Le Patron De Mon Mari, Version 2, Partie 1

Ça faisait plus d’un an que Romain était au chômage. Ça nous était tombé dessus juste après qu’on ait appris que j’étais enceinte. On était pourtant persuadé que son cdd finirait en cdi après tous les compliments fait par son patron. Mais finalement «  la société n’a pas besoin de personnel supplémentaire » lui a-t-il dit. Alors on a galéré à tout préparer pour l’arrivée de Rosi. Il était hors de question de mettre un terme à la grossesse et hors de question qu’elle manque de quoi que ce soit.

On a économisé le moindre sous, fait les brocantes et on a réussi à l’accueillir dans les meilleures conditions possibles : 7 mois plus tard, on était les heureux parents de cette jolie petite fille. On a profité au maximum de mon congé maternité. J’aurais aimé le prolonger avec un congé parental mais impossible avec le seul chômage de mon chéri. Alors je suis retournée bosser 10 semaines après avoir mis au monde ma fille.

Un jour, Romain est allé acheter un livre pour son frère. Il s’est rendu dans le magasin culturel de la ville. Et en sortant, il a vu qu’ils recherchaient un vendeur. Il a demandé à parler au gérant et quelques jours plus tard ce dernier le rappelait pour une journée d’essai. En rentrant le soir, il m’annonçait que la journée c’était très bien passée, que ça lui avait plu et que le gérant était satisfait. Il commençait le lendemain matin.

Il a bien sûr fallu trouver une solution de garde pour Rosi. Pas facile en dernière minute, mais encore une fois on y est arrivé.

Mais tout ça a eu un effet néfaste sur notre couple. Certes, financièrement on a pu souffler un peu au début, mais on avait encore du mal à garder la tête hors de l’eau. Puis on s’est retrouvé à travailler à 2, avec moins de temps pour s’occuper de la maison, mais il y avait toujours autant à faire. Alors je me suis sacrifier : je me lève plus tôt pour emmener à pied ( on n’a qu’une voiture ) la petite à la MAM avant d’aller au boulot, je vais la chercher toujours à pied le soir, je m’occupe de la maison, prépare le repas en attendant qu’il rentre du boulot tout en m’occupant de Rosi.



Et au final on est tous les 2 épuisés, on passe nos soirées chacun à ses occupations, puis quand vient le moment d’aller se coucher, on ne profite même plus d’avoir du temps à nous pour retrouver notre intimité. On est passé d’un couple sexuellement hyperactif à limite passif.

Romain se plaignait souvent de son patron : il était assez exigent , parfois à la limite du légal sur les horaires par exemple. Il leur demandait beaucoup d’investissement et de rentabilité. Mais en même temps il lui était reconnaissant de l’avoir engagé si rapidement, certes en cdd, mais c’était toujours ça. Puis surtout, il appréciait de voir qu’il lui faisait confiance et prenait le temps de lui apprendre le métier.

Après quelques semaines, j’ose enfin passer au magasin avec la petite voir Romain. J’ai déjà croisé pas mal de fois Thomas, son patron, mais toujours quand on se croisait en voiture sur le parking. J’avoue qu’il est plutôt canon avec ses cheveux châtains en bataille, ses yeux bleus malicieux et sa barbe courte bien taillée. Et on voit qu’il le sait. Il a ce regard arrogant. Et il aime se faire voir : belle voiture grosse cylindrée, montre tape à l’œil, lunettes de soleil de grande marque. Mais il a toujours un sourire quand il me salue.

Ce jour-là, j’arrive au magasin avec Rosi dans les bras.

- Hey, salut ! Me lance Thomas. Coucou toi, ajoute-t-il en caressant la joue de ma fille.
- Salut, je réponds timidement.
- Romain est dans la réserve. Il ne devrait plus en avoir pour longtemps.
- Je vais l’attendre dehors, dis-je en me tournant vers la sortie.
- Non, au contraire, reste. Je voulais justement te parler de quelque chose. Mais faudrait que ça reste en très nous si tu veux bien…

Je me sens très mal à l’aise soudainement. C’est le genre de situation que je n’aime absolument pas. Romain et moi n’avons aucun secret l’un pour l’autre.

- Je crois pas que …
- Tu sais même pas ce que je veux te dire.
Alors écoute moi. Je pense que ça pourrait t’intéresser.

Il s’arrête de parler un instant et moi je reste figée. J’ai toujours été intimidée par les gens qui ont son charisme.

- Romain m’a dit qu’en ce moment c’était un peu difficile les fins de mois. Et son cdd arrive à son terme. Et j’aurais besoin qu’une jolie fille comme toi m’accompagne à un dîner demain soir. Ce serait dommage que le papa de cette pitchounette se retrouve au chômage parce que sa maman décline mon invitation….

Je reste bouche bée un instant. Au même moment Charlotte passe près de nous.

- Dis Charlotte, je crois que Rosi veut venir chez toi, lui dis je en lui tendant la petite.
- Tu viens ma puce, on va regarder les livres pleins de couleurs.
- Et Charlotte, tu oublieras pas de faire les vitrines ce soir, y a des fois je me demande à quoi je te paye, lui aboie Thomas.

Ce mec est vraiment un connard. Il pourrait au moins avoir la décence de ne pas lui parler comme ça devant les gens. Une fois que Charlotte s’est assez éloignée de nous pour ne plus entendre, je réponds à Thomas.

- Je rêve ou vous me faites du chantage ? En gros, soit je suis votre pute d’un soir, soit mon mari perd son job…
- Alors déjà, je voudrais que tu me tutoies. Et ensuite je t’ai pas parlé de baiser, je t’ai juste demandé de m’accompagner à un dîner. Mais sur le fond, oui je te fais du chantage, soit tu viens, soit Romain peut se remettre à la recherche d’un nouveau boulot.
- Tu es d’une arrogance… comment tu peux me demander une chose pareille ? Je suis sûre que tu claques des doigts dans la rue, t’en as 10 des nanas pour venir avec toi… alors pourquoi moi ?
- Je sais pas, mais sache que je finis toujours par obtenir ce que je veux. Et je veux que tu viennes avec moi. Alors tu diras à ton mec que tu vas manger avec des copines puis que vous allez faire un bowling. Je t’attendrai sur le parking du magasin.

Alors que je m’apprête à protester, il me rend une carte de visite.


- Là-dessus, y a mon numéro de portable, j’aimerais que tu m’écrives pour que j’ai le tien. Et maintenant plus un mot, ton mari arrive.

Romain nous rejoint et passe un bras autour de ma taille avant de m’embrasser.

- Coucou ma chérie.
- Coucou. Thomas était justement en train de me dire tout le bien qu’il pense de toi. Et Rosi est avec Charlotte.
- Je vais la chercher et on peut y aller.

Il part de l’autre côté du magasin.

- Tu vois que tu peux mentir à ton mari. Il n’y a vu que du feu.

Je fulmine. Je ne laisse rien paraître mais j’ai envie de lui exploser au visage.

Toute la soirée je ne fais que penser à sa ‘’demande’’. Je ne peux pas accepter ça. Mais si je ne le fais pas, on va se retrouver dans la merde de nouveau. Déjà qu’on roule pas sur l’or en travaillant à 2…

Le lendemain matin, je me décide à envoyer un message à Thomas, à contrecoeur vu que j’aurais préféré qu’il n’ait pas mon numéro.

« je peux pas faire ça à Romain. On est marié, je peux pas lui mentir… stp fais pas ça… »

« alors retour à la case départ. Dommage pour Rosi »

« t’es vraiment un salaud. Tu joues la carte de ma fille… »

« je te demande un dîner, pas de tromper ton mari, c’est pas la fin du monde… »

Je ne lui réponds plus.

« je te dis à ce soir alors ? »

Je ne réponds toujours pas.

« Julie ??? »

« à ce soir… »

Quand Romain rentre manger à midi, je lui annonce que ma meilleure amie m’a appelée pour passer la soirée entre filles avec d’autres amies.

- Pas de soucis ma puce, je m’occupe de Rosi. Ça te fera du bien de sortir un peu, ça fait un moment que tu n’a pas pris du temps pour toi.

Je m’en veux encore plus de lui mentir quand je vois comme il est gentil avec moi. Je pensais que ce serait aussi facile de lui mentir.

Dans l’après-midi, quelqu’un sonne à la porte de la maison.
Quand j’ouvre la porte, je n’en crois pas mes yeux.

- Tu as l’air surprise de me voir, me dit Thomas.
- Oui, en effet…
- Je suis juste passé pour t’apporter ça pour ce soir, me dit-il en me tendant un sac d’une boutique chic de la ville.
- T'as peur que je sois pas assez bien sapée pour ton dîner ?
- C’est un resto étoilé, c’est mieux si tu as une tenue qui va avec le lieu. Mais du coup tu te changeras au magasin. C’est pas une robe ni des chaussures pour aller faire un bowling.

Il remonte dans sa vouture avant même que je n’ai le temps de lui réponde. Il se prend pour qui ce type ? Il croit vraiment que tout lui est dû.

Allez faut que je prenne sur moi, c’est juste une soirée, un petit dîner et on n’en parle plus. Je peux bien faire ça pour que mon chéri garde son travail.

À 19h30, je suis prête à partir. J’ai glissé une petite pochette à maquillage dans mon sac à main. J’embrasse ma fille et mon mari avant de partir. J’ai l’impression d’être un monstre en faisant ce que je m’apprête à faire. Dans le garage , j’att le cabas en papier craft que j’ai caché derrière la boîte à outils et le mets dans le coffre.

Quand j’arrive sur le parking, Thomas est adossé à la porte de la réserve du magasin.

- Tu as pris la bonne décision, me dit-il en ouvrant la porte.
- En même temps je n’ai pas vraiment eu le choix.
- Je t’attends là.

Quand je vois la robe qu’il m’a amenée, je n’en reviens pas. Elle est splendide. Jamais je n’aurais pu m’offrir une telle tenue. Je l’enfile, ainsi que les escarpins qui vont avec. Je me maquille rapidement et me recoiffe.

- Tu es très jolie, me dit-il quand je le rejoins à côté de la voiture.
- Tu n’avais pas besoin de dépenser une telle somme.
- J’aime les belles choses. Et cela peut te paraître excessif, mais pour moi ce n’est rien.

Et tiens, prends toi ça dans les dents, j’ai de l’argent, toi pas. C’est d’ailleurs pour ça pour que je me retrouve dans cette situation.

- Et sinon, je peux en savoir plus sur ce dîner ?
- On va manger dans un restaurant italien étoilé. Avec mes parents.
- Quoi ? Je manque de m’. C’est une blague.
- Absolument pas. Ça fait des mois que je n’ai pas vu mes parents. Et ma mère a du mal à accepter que son fils unique ne veuille pas se caser. Alors il y a quelques temps je lui ai dit que j’avais quelqu’un. Et elle veut absolument la rencontrer.
- Et pourquoi moi ?
- Parce que tu es une fille bien. Une fille normale.
- Merci… quel compliment, dis-je, ironique.
- Ce n’est pas péjoratif, au contraire. Tu es une jolie fille, mais pas une bimbo poufiasse. Tu es quelqu’un avec un travail respectable, pas une fille qui court après un mec pour son pognon.
- Et pourquoi tu veux pas te caser ?
- Parce que de 1, j’ai pas le temps de m’investir dans une relation. Avec le magasin j’ai énormément de boulot. Et de 2, j’attire que des bimbos poufiasses qui courent après un mec pour son pognon.
- En même temps, quand on est un con arrogant, prétentieux, râleur, capricieux et j’en passe, faut pas s’étonner de n’attirer que ce genre de femmes. Les autres sont assez intelligentes pour savoir qu’il vaut mieux éviter les mecs comme toi.
- Je vois que tu manies assez bien l’art du compliment toi aussi, merci.
- Mais de rien. Et c’est totalement péjoratif…

Il se rabat sur une voie de bus et pile.

- Stop, je sais que tu me détestes, que tu n’as pas envie d’être là… mais est-ce qu’on peut faire un tout petit effort le temps de ce putain repas ? Je te demande pas de m’apprécier, mais s’il te plaît, j’aimerais bien qu’on ne se prenne pas la tête.

J’aquiesce d’un hochement de tête et il redémarre.

- Sois toi-même. Oublie juste que tu es mariée et fais comme si tu avais l’habitude de train de vie. J’ai dit à mes parents que tu avais une petite fille d’une précédente union et que tu étais secrétaire dans un cabinet comptable. Je pense pas qu’elle te pose plus de questions que ça. Et au pire, brode, je te suis.

Mais qu’est-ce qui m’a pris de m’embarquer dans cette histoire ? Et si je croise quelqu’un que je connais ? Je commence à paniquer. Faut que je me calme, je le fais parce qu’il le faut si je veux qu’on s’en sorte. Romain ne peut pas retomber au chômage, on ne peut pas se le permettre.

Quand on arrive devant le restaurant, je suis déjà mal à l’aise. Mais quand on passe la porte, je ne me sens vraiment pas à ma place. Tout ce luxe. Le personnel est habillé bien plus chic que je ne pourrais jamais le faire même pour mon propre mariage. La déco est plus que luxuriante. Et quand je vois les gens installés aux tables, je me sens plus que minable.

Thomas nous annonce au maître d’hôtel.

- Un instant je vous prie, lui demande ce dernier.

Thomas en profite pour passer un bras autour de la taille et se penche à mon oreille.

- Détends toi, on dirait une gamine dans un magasin de jouets. Arrête d’écarquiler les yeux comme ça. Et par pitié, si j’ai un geste tendre envers toi, ne me repousse pas devant mes parents s’il te plaît.
- Que veux tu dire par geste tendre ?
- Je te rassure, je ne compte pas te galocher devant eux, j’ai un minimum de d’éducation. Je parlais plutôt de te prendre la main, ou de passer un bras autour de tes épaules, grand max t’embrasser dans le cou histoire d’être crédible.

Je n’ai pas le temps de lui donner mon avis que le maître d’hôtel est de retour.

- Vos parents sont déjà installés monsieur Manelli.

Il nous invite à le suivre. Je me sens de plus en plus mal.

- Thomas, mon fils ! Que c’est bon de te voir, et en si bonne compagnie de plus, lui dit sa mère avant de l’embrasser.
- Maman, je suis content de te voir aussi. Papa, ça faisait longtemps.

Il enlace ses parents un instant.

- Je vous présente Julie, leur dit-il en m’attirant doucement contre lui.
- On avait tellement hâte de vous rencontrer. Depuis le temps qu’on attendait que notre fils se case.
- Bonsoir, ravie de faire connaissance. Il m’a beaucoup parlé de vous.

Un serveur nous tire nos chaises et les repousse quand nous asseyons. J’ai toujours trouvé ça choquant. Puis il nous apporte 4 flûtes de champagne. Nous trinquons.

Sa mère prend la parole, me laissant ainsi le temps de me détendre. Elle me raconte l’enfance de Thomas. Il est né dans une famille aisée. Sa mère est avocate et s’occupe des affaires de personnes fortunées. Son père est lui aussi chef d’entreprise : il dirige une chaîne de restauration rapide healthy qui a des enseignes à travers toute l’Europe. Je comprends mieux son attitude : il a été élevé dans un cadre où le luxe est la normalité, où il a toujours eu ce qu’il voulait quand il le voulait.

Quand elle me demande comment son fils et moi nous sommes connus, j’inspire profondément avant de me lancer.

- Je suis allée dans son magasin pour acheter un livre. Je ne le trouvais alors je me suis adressée à la première personne que je trouvais. Et c’était Thomas. Ça a été un vrai coup de foudre. Je n’ai pas osé l’aborder, j’en suis restée à ma recherche de livre. Il m’a répondu qu’il ne l’avait pas en stock et qu’il devait le commander. J’ai appris ensuite que c’était faux, il l’avait, mais il n’avait pas trouvé d’autre solution pour avoir mon numéro.

Elle me pose quelques questions sur mon boulot ( j’enjolive un peu les choses ) et sur ma fille. J’essaie de rester assez vague à ce sujet.

Quand le serveur nous apporte la carte, je suis assez étonnée de constater que le restaurant a conservé la pratique de donner une carte aveugle aux femmes. J’en conclus que les prix doivent être conséquents, et je suis gênée. Je parviens à jeter un œil à celle de Thomas, et j’ai des sueurs froides en voyant les tarifs. Le plat le moins cher est à 72 euros.

Je pose ma main sur celle de Thomas et la serre légèrement. Il tourne le visage vers moi et je lui souris comme si j’étais folle amoureuse de lui. Je glisse mon visage dans son cou et fais mine de l’embrasser pour lui parler à l’oreille.

- Je peux pas accepter… c’est hors de prix.
- Chut…

Puis il retourne à la lecture de sa carte.

Quand le serveur vient prendre nos commandes, Thomas décide pour moi.

- Pour mademoiselle et moi ce sera des raviolis aux langoustines.

Ses parents optent pour des plats de viandes.

Je suis plus détendue durant le reste du repas. L’alcool doit aider un peu.

De retour dans la voiture, il ne dit pas un mot. C’est moi qui brise le silence.

- J’ai été très gênée que tu choisisses pour moi…
- Tu ne m’as pas laissé le choix. C’est pas pour rien qu’on donne une carte sans prix aux femmes… c’est pour que les hommes puissent les inviter sans quelles soient gênées. Tu étais sur le point de commander le plat le moins cher de la carte, mes parents auraient pu se douter des raisons. Et franchement, c’est vraiment pas le meilleur plat de la carte.

C’est effectivement ce que je m’apprêtais à faire.

De retour sur le parking, je suis sur le point de sortir de la voiture.

- Bien trouvé ‘’notre rencontre’’. Je crois que ça a convaincu ma mère. Tu as un certain talent pour le mensonge.
- Ce n’est pas vraiment un compliment à mon sens.
- Désolé…

Le silence se réinstalle.

- J’ai passé une bonne soirée, me dit-il en posant sa main sur la mienne.
- On n’a plus besoin de faire semblant, dis-je en ôtant ma main. Mais aussi j’ai passé une agréable soirée finalement.

Et ce n’est pas tout à fait faux : certes, je n’ai pas aimé le contexte, mais il a été très agréable toute à soirée, ses parents sont extrêmement gentils. Je n’ai jamais aussi bien mangé de ma vie.

Au moment où je veux lui demander de m’ouvrir la porte de la réserve pour que je retourne me changer, il approche son visage de mien. Je tourne la tête.

- Thomas, non.

Il pose sa main sur ma nuque et tente de m’attirer à lui.

- Julie, s’il te plaît, j’en ai eu envie toute la soirée. Juste un baiser, c’est rien, je te demande pas de tromper Romain.

Je le gifle violemment.

- Pour moi ça l’est.

Il retire sa main. J’en profite pour sortir de la voiture et monter dans la mienne. Je fonce à la maison. C’est quand la porte du garage se referme que je réalise que je porte encore la robe que Thomas a achetée.
Je croise les doigts pour que Romain dorme déjà. Sinon il va falloir que j’invente un mensonge.

Quand j’entre dans la maison, toutes les lumières sont éteintes. Je file dans la salle de bains, fourre la robe en boule au fond du panier à linge. Je démêle mes cheveux et me démaquille avant de me glisser sous les draps au côté de mon mari.

Le lendemain matin, alors que Romain est au travail et Rosi à la sieste, Thomas sonne à la porte.

- Qu’est-ce que tu veux ? Lui dis-je sans même le saluer.
- Tout d’abord m’excuser, j’aurais pas du essayer de t’embrasser hier soir. Comme je te l’ai dit, j’en ai eu envie toute la soirée. Et je pouvais plus me retenir de le faire.
- En effet, tu n’aurais pas du. Ça prouve juste que t’es vraiment un salaud.
- Et ensuite pour te ramener tes fringues vu que tu les as laissées dans la réserve, ajoute-t-il sans relever l’insulte. Ça aurait été con que Romain tombe dessus.

Je récupère le cabas qu’il me tend et lui claque la porte au nez.

Dans la journée il m’envoie un sms.

« je suis pas un salaud… en tout cas pas avec les femmes. Je suis pas le genre de mec à collectionner les filles. Je ne cherche pas à m’envoyer en l’air à droite à gauche. C’est les filles qui viennent vers moi. Et je suis toujours franc avec elles : si il se passe quelque chose, c’est ment l’histoire d’un soir. Au mieux, si doit y avoir plus, c’est uniquement pour s’envoyer en l’air de temps en temps. Elle accepte c’est bien, elle refuse c’est bien aussi. J’ai jamais ment aucune fille à faire quoique ce soit avec moi… je voulais juste que les choses soient claires… »

Je ne prends même pas la peine de lui répondre.

La semaine suivante, je suis en congé. Un après-midi, quelqu’un sonne à la porte.

- Madame Gellati ?
- Oui. C’est pour quoi ?
- C’est monsieur Manelli qui m’envoie. Je suis coiffeuse, me répond une blonde platine.
- Je crois que vous devriez partir…
- Il m’a dit que vous diriez ça et m’a demandé d’insister.

Je lève les yeux au ciel et souffle. Puis je l’invite a entrer et lui propose une tasse de café qu’elle accepte. Je rédige rapidement un message à l’attention de Thomas.

« qu’est-ce qu’il y a ? J’étais pas assez bien coiffée à ton goût ? Arrête ce genre de choses ! »

Dans la foulée mon téléphone sonne. C’est lui.

- Tu étais sublime. Mais j’ai entendu Romain discuter avec Charlotte. Il lui demandait si elle connaissait une coiffeuse pas trop chère parce que tu aurais besoin d’une coupe mais que tu n’avais pas franchement les tunes pour… alors en voilà une qui ne te coûtera pas un sou. C’est moi qui paie.
- Je ne veux pas que tu me paies le coiffeur !
- Et moi je veux, et je finis toujours par obtenir ce que je veux. Donc si c’est pas aujourd’hui ce sera un autre jour, mais tu finiras par l’avoir cette coupe. Tu as autant accepter tout de suite, comme ça c’est fait. Pense au boulot de ton mari. J’ai encore un mois avant de décider s’il aura son cdi…

Et il raccroche.

- Je suppose que Thomas vous a dit que si vous refusiez que je m’occupe de vous aujourd’hui, je reviendrai chaque jour jusqu’à ce que vous disiez oui…
- Vous supposez bien. Je crois que le plus simple c’est que je dise oui comme ça après il me laissera tranquille.
- Je pense que vous faites bien.

Elle termine son café et s’occupe de mes cheveux.

- Vos cheveux en avaient bien besoin. La grossesse et le manque de visite chez le coiffeur mes ont bien abîmés, me dit-elle en faisant le brushing.
- Ils ont bien morflé en effet.
- Vous savez, c’est un mec bien Thomas, change-t-elle brusquement de sujet.
- Si l’on met de côté le fait qu’il ne se prend pas pour de la merde…

Elle reste muette jusqu’à ce qu’elle parte. Je suppose qu’elle a prévenu Thomas de son départ puisqu’il m’envoie un message dans les minutes qui suivent.

« alors cette coupe ? »

« pourquoi tu as fait ça ? »

« parce que tu en ressentais le besoin et que je sais que financièrement vous avez plus important avec la petite. »

« et je vais dire à Romain quand il va rentrer et voir que je me suis faite couper les cheveux alors que j’avais pas la voiture pour aller chez le coiffeur ? »

« tu lui diras que l’une de tes copines a vu avec une amie à elle qui est coiffeuse à domicile et qu’elle a pu venir tout de suite… »

« tu as réponse à tout… tu m’énerves. Je te déteste »

« je trouve souvent des solutions aux problèmes. Et tu peux détester, c’est pas grave. Je sais qu’au fond c’est pas le cas. T’as juste du mal à accepter la main que je te tends »

« j’ai surtout du mal à accepter de devoir mentir à mon mari pour pas qu’il perde son boulot… »

« c’est un moindre mal, se faire chouchouter contre un travail… »

« la ferme… »

« je peux au moins voir à quoi elle utilisé mon argent ? »
« va te faire… ça te suffit pas de rabaisser en me payant une robe et une coiffure, faut en plus que tu pousses le truc à ce que je participe à mon humiliation… »

« il n’y a que toi qui y voit de l’humiliation. Moi je veux juste apporter un peu de confort à ton quotidien…  si tu ne veux pour la photo, pas grave, tu passeras bien au magasin un de ces jours… »

J’ai la rage parce que je sais qu’il a raison, que ce soit maintenant en photo ou dans les jours à venir en vrai, il verra bien le résultat.

Je lui envoie un selfie avec un regard plein de rage et un doigt d’honneur.

« quand je te dis que j’obtiens toujours ce que je veux… et même énervée tu es très jolie. Ça fait classe les mèches blondes dans le roux de tes cheveux. Ça fait ressortir tes yeux bleus. Romain a beaucoup de chance d’avoir une jolie femme comme toi… »

« pourquoi tu fais tout ça ? »

« parce que je fais toujours tout ce que je peux pour obtenir ce que je veux. Et là c’est toi que je veux… »

« tout d’abord je suis pas un objet qu’on veut avoir, et ensuite je suis mariée. Et j’aime mon mari. Tu m’acheteras pas avec des cadeaux, des privilèges… je veux pas d’un homme pour son argent… »

« j’essaie pas de t’acheter. Je veux juste te faire plaisir. Faut que je retourne bosser. A bientôt. »

Si je n’avais pas peur que Romain ne perde son travail, je lui dirais tout. Mais j’ai beau dire que je n’ai pas besoin de l’argent de Thomas, on a au moins besoin de celui qu’il met dans le salaire de Romain. Après tout, un mois c’est quoi ? Dans 8 jours je retourne au travail, il n’aura plus l’occasion de débarquer à la maison ou de m’envoyer des trucs ou quoique ce soit. Une fois qu’il aura fait le contrat, je pourrai l’envoyer sur les roses.

Comme je l’imaginais, Romain a tout de suite remarqué le changement pour mes cheveux.

- Tiens, comment t’es allée chez le coiffeur sans la voiture ?
- C’est Stéphanie. Elle a une cousine coiffeuse à domicile. Elle l’a appelée et elle a pu venir directement. Ça m’a bien arrangée parce que j’ai pas eu besoin de réveiller Rosi de sa sieste pour y aller. Et elle m’a fait un prix en plus. Ça m’a coûté 20 euros de moins que quand je ais au salon.
- En tout cas c’est très joli. J’aime bien.

Il glisse son visage dans mon cou et y dépose de petits bisous.

- Et si mangeait plus tard ? La petite est au lit. On peut en profiter pour faire des câlins…

Il éteint la plaque de cuisson et m’entraîne dans notre chambre…

Thomas, quant à lui, me laisse tranquille plusieurs jours. Jusqu’à ce jour où en allant prendre le courrier, je trouve une enveloppe non affranchie dans la boîte aux lettres. Je pose le reste du courrier sur la table de la cuisine et ouvre la missive.

C’est une carte cadeau pour un magasin de vêtements s. Il y a une carte qui l’accompagne :

‘’ Je sais que tu dois déjà être en train de t’énerver. Mais Romain a dit que tu faisais le tour des petites annonces pour acheter des fringues à la petite. Et ta fille a le droit d’avoir des vêtements neufs. Alors voilà une carte des 200€ pour lui acheter tout ce dont elle a besoin. Bises. Thomas.’’

Mais quel enfoiré ce mec ! Je fourre la carte dans mon sac à mains. Il est hors de question que je l’utilise. Demain Romain ne travaille pas, je vais passer au magasin la rendre à Thomas et lui mettre les points sur les i.

Le lendemain, je prétexte avoir promis à une amie d’aller boire un café chez elle pour partir de la maison. Et encore un mensonge, dont je suis à l’origine en plus.

Quand j’arrive sur le parking du magasin, j’envoie un sms à Thomas.

« ramène ton cul sur le parking tout de suite ! »

Il arrive par la porte de la réserve, je l’attends appuyée à la portière de la voiture.

- Je savais que c’est toi qui viendrait vers moi, fanfaronne-t-il.

En guise de réponse je le gifle de toutes mes forces.

- Tu me prends pour quoi ? Arrête ça tout de suite ! Ça n’a jamais tué personne de porter des fringues de seconde main. Je veux pas de ton argent, on peut très bien se débrouiller sans toi, je lui hurle dessus en jetant la carte sur son torse.

Il se frotte encore la joue.

- Je pensais pas que tu avais autant de force… et je voulais juste que tu puisses offrir le meilleur à ta fille. Mais puisque vous n’avez pas besoin de moi, je dirai à Romain demain que je ne pourrai pas lui faire son cdi, je trouverai bien un motif, même si je ne lui en dois aucun…
- T’es vraiment qu’un connard ! Comment tu peux te servir de ma fille pour obtenir ce que tu veux ? Tu crois quoi ? Que parce que tu m’achètes à coup de cadeaux je vais quitter Romain et te tomber dans le bras ?
- Je t’ai dit, je finis toujours par avoir ce que je veux. Si dans un mois je ne suis pas parvenu, j’abandonne, ton mec aura son job et toi ta paix, mais jusque là je continuerai. Et ne t’avise pas de refuser quoique ce soit qui vienne de moi parce que je le saurais et adieu le cdi.

Son arrogance me dégoûte. Je n’ai même plus envie de lui répondre. Je fais volte-face pour remonter dans la voiture.

- Tu oublies quelque chose, me dit-il en me tendant la carte. Et utilise la, je connais la responsable du magasin, elle me dira si tu es passée.

Je lui arrache la carte des mains sans un regard et je m’en vais.

Je m’arrête à un café pour laisser redescendre la pression et ne pas rentrer trop tôt histoire que Romain ne se pose pas de questions.

« tu devrais mettre ta ceinture, surtout quand tu démarres en trombe. Et tu n’auras qu’à dire à Romain que tu as gagné cette carte à un concours sur internet... »

Il m’énerve à toujours penser à tout.


3 jours plus tard, je suis en train de donner à manger à Rosi quand Romain rentre du travail à midi. Un grand sourire barre mon visage, jusqu’à ce que je réalise qu’il n’est pas seul.

- Coucou ma puce, j’ai invité Thomas à se joindre à nous pour le repas, sa voiture ne démarrait pas.
- Coucou mon cœur, salut Thomas.
- Salut, me lance-t-il avec un sourire plein d’arrogance.

Voilà que mon mari devient son allié malgré lui.

Romain vient m’embrasser puis dépose un bisou sur la tête de Rosi.

- Viens, je termine de lui donner.

Je me lève pour aller voir la cuisson des pommes de terre qui accompagnent la blanquette que j’ai préparée. Thomas en profite pour venir me faire les bises. J’essaie d’être assez distante, mais pas trop pour ne pas éveiller les soupçons de mon mari.

Durant les minutes qui suivent, un silence lourd s’installe : Romain s’occupe de Rosi, je m’affaire devant la plaque de cuisson et Thomas est sur son téléphone. Quand la petite a fini son repas, Romain la met dans son parc pour qu’elle joue un peu, puis il s’installe à table avec Thomas et ils parlent boulot.

- Le repas est presque prêt, je vais aller coucher la petite, dis-je au bout de 15 minutes.
- Non, laisse ma chérie, j’y vais, dit Romain en se levant.

Moi qui voulais éviter d’être seule avec son patron…

Il prend la petite dans son parc et monte à l’étage. Quand on n’entend plus les bruits de pas, Thomas vient à côté de moi.

- T’es super jolie aujourd’hui, me chuchote-t-il.
- Parce que d’habitude je suis moche, merci, je lui réponds en me décalant d’un pas sur le côté.
- Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire, et tu le sais très bien. Ça te va bien quand tu te maquilles un peu, j’aime bien.
- C’est pour mon mari que je pomponne, pas pour toi…

Je me tourne pour prendre des assiettes dans le meuble.

- Laisse, je vais mettre la table, me dit Thomas en me les prenant des mains.
- Je suis sûre que ta voiture n’a rien. Tu as menti à Romain…
- Ça aurait pu être le cas, mais non. D’ailleurs je suis bête de ne pas y avoir pensé, j’aurais pu te voir plus tôt..
- Oui, ben tu aurais pu décliner l’invitation de Romain, y a un fast-food à moins de 200m de ton magasin…
- Figure toi que je l’ai fait mais il a été plus qu’insistant, me disant que tu faisais de la blanquette et que quand tu faisais ce genre de plats, tu en faisais toujours un peu plus au cas où. Dis toi que je suis ce au cas où, me lance-t-il avec un regard charmeur.
- Tu m’agaces.

Il s’approche de moi et place sa main sur ma joue avant d’approcher ses lèvres des miennes. Je tente de le repousser, mais il se fait insistant.

- Thomas, arrête, j’ai pas changé d’avis depuis l’autre jour… lui dis-je en poussant sur son torse.
- Moi non plus…

Ce sont les bruits de pas dans l’escalier qui le stoppent. Il att des verres dans le meuble derrière lui et retourne s’asseoir.

- Thomas tu aurais du laisser, j’aurais mis la table en descendant. En tout cas merci.
- C’est moi qui vous remercie tous les deux de m’accepter à votre table.

Les garçons ont l’air de se régaler. Quant à moi, je n’ai plus très faim. La présence de cet homme sous mon toit me tape sur les nerfs. Vivement la fin du mois que toute cette histoire se termine.

Le lundi suivant, je reçois un bouquet de fleurs au travail. Je n’ai même pas besoin de regarder la carte qui l’accompagne pour savoir de qu’il vient. Je signe le reçu du livreur et m’apprête à jeter le bouquet tel quel dans la poubelle, mais il m’en empêche.

- On m’a demandé de m’assurer que vous ouvriez l’enveloppe qui est glissée dans les fleurs...

De mauvaise grâce, je le fais.

‘’ Coucou ma jolie,

Je sais que tu as repris le boulot et donc le rythme effréné qui va avec… je me suis dis que te faire chouchouter par une esthéticienne de ferait du bien. Tu as donc rendez vous mercredi après midi, à l’institut qui se trouve au bout de la rue où tu bosses. Profite ! Et n’oublie que je saurais si tu n’y vas pas. C’est la journée de repos de Romain et je sais que tu ne travailles pas le mercredi. Tu n’as qu’à prétexter aller boire un café chez une collègue.

Je t’embrasse. ‘’

Vous pouvez y aller, je l’ai lue.

Il repart sans un mot.

Je e vais à nouveau devoir mentir à Romain. Je commence à saturer.

‘’ je n’ai pas besoin de me détendre, je sors de cong酒’

‘’ on a toujours besoin de se détendre. Je t’aurais bien fais ce massage moi-même, mais tu refuses que je t’embrasse, alors je n’imagine pas si j’essaie de poser les mains sur toi…’’

‘’ ne t’avises même pas d’essayer un jour…’’

‘’je suis sûr que tu penseras le contraire un jour…’’

‘’ l’espoir fait vivre…’’

Quelques jours plus tard, en rentrant du travail, j’aperçois l’Audi RS de Thomas tourner au coin de la rue. Arrivée devant la porte d’entrée, je trouve un paquet sur le pas de la porte. Je le ramasse et ouvre la porte.

Je pose Rosi dans son parc, mon sac sur le meuble à chaussures. J’enlève mes sandales et m’installe sur le canapé avec le paquet. Il a innové : pour remplacer la carte habituelle, il a écrit directement sur la boîte.

‘’ Pour remplacer celles qui ont pas mal de kilomètres à leur actif ‘’

Je soulève le couvercle et découvre une paire de baskets d’une marque très connue.

Je saisis mon portable sur la table basse et lui écris un sms ;

‘’ comment tu as su que les miennes sont mortes ?’’

‘’ j’ai fait quelques recherches sur toi sur les réseaux sociaux. Depuis la naissance de la petite, tu t’es faite plutôt discrète, mais avant ça tu postais pas mal de trucs. J’ai vu la publication où tu dis que tes pompes sont HS…’’

‘’ je ne cours plus depuis un moment…’’

‘’c’est l’occasion de t’y remettre si tu en as envie’’

J’entends le garage s’ouvrir : Romain arrive. Je me précipite à l’étage. Il ne faut pas qu’il voit les chaussures. Je les planque au fond de mon armoire avant de redescendre rejoindre mon mari.

- Ça été ta journée ma puce ? Me demande-t-il après m’avoir embrassée.
- Comme n’importe quel autre jour, je ne m’épanouis plus dans ce job, mais je vais faire avec on n’a pas le choix. Et toi ?
- Thomas était un peu chiant. Je crois qu’il a une nana en ce moment, ce qui est assez étonnant vu que Charlotte m’a dit qu’il est pas du genre à se mettre en couple, et je pense qu’elle doit lui prendre un peu la tête. Il était de mauvais de poil et collé à son portable toute la journée. Il est même parti du magasin une heure plus tôt avant de revenir dans dire un mot…

Je ne sais pas quoi lui répondre… il ne s’imagine pas un seul instant que la fille qui prend la tête à son patron, c’est moi… mais pas parce qu’on est ensemble, au contraire. C’est parce que je le repousse. Allez, plus que 13 jours et tout ça à s’arrête.

Le 10eme jour avant ma ‘’libération’’, quand j’arrive au bureau, je trouve un petit paquet devant mon ordonnateur. Sur mon clavier, il y a une enveloppe avec l’écriture maintenant familière de Thomas.

‘’ Coucou beauté,
Pas de sms aujourd’hui, appelle moi quand tu auras ouvert le paquet. Quitte à me faire en engueuler, je préfère encore que ce soit avec le doux son de ta voix plutôt qu’en message…’’

Qu’est-ce qu’il a bien pu encore trouvé… je défais doucement le bolduc : je commence à prendre plaisir à découvrir ses cadeaux, la situation m’agace mais ces derniers me touchent, il cherche à combler des besoins que ma famille a, ou à me soulager de mon quotidien.

Cette fois-ci, je tombe des nues et laisse tomber l’écrin sur mon bureau de surprise. Je fouille dans mon sac et l’appelle. Il décroche alors que la première sonnerie n’a pas fini de retentir.

- Tu vas pas me dire que tu avais ton téléphone en mains en attendant que je t’appelle ?
- Non du tout, j’étais en train de consulter mes mails.
- Et comment tu as fait pour le paquet m’attende ce matin ?
- J’ai soudoyé la femme de ménage qui s’occupe de vos bureaux le matin. Elle a été difficile à convaincre, j’ai du lui dire que c’était pour faire une surprise à ma petite amie pour son anniversaire.

Je reste muette une seconde .

- Premièrement, je ne suis pas et ne serai jamais ta petite amie. Et deuxièmement, comment tu sais que c’est mon anniversaire ?
- Je te l’ai dit hier, je me suis renseigné sur toi… et sinon, elles te plaisent ?
- Elles sont magnifiques, mais tu as conscience que je ne pourrais jamais porter ces boucles d’oreilles ? Elles vont rester dans leur écrin au fond d’un tiroir. Elles sont bien trop chères pour que je puisse me les payer. Tu n’aurais pas dû.
- Contrairement à tous les autres cadeaux que je t’ai fait, ça ce n’était pas prévu, justement pour cette raison. Mais ça été plus fort que moi : je suis allé dans une bijouterie faire réparer ma montre et quand je les ai vues dans la vitrine, je t’ai toute de suite imaginée avec… je suis sûr quelles t’iraient à merveille. D’ailleurs, je pense avoir pour toi une occasion de les porter…

Par pitié, pas un autre ‘’rencard’’. Je ne veux pas refaire semblant d’être en couple avec ce type.

- Vas-y, développe. Mais je m’attends au pire… je souffle.
- Je croyais que tu avais finalement passé une bonne soirée…
- Certes, mais j’en peux plus de mentir à Romain.
- Il y a un moyen très simple de mettre fin à tout ça Julie. Cède à mes avances.
- Jamais. Alors maintenant dis moi ce que tu veux encore.
- Une photo, de nous deux…

Je ne m’attendais pas à une telle demande. Je pensais plutôt à un autre dîner, ou un truc dans le genre.

- Pourquoi tu veux une photo ?
- Pour ma mère. Elle me tanne depuis qu’elle t’a rencontrée. Elle nous a trouvé, je cite, ‘’trop mignons, le couple parfait…’’ et veut absolument à ses copines le bonheur de son fils.
- De toute façon, je crois que je n’ai pas trop le choix, non ?
- En effet. Du coup, je passe te récupérer quand tu sors du boulot pour te ramener chez toi. On en profitera pour faire une belle photo…
- Je te demanderais juste de te garer dans la rue perpendiculaire à celle où je bosse, mes collègues n’ont pas besoin de me voir monter dans la voiture d’un autre homme que mon mari…
- Ça me va, du moment que je te vois.

Et il raccroche.

Je passe ma journée à appréhender de devoir voir Thomas ce soir… j’ai tout le temps peur que quelqu’un nous voit et que Romain l’apprenne. Pourtant, dans le fond je ne fais rien de bien méchant. Après tout, je ne l’ai pas trompé. Certes je lui cache des choses, mais je n’ai pas couché avec ce type, je ne l’ai même pas laissé m’embrasser. Mais j’ai l’impression de le trahir…

A 17h, je quitte le bureau et me dirige au carrefour à droite de l’immeuble. Je le vois appuyé à l’aile avant de sa voiture. Il porte un polo blanc sur un jeans bleu foncé, des baskets New balance violet foncé aux pieds et ses lunettes de soleil Dolce Gabana sur le nez. A cet instant, je me dis qu’il est vraiment beau, on dirait presque un mannequin en train de poser pour un magazine de mode. Je ne peux m’empêcher de me dire que je rendrais toute les filles jalouses si j’acceptais de me promener à son bras.

Il me sort de ma rêverie quand il frôle ma joue du bout des doigts après s’être approché de moi.

- Je rêve ou tu me matais ? Dit-il en riant.
- Pas du tout, je lui réponds en mentant. J’étais justement en train de me dire à quel point tu étais vaniteux !
- Toujours autant de compliment dans votre bouche, Madame, ironise-t-il.

Il dépose un baiser sur ma joue. Ce contact ne me plaît pas. Je dis pas, il est appréciable de se faire courtiser, surtout par un si bel homme alors que je ne suis qu’une fille quelconque. Mais son comportement m’horripile au plus haut point, vivement que tout cela cesse.

- Allez monte, me fait-il.

Je m’installe dans sa voiture que je trouve bien trop bling bling. On voit qu’il est fier de conduire une telle voiture.

- On va aller se poser dans un parc pour faire cette photo, j’ai dit à ma mère qu’on allait souvent se promener, que tu aimais bien ça.

Quand on arrive, en sortant de la voiture, j’att l’écrin à bijoux au fond de mon sac à mains.

Voyant que je peine à les fermer, Thomas se propose de m’aider à boucler le fermoir des boucles d’oreilles. Je retiens des mèches de cheveux. Il en profite pour déposer un baiser sur ma nuque.

- J’accepte déjà beaucoup de choses Thomas, évite d’en r s’il te plaît.
- Désolé, souffle-t-il, visiblement sincère.

Il m’entraîne vers un banc au bord d’un petit plan d’eau en m’attrapant la main, entrelaçant ses doigts aux miens. Il se tourne vers moi, un sourire collé aux lèvres. Il est encore plus beau quand il sourit. On dirait un . On dirait qu’il est heureux.

Il s’assoit sur le banc en pierre, et me demande de le rejoindre. Je me mets assise à côté de lui. Il sort son portable de sa poche, passe son bras droit autour de mes épaules et j’approche ma tête de la sienne. Il passe l’appareil photo de son téléphone en mode selfie. Je me force à sourire et il prend la photo.

- Une deuxième, au cas où ? Me demande-t-il.

J’accepte. Je refais mon sourire , mais cette fois il ne sourit plus, il tourne légèrement la tête, et tout en regardant l’écran, il dépose un bisou sur ma joue.

- Tu peux me ramener maintenant ? Je lui demande. Faut que j’aille chercher la petite à la MAM.
- Si tu veux…

Il me dépose devant la porte. Je sors de la voiture et claque la portière sans même lui dire au revoir. Je prends la direction de la MAM puis récupère ma fille. Romain rentre une vingtaine de minutes plus tard que moi.

Comments:

No comments!

Please sign up or log in to post a comment!