs mères racontaient que vingt ans plus tôt, un jeune allemand avait travaillé dans notre ferme et avait couché avec la fille de la maison.
C’était ma mère.
Avant la venue de ce garçon, elle fréquentait déjà mon père et lui aurait fait croire que j’étais de lui.

• C’était une salope !

Nullement, il faut se remettre dans l’époque, être fille-mère, surtout dans notre religion, s’était presque se condamner au bucher, tout du moins être banni du village.
Après avoir été avec l’allemand ignorant à jamais son nom, voyant qu’elle avait fait une bêtise, elle s’est empressée de coucher avec papa afin qu’il accepte sa paternité.

• Mais vous êtes née blonde aux yeux bleus comme ce jeune allemand.

Exact, mais elle a eu la chance que papa soit follement amoureux d’elle.
Il faisait le coup de poing chaque fois qu’au café du village on lui disait qu’il était un cocu consentant.
Il était aussi fort que Marek, qui lui ressemblait un peu.
J’ignore si je dois vous avouer cela, depuis la mort de tous ces gens, je me demande si Marek avait une possibilité d’être mon demi-frère.
C’est vrai que lorsque j’étais petite, chaque fois qu’il le pouvait, mon père allait pêcher dans un petit bois dans la rivière à quelques mètres de la ferme de mon amour disparu.
Ils nous ramenaient du poisson.
Bref, si ça avait été ainsi, je pense que papa se serait opposé à notre mariage.
La disparition de tous ces acteurs de ce moment de ma vie clôt le sujet.
Mon baluchon au bout des bras, j’ai pris la direction de Varsovie.
Un moment, j’ai senti l’envie d’enterrer dans notre rite tous ces malheureux, mais comme je l’ai dit, je me serais tuée à la tache.
Et surtout j’avais peur qu’après les avions, ce soient les soldats de ce cher Adolphe qui débarque.

• Qu’alliez-vous faire là-bas ?

Chercher du travail, il fallait que je continue à vivre et aussi la protection de la grande ville.
De Lodz à Varsovie, il y a environ 150 kilomètres, je marchais depuis deux jours.
Je me suis arrêté les pieds en sang dans un village lui aussi dévasté par les bombes, eux avaient eu de la chance, l’auberge avait été épargnée.
Mes pieds étaient en sang, c’est là qu’ayant enlevé mes chaussures, une voiture s’est arrêtée.
Un homme d’une soixantaine d’années en est descendu et est venu s’assoir non loin de moi dans ces jours de septembre où la chaleur était toujours là.

• « Vous semblez blessée mademoiselle, je suis médecin !
Je viens de venir visiter ma maman qui habite ici et je repars pour Varsovie ou j’ai mon cabinet, laisser moi voir vos pieds. »

Je pensais avoir trouvé un moment de chance.
La suite va me faire déchanter...

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