Luce, Bourgeoise Adultérine Malgré Elle (3)

Les malheurs n'avaient pas tué son charme mais l'avait endurci


Résumé des épisodes précédents
Luce Saint-Sauveur, devenue bourgeoise provinciale au prix d'un mariage aux conditions plus que suspectes, se voit entraînée dans une consultation gynécologique inédite qu'elle aborde avec terreur pour en sortir bouleversée par la résurgence d'un plaisir refoulé pendant une quinzaine d'années.
En sortant de chez le médecin, elle se remémore les conditions qui l'ont amenées à se donner, en 1944, à Paul Desmond, espion de la résistance dans la police d'occupation, qui lui a révélé, au péril de sa vie, les conditions dans lesquelles son mari l'avait cruellement trahie.


3- La victime devient l'actrice de son destin


Quinze ans après l'incarcération inique de Pierre Desmond, Luce reçut enfin un courrier de l'homme pour qui elle éprouvait une reconnaissance et un amour absolus. Il lui annonçait qu'il avait bénéficié d'une grâce présidentielle sans espoir d'obtenir une réhabilitation pourtant légitime, compte-tenu de l'impossibilité d'une telle démarche tant que les responsables de son arrestation pendant l'épuration disposeraient d'appuis aussi puissants. Parmi ces derniers, Pierre désignait bien sûr le mari de Luce, Henri Saint-Sauveur. Les preuves que Desmond avait réunies pour signaler sa trahison ne pouvaient être utilisées sans éclabousser son épouse et sa famille politique cart tout aurait étouffé par le pouvoir. Le plus douloureux pour ce résistant de l'ombre était que les responsables les plus odieux de son arrestation furent ses propres camarades qui, protégés ou planqués à l'étranger pendant l'occupation, sans pouvoir se réclamer de faits glorieux, bénéficièrent à la libération des postes importants qu'ils leur auraient été difficile de revendiquer si certains véritables héros de la résistance n'avaient pas été mystérieusement éliminés ou diffamés injustement. Paul appartenait hélas à cette catégorie.

Il lui fit part ensuite d'une nouvelle qui lui déchira le coeur et fit disparaître en elle toutes les espérances qu'elle avait fondé sur son retour possible. Les quinze années de captivité l'avaient épuisé et transformé en un moribond rongé par une tuberculose qui ne lui donnait plus que quelques jours à vivre. Il ne souhait pas qu'elle le voit dans cet état mais voulait lui faire promettre de devenir son exécutrice testamentaire spirituelle. Il entendait par là que madame Saint-Sauveur ne pouvant utiliser les voies juridiques sans danger pour le venger de son infortune, il lui proposait d'utiliser sa subtile intelligence et son grand pouvoir de séduction pour arriver à ses fins. Il termina sa missive par cette supplique prophétique : les malheurs ne ont pas votre charme mais l'endurciront !
Luce comprit parfaitement où son amant éternel d'un jour voulait en venir et estima que cette mission était pour elle une rédemption, une véritable et définitive raison de vivre. Elle décida de suivre à la lettre ce qu'elle avait su lire entre les lignes. Elle mit aussitôt au point le programme qui devait l'amener à dominer ce petit monde mesquin qui l'avait détruite en faisant d'elle la veuve d'un amant éphémère, l'épouse bafouée et volée par un mari odieux, la femme trompée devenue la risée d'une communauté méprisable.

Quelques jours plus tard, le corps décharné de Paul Desmond fut rapatrié pour un enterrement civil qui devait avoir lieu à la tombée du jour. En l'honneur de son amour, elle décida d'entamer dès le matin le processus vengeur qui devait lui rendre son honneur. Son choix se porta vers ce qui paraissait le plus facile à accomplir avec pour futures victimes le vicieux docteur de Joncour et par voie de conséquence son épouse hypocrite et calomnieuse.
Avec un goût certain de la mise en scène, madame Saint-Sauveur décida de se vêtir d'une tenue qui constiait à l'avenir l'uniforme de la justicière. Tailleur anthracite à la veste cintrée à la taille resserrée par une fictive et fine ceinture au-dessus de deux poches aussi fausses, puis s'évasant sur les hanches avec un effet arrondissant dont ses formes élégantes et racées ne pouvaient qu'en tirer bénéfice ; un col aux bords arrondis en réponse au V d'un décolleté raisonnable sous lequel quatre petits boutons satinés tendait la veste au-dessus de la ceinture ; le concours de solides épaulettes rendait également sa majesté au buste.
La jupe, elle, offrait une rigidité plus appuyée, droite et cachant le genoux, elle perdait sa sévérité côté arrière avec une fente assez provocante pour peu que la démarche s'y prêtât. Un petit et mignon chapeau à voilette en velours noir couronnait sa chevelure de lionne endimanchée, contrastant par son allure de béret fixé en un fort déséquilibre penchant à droite avec trois roses noires posées dessus qui tenaient une voilette soulignant plus que dissimulant l'éclat du regard. Enfin, des escarpins vernis noirs dont le plus grand classicisme était pimenté d'une rose noire. Une autre note inhabituelle vint pimenter cet attirail propice à la conquête : elle appliqua sur sa bouche un rouge à lèvres vermillon brillant accrocheur aux intentions dévastatrices.
Côté dessous, Luce choisit un symbole opposé. Si l'aspect extérieur répondait au souvenir de son cher amant défunt, les dessous évoquaient la nature de la mission vengeresse : satin et dentelles écarlates éclaboussaient de promesses diaboliques sa peau laiteuse. Elle enferma ses petits seins aux tétons disproportionnés dans un soutien gorge aux allures d'offrande en encorbellement voilé de dentelle au-dessus et satiné en-dessous. Un porte-jarretelles de mêmes matières vint harnacher ses hanches, recouvert d'une petite culotte à deux faces : à l'avant en voile fleuri de motifs en dentelle, à l'arrière en satin uni. Des bas fumés à couture parachevèrent ces artifices diaboliques.

A dix heures moins dix, elle sonna chez les de Joncour, sachant que les consultations du docteur commençaient à dix heures précises et que le matin l'épouse du médecin assurait le secrétariat. C'est avec une stupéfaction non feinte qu'Hortense de Joncour l'accueillit. Les deux femmes ne s'étaient pas parlé depuis la consultation précédente de madame Saint-Sauveur qui avait laissé des indices coupables dans le cabinet de son mari : boucle d'oreille échappée sur le fauteuil d'examen ; petite culotte roulée en boule "oubliée" sur le tapis.
Depuis, le ménage de Joncour avait basculé dans une duplicité latente que le médecin essayait avec les plus grandes difficultés de résoudre à son avantage. C'est sèchement qu'Hortense de Joncour accueillit la visiteuse :
- Mais Luce, tu sais bien que je travaille les matins, je ne peux te recevoir !
- Désolée Hortense mais ce n'est pas toi que je viens voir, c'est le docteur, répondit Madame Saint-Sauveur, avec un petite sourire qui se voulait malicieux et surtout un aplomb dont madame de Joncour ne la savait pas capable.
- Tu n'as pas rendez-vous ! répliqua-t-elle sèchement, et Régis est particulièrement débordé en ce moment.
La porte du cabinet était entrouverte et Régis apparut dans l'encadrement, surpris et visiblement très embarrassé de la présence impromptue de Luce.
- Oh Régis ! fit cette dernière, j'espère que vous pourrez me consacrer quelques minutes car vous m'avez fait tant de bien la dernière fois que je ne passerai pas la journée sans vos bons offices et elle ajouta en direction de l'épouse secrétaire : que ton mari est compétent et d'une délicatesse inouïe ! ma chérie, il m'a transformée et libérée.
Sentant venir la catastrophe, le docteur pressa sa patiente inopportune d'entrer dans le cabinet tandis que son épouse était cramoisie de fureur jalouse.

La porte refermée, il se retourna vers Luce, sidéré par son comportement insolite :
- Luce, vous êtes d'une insouciance incroyable de vous comporter ainsi devant Hortense, vous ne vous rendez pas compte de la folie de vos propos ?
Inclinant avec espièglerie son visage sur le côté elle minauda avec une voix de petite fille grondée à tort :
- Oh docteur, mais au contraire, je ne voulais que vanter vos qualités professionnelles devant votre épouse, vous avez été si… efficace, fit-elle en hésitant volontairement pour prononcer ce qualificatif.
Puis elle ajouta qu'elle avait oublié deux petites choses, en prononçant cela du bout des lèvres comme s'il ne s'agissait que d'une futilité.

Il sortit la boucle d'oreille d'un tiroir et, voyant qu'elle attendait l'autre petite chose en souriant, il lui avoua que la petite culotte avait été jetée à la poubelle par son épouse. Luce échappa un rire triomphant.
Vexé par tant de désinvolture affichée par la belle patiente, il ajouta :
- Maintenant, après votre petit numéro jubilateur de tout à l'heure je crois que nous sommes quittes !
Et il fit un geste pour ouvrir la porte, interrompu par la remarque de Luce :
- Docteur, je crois que l'autre jour vous avez oublié vous aussi quelque chose.
Devant la mine interloquée du médecin elle poursuivit :
- Oui, je crois que votre comportement n'a pas été très… , comment dirais-je, très professionnel.
Ses paroles laissèrent le docteur interdit, craignant le pire en pensant aux attouchements plus sexuels que médicaux qu'il lui avait prodigués avec un succès dépassant ses espérances les plus pernicieuses.
- Oh non ! fit-elle en riant après avoir deviné ses craintes. Je ne pense pas aux privautés que vous vous êtes octroyées en abusant de mon innocence dans cette situation si délicate. Non ! non ! Je parlais plutôt de cette faute professionnelle qui vous a poussé à négliger de vérifier l'état clinique de ma poitrine. Il est vrai que votre enthousiasme et votre acharnement à explorer avec outrance ma chatte ne m'a pas laissée indifférente. Et elle fit un pas vers lui en commençant à déboutonner sa veste de tailleur.
Le docteur de Joncour, trop perturbé jusque-là par la réaction vraiment inattendue et la métamorphose stupéfiante de sa patiente et ceci malgré la proximité de son épouse dont la jalousie ainsi alimentée annonçait un cataclysme, regarda enfin madame Saint-Sauveur dans sa tenue affolante avec les yeux du mâle. Les ongles carminés détachaient sans hâte les petits boutons et la veste s'ouvrit sur le soutien-gorge qui illumina le désir violent qui le prit au ventre comme si l'apparition de ces seins provocants sous le fin tissu rouge, avait dompté son chibre d'agressivité subite. En se retournant elle lui offrit le spectacle de ses petites fesses et de ses cuisses serrées dans la jupe coquettement fendue.
- Faites votre palpation, docteur, et soyez aussi précis qu'avec mon vagin !
Il vint se placer derrière elle, le visage au-dessus de son petit chapeau à voilette. Ses fines mains se posèrent sur les globes sans les dégager de leur enveloppe affriolante. Elles leur firent subir un pelotage, aussi lubrique qu'appuyé, à défaut de palpation médicale. Luce ponctua cette audace par des gémissements et des tortillements de son petit cul qui vint vérifier l'état de la braguette du médecin tandis qu'elle-même sentait monter les flots de son propre trouble :
-Oh Régis ! vous êtes un magicien ! Sentez-vous comme mes tétons vous obéissent ? osa-t-elle pour attiser sa fougue.
Le docteur bandant comme un satyre contre le petit cul rond de madame Saint-Sauveur en oubliait sa prochaine confrontation douloureuse avec son épouse. Ses doigts caressaient les seins fermes de Luce et s'excitaient d'autant plus de le faire à travers ce voile de dentelle qui ne protégeait plus rien. Elle le rendait fou. Encore plus fou que la fois précédente où il doutait de la volonté de sa patiente de s'abandonner à ses turpitudes. Cette fois c'est elle qui les provoquaient. Elle et ses airs de bêcheuse hautaine. Elle, la femme du sénateur jusque-là intouchable. Elle, au corps si jeune, si fragile, si inabordable de petite bourgeoise frustrée. Elle, qui s'offrait comme une gourgandine maintenant, cédant enfin, croyait-il, à son pouvoir de séduction ; Elle, dont la réaction des tétons trahissait la reddition ; Elle, la plus belle femme de la ville dont il comptait faire sa maîtresse pour faire baver de jalousie la concurrence masculine.
La sonnerie de l'interphone interrompit leur batifolage de moins en moins contrôlé. Luce en profita pour se retourner et lever sa bouche vers Régis :
- Vous avez l'autre jour oublié d'achever une autre petite chose, dit-elle en évoquant l'initiative du baiser dérangé par l'arrivée de l'épouse.
Elle se dressa aussitôt contre lui et appuya sa bouche rouge sur les lèvres du docteur. Sonné par ce baiser furtif et qu'il espérait prometteur en ne lui laissant pourtant que le goût du rouge à lèvres, Régis put néanmoins se dégager très vite pour répondre dans l'interphone où la voix sèche de son épouse lui dit que sa patiente de dix heures était là.
Luce s'éclipsa avec le sourire et s'approcha d'Hortense pour la saluer. Elle put ainsi savourer la réaction d'horreur qui s'imprima sur le visage de son ex-amie en découvrant que le rouge avait passablement débordé de ses lèvres. Elle remarqua, non sans déplaisir, que la poissonnière était la patiente attendue et qu'elle n'avait rien perdu du trouble de la situation, ce qui garantissait une publicité fulgurante pour sa mue de pitoyable cocue en salope enviée.

Si ce n'avait été la perspective d'enterrer en fin d'après-midi Paul Desmond, Luce aurait passé une superbe journée, trouvant qu'elle avait remarquablement réussi la première étape de la mission posthume confiée par son amant disparu. A l'enterrement civil, aucune personne de la ville ne s'était déplacé. Il n'y avait qu'un couple parmi lequel elle reconnut la soeur de Paul et un adolescent qui devait être leur fils. Luce resta à distance et attendit que la famille soit partie pour jeter dans la tombe une rose écarlate amèrement symbolique.
Lorsqu'en quittant le cimetière elle vit partir leur voiture, elle remarqua le jeune garçon qui la fixait intensivement à travers le pare-brise arrière jusqu'à ce qu'ils disparaissent : il avait le même regard que Paul Desmond…

à suivre

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